dimanche 14 mai 2017

EXPLOSIONS NUCLÉAIRES À LOS ALAMOS

EXPLOSIONS NUCLÉAIRES 
À 
LOS ALAMOS

Version française – EXPLOSIONS NUCLÉAIRES À LOS ALAMOS – Marco Valdo M.I. – 2017
Chanson italienne – Esplosioni nucleari a Los AlamosMarco Ongaro – 2004







Comme d’habitude, Lucien l’âne mon ami, je sais que tu vas me poser la question rituelle à propos de l’étrangeté de ce titre incongru. Et tu auras raison. Comme d’habitude aussi, je vais commencer par te dire que ma traduction ou plus exactement, ma version française de la canzone n’est pas tout à fait conforme à l’originale italienne. Et comment le pourrait-elle ? C’est une absurdité d’imaginer qu’elle pourrait l’être. Il y a mille raisons à ça et la principale, c’est que pour refléter exactement un texte, il n’y a pas d’autre voie que de le recopier tel quel. À partir de là, comme d’habitude, je rappellerai la raison essentielle pour laquelle je me bricole des versions françaises de textes conçus en d’autres langues et là, c’est tout aussi évident, c’est parce que je ne les comprends pas et je ne les comprends pas, car je ne connais pas – disons suffisamment – les langues dans lesquelles ils ont été écrits. D’aucuns imaginent ingénument que je connais d’autres langues que le français. Ils se trompent.

Comme je te comprends, Marco Valdo M.I. mon ami. C’est l’évidence-même quand on prend la peine d’y réfléchir : il faut toujours se traduire un texte, même quand il est dans la langue qu’on connaît. Sinon, comment expliquer les exégèses ? Souvent même, les gens demandent qu’on leur traduise ou qu’on leur paraphrase des textes dans leur propre langue. C’est vrai pour des phrases aussi simples que : le chat est sur la table ou le canapé est au milieu du salon, pour lesquelles il faut d’historiques explications. Car, comme l’on sait, ces phrases-là disent autre chose que ce qu’elles ont l’air de dire.
Ainsi, la carte n’est pas le territoire est le fondement de la sémantique générale, laquelle comme son nom l’indique s’applique à tout et donc aussi à la chanson. J’en tiens pour preuves parmi bien d’autres « Le temps des cerises », « I pompieri di Viggiù » ou « Tout va très bien, Madame la Marquise ». Cela dit, en effet, je voudrais bien que tu éclaircisses un peu ma lanterne, car ce titre me paraît fort mystérieux.

Dans les faits et au premier degré, « Explosions nucléaires à Los Alamos », c’est clair, c’est limpide. Si l’on s’en tient là, Lucien l’âne mon ami, il suffit de dire que la seule chose mystérieuse est « Los Alamos » et que Los Alamos est un nom charmant qui désigne tout simplement « Les Peupliers », ce qui n’explique pas la présence de ce toponyme dans le titre de cette chanson. En fait, Los Alamos est une petite ville des États-Unis, située au Nouveau Mexique, pas trop loin de Santa Fé et c’est sur son territoire sur le site d’une ancienne école de rancheurs (en français de Camargue : des gardians) – en fait, une ancienne école agricole – que fut établi au cours de la dernière Guerre Mondiale, dans le courant 1943, le centre de recherches nucléaires, chargé de mettre au point la bombe atomique. Mais il y a un mystère complémentaire, à savoir que ce lieu ultra-secret à l’époque n’est en réalité pas celui où eut lieu la première explosion ; il n’y en eut même jamais à Los Alamos. La première explosion de la première bombe, curieusement dénommée Gadget, effectivement conçue à Los Alamos, eut lieu à l'extrémité nord du champ de tir d’Alamogordo dans la vallée de Jornada del Muerto dans le comté de Soccoro au Nouveau-Mexique, à plus de 350 kilomètres de Los Alamos.
Cependant, je te dois quand même une autre explication. Je passe les allusions aux vedettes du cinéma hollywoodien et à l’American Way of Life de cette famille de campeurs du Wyoming et j’en viens à ce que je veux expliciter un brin : le chapeau d’Oppenheimer. Robert Oppenheimer est un physicien étazunien qui à ce moment dirige le projet Manhattan dont le but explicite est la réalisation dans les délais les plus brefs de bombes atomiques, considérées comme l’arme suprême, capable de mettre hors combat les adversaires des Alliés. En l’occurrence, l’Allemagne et le Japon.
Quant à son chapeau, c’est une façon de désigner l’explosion elle-même qui après quelques instants, prit la forme d’un chapeau.
Et ce que raconte la chanson se présente un peu comme un film à la fois précis et vague, une sorte de rêve américain – American dream – assez cauchemardeux dans lequel traîne une terrible pestilence, celle d’Hiroshima, ville japonaise frappée par la première bombe militaire, une odeur nauséeuse qui se répandit au monde entier dans les temps qui suivirent l’explosion du 6 août 1945. Cette sensation est toujours là au cœur de la Terre à hanter l’humanité entière.

Alors, Marco Valdo M.I. mon ami, maintenant que tout ça est éclairci, il ne nous reste qu’à reprendre notre tâche et à tisser le linceul de ce vieux monde explosif, nucléaire, pestilentiel, dément, légèrement suicidaire et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



John Ford passa
Avec toute son équipe ;
John Wayne
passa
Jetant la vie et le whisky par chaque pore ;
Clark Gable
passa ;
Marilyn Monroe
passa
Et
d’autres fantômes qui
Qui consumaient des Malboros en tas ;
L'air était chaud en ce matin
Pétillant et cristallin.
Mais qui aurait dit
comme ça
Que c’était l’air d’Hiroshima ?

Une blonde passa
Dans une Impala
Avec son nouvel amant
À la recherche d'un motel bon marché.
Une famille : les parents, les enfants,
Des touristes du Wyoming
Qui partaient en camping :
Le fils avait son air échevelé,
La fille avait un nœud dans les cheveux.
Il y avait un ciel bleu
Comme on n’en avait jamais vu là.
Mais qui aurait dit comme ça,
Que c’était le ciel d’Hiroshima ?

Le chapeau d'Oppenheimer
Poussait comme un champignon
Là-bas tout au fond
De l'ennui du désert.
Fermi était déjà mort
Et le temps long encore
Avant qu’on accable tout haut
Ce monde bourreau.

John Wayne se leva,
John Ford broncha,
Marilyn Monroe, le sourire joyeux,
Cacha son visage dans ses cheveux.
Ainsi, on ne sait pas plus qu’elle
Ce que veut dire
Vivre et mourir.
Avec ce frisson de cellules rebelles
De celui qui dans la nuit, va
À la cuisine à pas discrets
Se chauffer un peu de lait,
De ce lait au goût d’Hiroshima