Le petit
Bonhomme de Foix
Chanson
française – Le petit Bonhomme de Foix – Marco Valdo M.I. –
2020
L'Assassinat d’Henri IVCharles-Gustave Housez - 1859 |
Dialogue
Maïeutique
As-tu,
Lucien l’âne mon ami, souvenance d’une comptine enfantine qui
racontait dette histoire de l’homme de Foix ?
J’en
ai entendu beaucoup de versions, dit Lucien l’âne en riant, mais à
l’origine de ma mémoire, j’ai gardé celle-ci – assez
cohérente, même si je pense qu’elle camoufle une autre
signification plus ancienne et mystérieuse, liée à l’histoire de
la ville et du Comté de Foix. La voici dans son intégralité :
« Il
était une fois,
Un marchand de foie
Qui vendait du foie
Dans la ville de Foix.
Il se dit : « Ma foi ! »,
C’est la première fois
Et la dernière fois,
Que je vends du foie
Dans la ville de Foix ! »
Un marchand de foie
Qui vendait du foie
Dans la ville de Foix.
Il se dit : « Ma foi ! »,
C’est la première fois
Et la dernière fois,
Que je vends du foie
Dans la ville de Foix ! »
Donc,
Lucien l’âne mon ami, tu connais bien cette comptine et tu
entrevois son passé tumultueux. C’est ce dernier que ma chanson –
parodie de cette comptine et comptine elle-même, entend restituer,
car c’est souvent ainsi avec les comptines : elles servent –
sans le savoir – à transmettre une mémoire cachée, un sens
crypté du fait qu’elles sont nées d’un événement généralement
dramatique, d’un grand traumatisme ou qu’elles servent à mettre
en garde les enfants et les futurs adultes contre certains aléas de
la vie. Ce qui fait que hors de ce souvenir sous-jacent, elles ont
souvent l’air un peu légères, un peu vides de sens et de passé
réellement identifiable ; ce sont des paraboles, elles
racontent autre chose au-delà de ce qu’elles racontent. Songe un
instant aux contes pour enfants qui ont la même destination et la
même fonction : par exemple, le petit chaperon rouge où le
loup va se farcir la petite fille. Ainsi, la version que tu proposes
où un marchand vient vendre du foie à Foix et une seule fois. En
dehors de l’allitération, on se demande vraiment pourquoi une
telle histoire à dormir debout. D’abord, s’il vend du foie (au
temps où remonte la chanson, il n’y avait ni surgelé, ni frigo,
ni conserveries), il ne peut venir de loin, ne fût-ce que parce que
sa marchandise ne résisterait pas à de longs transports ; son
foie arriverait pourri sur le marché ; sans compter que pour en
vivre, il lui faudrait en écouler (et en transporter) de grandes
quantités. S’il ne vient pas de loin, disons à une heure ou deux
de marche, il ne peut négliger la ville dont il est proche. Il en
ferait quoi de son foie ? De plus, s’il devait effectivement
venir au marché chaque semaine, il faudrait considérer le régime
alimentaire de la population de la ville ; ce serait peut-être
l’explication du nom de la ville elle-même ?, pourrait
avancer un farfelu.
En
effet, dit Lucien l’âne, je me disais aussi que c’était bizarre
qu’un marchand renonce ainsi à son marché, et puis, pourquoi ne
vendrait-il que du foie ? Que ferait-il des restes de ses bêtes
forcément mortes – cochons, canards ou oies, puisque sans foie ?
Dès lors, est-ce un éleveur, un boucher ? À supposer qu’il
vende tout le reste au marché, pourquoi pas le foie ? Et
pourquoi seulement à Foix ? Dès lors, il me semble aussi que
cette histoire cache quelque chose, en quelque sorte historique.
C’est
à cette élucidation, répond Marco Valdo M.I., que s’est efforcée
ma chanson. D’abord, quelle mémoire de foie ou de foi peut-on
noter à Foix, ville située aux pieds des Pyrénées en plein pays
cathare ; dans le Comté de Foix, la Foi, ce fut un temps la Foi
cathare, celle des Parfaits qu’un horrible et incroyable croisade,
lancée par un Pape au nom Innocent, on ne peut plus faux-cul, tenta
d’éradiquer. Par parenthèse, elle commença comme la croisade
contre Valdo et ses partisans. Elle dura longtemps et dit-on, elle
finit à Montségur par un bûcher énorme où on carbonisa les
derniers Bonshommes.
Oh,
dit Lucien l’âne, je les ai vus, de mes yeux vus, ces croisés sur
les chemins de France et de Navarre pillant, tuant, violant,
torturant, incendiant, pires que les Huns d’Attila. C’est à Albi
qu’on entendit « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les
siens ! » Il en reste encore des traces aujourd’hui près
de huit cents ans plus tard. L’Église catholique entendait
conserver son pouvoir et ses privilèges. Ceci dit, ce n’est pas
une spécificité catholique, car toute religion tend qui à étendre
son influence, son pouvoir en vient nécessairement
à opprimer et in fine, à massacrer, ceux qui ne se soumettent pas à
ses ukases.
Plus
tard, sans doute dans le prolongement de la résistance cathare,
Lucien l’âne, le pays cathare ou l’Occitanie, c’est tout
comme, se rallia à la Réforme. Et on recommença à les massacrer.
On
comprend aisément un
tel scénario,
dit Lucien l’âne. À
mon avis, il faudrait examiner ça comme un épisode particulier de
la
Guerre de Cent Mille Ans.
Cependant,
la chanson n’en reste pas là, puisque, moment crucial dans
l’histoire de France et de l’affrontement entre les sbires de
l’Église romaine et les partisans de la Réforme, il y eut la
tentative d’un Comte de Foix de mettre un terme à ces stupides
querelles religieuses ; il y laissa sa vie. Il s’agit bien
évidemment du roi de France assassiné Henri IV, dit le Vert Galant.
C’est la clé de cette chanson : cette volonté de mettre fin
à la guerre religieuse.
Eh
bien, dit Lucien l’âne, voyons ça et pour notre part, tissons le
linceul de ce vieux monde empêtré dans ses croyances absurdes,
malade de la foi, délinquant spirituel et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Il
était une fois
Un
petit bonhomme de Foix
Qui
mangeait du foie
Dans
la ville de Foix.
Une
fois, il eut une crise de foie ;
De
foie, mais pas de foi.
Alors,
il dit, cette fois,
C’est
la dernière fois
Que
je mange du foie
Dans
la ville de Foix.
Il
était une fois
Un
petit bonhomme de Foix
Qui
mangeait du foie
Dans
la ville de Foix.
Dans
sa tombe, il disait, ma foi,
Il
se pourrait des fois,
Que
j’aie mangé l’autre fois,
Une
ultime fois
Bien
trop de foie
Dans
la ville de Foix.
Il
était une fois
Un
petit bonhomme de Foix
Qui
mangeait du foie
Dans
la ville de Foix.
Ce
petit bonhomme de foi
Vivait
tranquille autrefois
En
la bonne ville de Foix.
Il
était pur et de Bonne Foi.
L’Inquisition
vint une fois
Tortura
et brûla les Bonshommes de Foi.
Il
était une fois
Un
petit bonhomme de Foix
Qui
mangeait du foie
Dans
la ville de Foix.
Hommes
de peu de foi,
Réfléchissez
un peu parfois,
À
la vérité et même, plusieurs fois,
Aux
hommes de Bonne Foi
Qu’on
tua autrefois
Dans
la ville de Foix.
Il
était une fois
Un
petit bonhomme de Foix
Qui
mangeait du foie
Dans
la ville de Foix.
Et
aussi de Navarre, Henri III
Henri
IV de France, Henri II de Foix
Comte,
pour être roi deux fois,
Deux
fois retroqua sa foi.
Mais
la deuxième fois ;
Un
fanatique de sa dernière foi
L’assassina
à Paris et pas à Foix.
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