Épilogue
en Queue de Poisson
Chanson française – Épilogue en Queue de Poisson – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 100
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – IV, VI)
Dialogue
Maïeutique
Décidément,
mon cher ami
Marco Valdo
M.I., tu as le chic pour les titres exotiques. Qu’est-ce que c’est
encore que cet « Épilogue en queue de poisson » ? À
le lire, on ne peut deviner de quoi il est question.
Pourtant,
Lucien l’âne mon ami, ce titre en vaut bien un autre et
d’ailleurs, comme je vais te le montrer, il n’est pas abscons au
point de ne pouvoir exposer exactement son objet.
Ainsi en va-t-il de l’épilogue qui
serait, selon le très sérieux CNRTL (Centre National des Ressources
textuelles et lexicales), qui en propose trois définitions que je te
résume :
– un
petit discours de fin pour demander au public son approbation (on
verra dans la chanson que le public approuve)
– une
dernière partie, conclusion d’un discours…
ou
– ce qui termine une affaire, une histoire, une aventure.
Et
quelle que soit la définition retenue, c’est ce qu’est
réellement cette chanson qui conte la fin définitive de Joos
Damman, l’amant crapuleux et diabolique de la bonne et folle
Katheline.
Soit,
dit Lucien l’âne, me voici renseigné quant à l’épilogue ;
mais que diable vient faire dans cette galère cette queue de
poisson ?
Pareillement,
dit Marco Valdo
M.I., l’explication se découvre en
réfléchissant au sens de cette expression. Qu’est-ce donc qu’une
queue de poisson et que vient-elle faire ici ? Une nouvelle
fois, faisons confiance au site savant susmentionné qui indique :
« Finir, se terminer en queue de poisson : tourner court,
avoir une fin abrupte et décevante par rapport à ce qui précède. »
Et comme on pourra le constater, la fin de Joos Damman est en effet
abrupte et décevante… pour ce dernier.
À
ma grande consternation, dit Lucien l’âne,
je ne peux que constater que vu de cette manière, le titre est fort
clair. D’ailleurs, cet ignoble personnage ne valait guère mieux
qu’une telle fin. Il reste que je suis fort désireux de savoir ce
qu’il en est de la bonne Katheline, dont – si je me souviens
bien – c’est également le procès en sorcellerie. Va-t-elle, elle aussi, être jetée
aux feux de l’enfer ?
À
cela, dit Marco Valdo M.I., je te répondrai « aujourd’hui
peut-être ou alors demain. »
Je
patienterai donc jusque-là, dit l’âne philosophe. En attendant,
tissons le linceul de ce vieux monde finissant, diabolique, exténuant
et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
On
compare les écritures des deux lettres :
Celle
trouvée dans la gibecière,
Envoyée
à Hilbert par Joos le faux frère
Et
celle de Hanske à sa mignonne sorcière.
Damman
a écrit la première,
La
seconde est signée du diable froid ;
Et
les témoins au nombre de trois
Les
disent issues d’une main, similaires.
Un
gentilhomme sous serment déclare :
« Je
connais les familles du mort et de l’accusé.
Je
reconnais les trois Poissons des Ryvish estampillés
Sur
la poignée de l’épée et du poignard.
Mais
d’où vient cet autre poignard ? »
« Du
trou dans le cœur d’Hilbert. »
« Donnez-le-moi
à voir ;
C’est
la Tour des Damman, c’est clair. »
Et
le Bailli énonce le jugement :
« Joos
Damman est voleur, sorcier,
Affoleur
de femmes et meurtrier,
Crimes
de lèse-majesté assurément. »
Et
l’accusé nie et sans remords,
Sur
la femme dévie la sentence de mort :
« Faites
mourir la sorcière, seule coupable
De
tous ces maux épouvantables ! »
« Je
ne fus jamais sorcier,
Je
jouais un jeu, le jeu du diable ;
Il
n’y a rien là d’abominable
Ni
matière à me condamner.
De
Satan lui-même, du démon,
Pour
ses jeux vicieux,
Cette
femme me rêvait l’incarnation.
C’était
son péché contre Dieu. »
Personne
n’est dupe. Écoutez-le bien,
Dit
Nelle, ce meurtrier trop rusé
Et
le peuple crie : « Mort à ce chien ! »
Et
torturé, le condamné finit avouer.
En
fin, Damman est de noblesse dégradé
Et
devant la commune, brûlé
À
petit feu et tout vif encore ;
Et
peuple dit : « Il l’a méritée cette mort ».