CALENDRIER 1913
Version
française – CALENDRIER 1913 – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson
allemande – Kalender
1913 – Erich Mühsam – 1913
Texte
d'Erich Mühsam
(1878-1934), anarchiste
et poète, une des premières victimes du nazisme triomphant : arrêté
en 1933, juste
après l'incendie
du Reichstag, il fut
lâchement assassiné
dans le camp de
concentration d'Orianenburg, le 10 Juillet 1934.Musique
de Dieter Süverkrüp et de Walter Andreas Schwarz dans leur album
« Erich Mühsam : Ich Lade Euch Zum Requiem » publié en
1995.
Plus récemment, elle a été mise en musique par
Christoph Holzhöfer.
Version
française – CALENDRIER 1913 – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson
allemande – Kalender
1913 – Erich Mühsam – 1913
Plus récemment, elle a été mise en musique par Christoph Holzhöfer.
Erich Mühsam boit un café |
Une
poésie que
je devine
très proche
du
parcours, non formalisé mais transversale, de La
Guerre de Cent mille ans que les riches ont fait, font et feront aux
pauvres.
Il y faudrait donc une urgente traduction des excellents Marco Valdo M.I et son inséparable ami Lucien Lane, que je remercie d'avance.
Il y faudrait donc une urgente traduction des excellents Marco Valdo M.I et son inséparable ami Lucien Lane, que je remercie d'avance.
Évidemment,
Lucien l'âne mon ami, on ne pouvait refuser ça.
Certes,
Marco Valdo M.I. mon ami, tu as bien fait, sauf que tu as mis du
temps à établir cette version française… Alors qu'il t'était
bien dit par Bartleby que c'était urgent…
En
effet, mais j'avais placé cette canzone d'Erich Mühsam dans la
liste des travaux en cours, mais il y en a tellement et puis, d'un
autre côté, Bartleby lui-même a réclamé La Déclaration
Universelle des Droits de l'Âne... Il y a aussi les événements de
la vie quotidienne. Comme tu le sais, tout cela est très prenant.
Par ailleurs, il me paraît que je suis atteint d'un curieux
syndrome, que j'appellerais volontiers le syndrome de la création ou
celui de l'homo faber intellectualis (est-ce bien ainsi que l'on
dit ? Je n'en sais plus rien…), qui fait que j'ai de plus en
plus tendance à manquer de temps pour faire ce que j'ai vraiment
envie de faire…
Somme
toute, ça tourne à la passion…, dit Lucien l'âne d'un air de
deux airs.
De
fait, et tu le vois bien, je démarre tôt le matin et je termine
tard le soir… Je refuse mille sollicitations extérieures. J'ai
beau trier, écarter, user de sévérité… Rien n'y fait.
Cependant, tu le vois aussi très bien, je ne m'en porte que mieux.
Donc, faire, c'est passionnant, mais l’inconvénient, c'est qu'on
n'en voit jamais la fin. Imagine, il suffit de parcourir les Chansons
contre la Guerre pour déterminer l'ampleur du phénomène…
Je
le vois, je te vois là devant ton appareil, cette machine à écrire
perfectionnée, dont on dirait qu'elle pense en couleurs. Je t'y vois
dans les rares moments où tu n'es pas tenu à faire autre chose.
Et
oui, Lucien l'âne mon ami, on ne fait pas que ça… Il y a les
amis, un peu d'activités que je qualifierai de sociales… Et puis,
les lectures, sans compter la maison – oikos qu'il faut bien faire
tourner. Donc voilà, Le Calendrier 1913 de Mühsam s'était un peu
enlisé dans toute cette vase de vie. Et il y avait pire encore,
voyant qu'il s'agissait de Mühsam, je l'avais mis dans ma liste sans
lire la petite note introductive… Ce fut là mon horrible erreur…
Je me jette un tas de cendres sur la tête.
Si
je te comprends bien, comme c'était de Mühsam, à qui si je ne
m'abuse, tu as consacré une chanson
dans tes Histoires d'Allemagne, il était certain que
tu allais le traduire...
Quant
à la canzone elle-même, elle aussi m'a joué des tours… Traduire
Mühsam n'est vraiment pas simple, surtout quand on ne connaît pas
l'allemand. Et en donner une version française que je puis relire
sans honte, ce n'est pas simple non plus. Évidemment, comme on le
faisait remarquer récemment, il existe peut-être des traductions
françaises de ce texte…
Depuis
le siècle qu'il est écrit, c'est bien possible !
Mais
ç'eût été, comment dire ? : malhonnête de priver
Bernart Bartleby de ce qu'il demandait : c'est-à-dire :
une traduction de notre main. Et pour tout révéler,
je n'ai même pas cherché à savoir s'il en existait une.
J'ai pris ce calendrier par le début et j'ai été jusqu'au
bout sans me retourner. Cela dit, si quelqu'un trouve une
autre traduction en français du Kalender
1913, qu'il l'envoie en vitesse. Rien que
pour comparer les versions ; j'aime beaucoup vérifier.
On ne sait jamais, je peux certainement me tromper ou ne pas
comprendre… ou ne pas avoir compris… mais la voici
quand même cette version française de ma main.
Avec
toutes tes explications, je ne sais toujours pas ce qu'elle raconte,
cette canzone de ce poète assassiné. C'est fou d'ailleurs ce que
les gens ont tendance à s'assassiner eux-mêmes en prison… dans
les communiqués officiels.
Oui,
ce doit être une vieille coutume. Quant au Kalender 1913, c'est une
canzone qui se présente sous la forme… d'un calendrier,
c'est-à-dire en 12 mois, très bien ordonnés de janvier à
décembre. Elle
raconte une histoire d'Allemagne, un peu comme Günter Grass fera
plus tard avec tout le siècle dernier (voir
à
cette
adresse ).
Je te détaille les
douze mois :
janvier :
le riche a chaud, le pauvre gèle ;
février :
au carnaval, le riche séduit la pauvre qu'il laissera tomber ;
mars :
quel recul, en mars 1848, c'était la révolution en Allemagne ;
avril :
le mouvement s'enlise ;
mai :
défilé « révolutionnaire » autorisé ;
juin :
le pauvre en balade inquiète les autorités ;
juillet :
le riche se baigne, le soldat combat ;
août :
il y a de grands massacres qui se préparent et tout le monde s'en
fout ; septembre : retour à l'école, souvenirs de
vacances ;
octobre
(je te rappelle que 1914 suit 1913...) : rappel des troupes :
le plaisir d'être soldat ;
novembre :
on gèle, mais le manteau est gagé ;
décembre :
le temps des cadeaux : l'enfant riche en reçoit plusieurs, le
pauvre s'en confectionne un.
Alors,
oui, Bartleby avait bien auguré de ce que cette canzone aurait à
voir avec La Guerre de Cent Mille Ans… Et le voilà servi.
Maintenant, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux
monde flottant à la dérive dans cette Guerre de Cent Mille Ans,
ballotté entre les privilèges des uns et les nécessités des
autres, écrasant, mortel et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Le riche remonte sa fourrure,
Et le poêle doucement rougeoie.
Pour ne pas geler, le pauvre colmate,
Sa fenêtre avec du papier d'emballage.
Au carnaval, l'homme riche regarde
Une fille pauvre avec appétence.
Combien l'amour était tendre,
On le saura en novembre.
Des
temps nouveaux sont arrivés.
C'était en mars et savez-vous, mon ami
Qu'on n'est pas encore à l'avant-mars aujourd'hui
C'était en mars et savez-vous, mon ami
Qu'on n'est pas encore à l'avant-mars aujourd'hui
Celui qui veut devenir diplomate,
Prendra modèle sur avril.
L'ouragan éclata le bleu tranquille
Et personne ne fit rien ensuite .
Avec la femme et l'enfant dans la nature
Pour les bains, les soins, le grand air, la cure.
Mais le misérable qui promène,
Fait sourciller le digne gendarme.
Comme une piscine rafraîchit quand même
Quand tombe du ciel l'ardente canicule
Le soldat sert la patrie
Par trente degrés, il se bat encore.
Dans le monde se passent des choses horribles ;
On le constate dans des conférences.
On parle joyeusement, on boit, on danse,
Et on maintient le statu quo terrible.
Les vacances sont bien finies.
L'enseignant tient prête sa règle.
Un enfant a vu la montagne et la cascade,
L'autre seulement une porcherie.
Les manœuvres d'automne rappellent déjà
Le territorial et le réserviste.
Le casque pèse, la jambe se blesse.
Ô quel plaisir d'être soldat !
Le jour raccourcit. Le froid menace.
On sent le besoin de tenues chaudes
Ah, si le reçu de la caution pouvait réchauffer
Comme le paletot qu'on a fourgué !
Maintenant le bon Saint-Nicolas va partager
Les beaux cadeaux de fin d'année.
Le pauvre enfant se l'est fabriqué,
Au riche, ils seront apportés.