vendredi 24 juin 2022

ANARCHIE

 

ANARCHIE


Version française — ANARCHIE — Marco Valdo M.I. — 2022

Chanson en langue allemandeAnarchieJohn Henry Mackay1897poème en langue anglaise — 1888




JOHN HENRY MACKAY à 16 ans

 

 

 

Dialogue maïeutique


Il est toujours difficile, dit Marco Valdo M.I., de concevoir un commentaire à propos de ces chansons qu’on traduit ici ; c’est à chaque fois une gageure. Par exemple, pour elle-ci, j’ai longtemps hésité à en proposer un et à faire notre dialogue maintenant coutumier.


Je vois, dit Lucien l’âne, et je te rejoins complètement. Cependant, il me semble que tu viens d’en amorcer un et je ne vois pas où il nous emmène. Ce qui est sûr, c’est qu’on ne peut en rester là, qu’il te faut poursuivre.


Bien sûr, répond Marco Valdo M.I., et je vais quand même essayer de comprendre ce qui m’a retenu au point que j’étais prêt à n’en faire aucun. Ce qui — à bien y regarder — en serait un en soi.


Et alors ?, demande Lucien l’âne.


Eh bien, ce qui me retenait, Lucien l’âne mon ami, c’était l’ampleur du sujet, tout ce qui se cache derrière ce mot « Anarchie » et que j’entrevoyais là une interminable péroraison. Il me fallait synthétiser tout ce qui se bousculait dans mes pensées concernant ce mot, mais aussi je voulais dire un mot de l’auteur et de son texte poétique.


Faisons ainsi, dit Lucien l’âne. Quid du mot, d’abord ?


En premier, dit Marco Valdo M.I., avant d’aller plus avant, il me faut faire une solide rectification et dire que Riccardo Gullota voyait juste quand il affirmait dans sa notice en italien que le texte allemand était le plus suggestif : « Troviamo particolarmente suggestiva la versione tedesca di Christoph Holzhöfer », car il s’agit en fait du texte original de John Henry Mackay, repris exactement par Christoph Holzhöfer ; texte tiré des Gesammelte Dichtungen. Erste Reihe : Jugend 1882 — 1890. Mackay, John Henry. Verlag : Zürich u. Leipzig, Verlag von Karl Henckell & Co., o.J. (1897), 1897. Cependant, comme Mackay (de père écossais et de mère allemande et sans doute, bilingue) n’arrive à Berlin – venant d’Écosse, qu’en 1896, on peut supposer que la version anglaise, datée de 1888, est la version origine. Ensuite, j’écarte toute connotation négative ou péjorative, telles qu’en développent les adversaires de l’anarchie ; en cela, je suis la logique du poème et celle de John Henry Mackay ; « Laissons-les crier ! ». Je ne tiendrai compte que du côté optimiste de l’anarchie.


Fort bien, dit Lucien l’âne, il est vrai que le monde a changé de bases et sans doute, ceci explique cela : l’anarchisme violent et explosif a été abandonné.


Cependant, je n’entrerai pas dans l’histoire de cette évolution de l’anarchie et du monde, dit Marco Valdo M.I., sauf pour noter au passage que les révolutions violentes semblent avoir débouché sur des régimes qui se sont très fortement éloignés de leurs prémices et avoir donné des résultats très contraires à ce qu’elles promettaient. Et là aussi, la chanson est juste dans sa vision de l’anarchie et de l’anarchiste :


« Je suis un Anarchiste ! Et je ne peux accepter

De dominer, ni d’être dominé ! »


Oui, dit Lucien l’âne, mais n’est-ce pas là une affirmation individuelle ?


Exactement, tu fais bien de le faire remarquer Lucien l’âne mon ami. Pour John Henry Mackay et plein d’autres, l’anarchie est par essence individualiste et non-violente et tend à un futur pacifique et à une société enfin pacifiée. Quand et comment elle adviendra n’est pas dit dans la chanson, sauf ceci : « Quand chacun à lui-même s’éveillera » (Wenn jeder endlich zu sich selbst erwachte).


Je pense, comme lui, que c’est la condition sine qua non, dit Lucien l’âne. C’est évident quand on pense que l’anarchie ne peut être imposée par force — « ni dominer, ni être dominé ». C’est une société du consensus où chacun respecte chaque autre et où nul ne songe — fût-ce un instant, à prendre le pouvoir ou à profiter de l’autre. Sans aucun doute, on n’est pas rendus et la chanson le distingue bien. Mais il n’est pas d’autre voie possible. En attendant nous vivons, alors, tissons le linceul de ce vieux monde dominateur, dictatorial, aveugle, mal barré et cacochyme.




Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane







Toujours injuriée, maudite, jamais comprise,

Tu es la terreur barbare de notre époque,

Crie la multitude, la ruine de tout ordre,

La guerre et la rage sans fin du meurtre.


Oh, laissez-les crier. Pour ceux qui n’ont jamais lutté,

La vérité à trouver derrière le mot se cache,

Le juste sens du mot ne leur est pas donné,

Ils resteront des aveugles parmi les aveugles.


Mais toi, ô mot, si clair, si fort, si pur,

Tout ce que j’avais pris pour but, tu diras.

Je te donne au futur ! Le tien est sûr,

Quand chacun à lui-même s’éveillera.


Dans l’éclat du soleil ? Dans le frisson de la tempête ?

Je ne peux le dire, mais la terre, elle, le verra !

Je suis un Anarchiste ! Et je ne peux accepter

De dominer, ni d’être dominé !