LE
MERDAILLER
Version
française – LE MERDAILLER – Marco Valdo M.I. – 2013
Chanson
italienne - Ir merdaiolo - La
Ghenga
Texte
de Fabio Meini
Voici,
Lucien l'âne mon ami qui rit et qui est toujours content et que je
suis toujours content de rencontrer, voici donc une chanson qui
devrait te plaire. Et sans doute te rappeler certaines gens que tu as
rencontrés tout au long de tes interminables pérégrinations. On en
fait du chemin sur des petits sabots noirs comme les tiens et puis,
avec le temps...
Je
te remercie beaucoup, Marco Valdo M.I. mon ami, de tous tes
compliments... Mais avec ça, tu ne m'as rien dit de la chanson...
Sans doute, une de tes traductions...
Oui,
certes et du pisano, même. Ce n'est pas un exploit particulier que
de traduire du pisan, mais c'est l'occasion de faire un petit clin
d’œil à notre ami Luccio, lequel se nomme en effet Pisano. Bon,
venons-en à la chanson. C'est une sorte de ballade ou de complainte
d'un gars qui fait le métier de cantonnier ou d'éboueur ou quelque
chose du genre, et comme ce métier était nommé en italien : «
merdaiolo », j'ai dû trouver un équivalent en français et j'ai
traduit d'une façon qui lui donne rang directement dans les Chansons
contre la Guerre par le mot, un néologisme, je le crois bien : «
merdailler ». Une sorte de mot-valise où se croisent diverses
choses : en premier la « merde » – indispensable, elle était là
dès l'origine. Ensuite, le mot « médaillé »... qui désigne
quelqu'un qui a été gratifié d'une médaille, généralement pour
avoir tué ses semblables... et la finale en « -er » qui indique le
métier comme dans boulanger, plombier, boucher... Donc, un «
merdailler » serait celui qui ferait ce métier où il est question
de ramasser les merdes des autres... Ce que font les éboueurs, les
cantonniers... un boulot de bête de somme en quelque sorte.
En
effet, il n'y a qu'à regarder ce que nos bonnes gens laissent
traîner sur le bord des routes et des rues... et nous les ânes, les
somari, les bêtes de somme, on nous file toujours ces boulots de
merde... C'est notre destin, c'est le destin des pauvres, des
miséreux, des esclaves... dans cette société où se perpétue la
Guerre de Cent Mille Ans que les riches font aux pauvres pour
précisément les forcer au travail, les obliger à faire des
infâmies afin de satisfaire les exigences les plus insensées, de
fabriquer les choses les plus superfétatoires et inutiles... et
d'assurer leur domination, de nourrir leur avidité et de combler
leurs ambitions.
Donc,
c'est la complainte du « merdailler », précédée de celle d'un
soldat, puis de celle d'un affairiste … qui curieusement
disparaît... Nul ne sait ce qu'il est devenu... Du moins dans la
version française... dans la version italienne, il a un travail...
Note que ce n'est pas incompatible... Il pourrait très bien avoir
trouvé, obtenu un « travail » et puis, qu'on le fasse disparaître.
Ça arrive aux meilleurs dans certains pays...
Aux
pires aussi, dit Lucien l'âne.
Notre
« merdailler » lui est sicilien... Il est d'Erice à l'extrême
ouest de la Sicile et , même s'il a un métier que d'aucuns
considèrent comme « infâmant », il ne tue personne et il garde
son honneur , ce qui finalement importe le plus. Il est pauvre, mais
il satisfait à son être d'homme, il garde sa décence.
Ça
me rappelle la « common decency » dont Orwell faisait si grand cas.
Tu sais, la « common decency »
(http://www.journaldumauss.net/spip.php?article617), c'est ce qui
intuitivement détermine « ce qui ne se fait pas » ; bref, la base
de toute société humaine correcte.
Avant
d'en terminer, je voudrais te faire connaître ou te rappeler le
monologue d'un autre cantonnier qui sut trouver le simple bonheur de
vivre, ce bonheur de vivre dont Ferré faisait le résumé ainsi .
«
On vit on mange et puis on meurt
Vous
ne trouvez pas que c'est charmant
Et
que ça suffit à notre bonheur
Et
à tous nos emmerdements » [[7794]].
Celui
que j'évoque, c'est le cantonnier que monologuait Fernand Raynaud et
que je proposerai intégralement un de ces jours ; le temps de
rassembler le texte...
En
attendant ce jour heureux, dit Lucien l'âne en souriant doucement,
je te propose moi de reprendre notre toile et de tisser le linceul de
ce vieux monde gangrené, militariste, libéraloïde, autoritaire et
cacochyme.
Heureusement
!
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Je
m'appelle John Mc Queen
Je suis soldat dans les marines
Toujours à disposition
Pour défendre la nation
Je suis soldat dans les marines
Toujours à disposition
Pour défendre la nation
Je
m'appelle Andrea Brambilla
J'ai deux yachts et une villa
J'ai léché pas mal de cul
Maintenant, j'ai disparu
J'ai deux yachts et une villa
J'ai léché pas mal de cul
Maintenant, j'ai disparu
Je
suis resté merdailler
Mais je n'ai jamais eu le tourment
D'avoir honte devant mes enfants.
Mais je n'ai jamais eu le tourment
D'avoir honte devant mes enfants.