samedi 24 mai 2014

OFFICE DES TÉNÈBRES POUR GALILÉE

OFFICE DES TÉNÈBRES POUR GALILÉE

Version française – OFFICE DES TÉNÈBRES POUR GALILÉE – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanson chilienne en espagnol - Oficio de tinieblas por Galileo Galilei - Quilapayún – 1984
http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?lang=it&id=47400
Texte de Desiderio Arenas
Musique de Patricio Wang



Et malgré les morts qui 

Continueront à mourir, oui
Oui, toujours, toujours pourtant

Elle se meut, pourtant

Si.






Lucien l'âne mon ami, l'heure est solennelle, voici un Office des Ténèbres...


Un Office des Ténèbres, quelle chose singulière ! Je me demande bien de quoi il s'agit et si c'est ce que je pense, c'est-à-dire un office religieux, quelque chose comme une longue messe, je me demande alors que vient faire un tel Office dans les Chansons contre la Guerre...


En effet, tu as bien saisi ce dont il s'agit, mais l'Office des Ténèbres dont il est question ici est au sens strict du mot – et tu sais combien et comment je connais ce mot et son sens premier – une parodie.


Une parodie d'Office des Ténèbres... Quel sens cela peut-il bien avoir ? Et il me semble me souvenir qu'un tel office n'est pas une mince affaire, il dure et dure et serait plutôt du genre lamentable et triste.


Et pourtant... C'est à un Office des Ténèbres [ http://fr.wikipedia.org/wiki/Office_des_T%C3%A9n%C3%A8bres] qu'elle fait référence cette parodie et bien entendu, volontairement. Et c'est un Office des Ténèbres pour Galilée. Ainsi, elle entend ainsi, comment dire... donner de la solennité et du poids à l'histoire qu'elle raconte... à savoir le procès fait par l'Inquisition catholique, apostolique et romaine à Galilée qui, par ses assertions, avait mis en cause l'édifice tout entier du christianisme, de même de tout déisme... En faisant tourner la Terre sur elle-même et autour du Soleil, il faisait crouler tout anthropocentrisme et par là-même, remettait l'homme et ses prétentions à sa place d'une espèce biologique quelconque sur une planète quelconque... Dès lors, plus de grand dessein, plus de fondement à la croyance... C'était gênant pour qui avait compris où menait la voie galiléenne. Scientia vincere tenebras, la messe était dite. L'Église avait compris pour qui sonnait le glas... Pour elle, pour Dieu, pour la religion. Mais si dans le principe la cause était perdue, si à long terme, l'Écar (Église catholique, apostolique et romaine) savait la partie perdue, savait que son Dieu se dissoudrait dans l'espace, il s'agissait pour elle de conserver l'essentiel, c'est-à-dire le pouvoir... Discret, un peu occulte, mais le pouvoir...


Ah, le pouvoir (dont Dieu lui-même n'est qu'une hypostase), cette terrible folie qui meut la Guerre de Cent Mille Ans que les riches et les puissants (dont cette Église et d'autres religions) font aux pauvres afin précisément de conserver et d'étendre ce foutu pouvoir...


Et donc, l'affaire était d'importance et ce Galilée un peu galeux... Il fallait le contraindre à la rétractation... Il accepta sans trop se faire prier... Il valait mieux, car les prières de l'Inquisition étaient assez rudes. Il accepta d'autant plus facilement que malgré sa rétractation et tout ce qui pourrait être dit... la Terre continuerait de tourner jusqu'à ce que disparaisse son étoile. « E pur si muove » - « Et, elle se meut, pourtant ... » Donc, la voie galiléenne mettait par terre l'astronomie de Ptolémée et tout ce qui s'en suit. D'où cette psalmodie du chœur dans la chanson : Ptolémée... Une invocation, comme si ça pouvait y faire quelque chose. Mais on est, je te le rappelle, dans un Office des Ténèbres, on fait dans le lavage de cerveau religieux... Bien sûr, ici, dans l'imitation, la parodie. Pour le reste, on entend Galilée - dans le texte en caractères romains ; et le Chœur des inquisiteurs en caractères italiques. D'un côté, la pensée logique et rationnelle de Galilée, par ailleurs versé dans les sciences ; de l'autre, les Inquisiteurs usant des vieux trucs religieux. Pour le détail, voir la chanson...


Mais avec nous, ces vieilles manipulations, ces exorcismes, ces tours de passe-passe n'ont jamais eu de succès. Ce n'est pas pour rien que nous disons : « Noi, non siamo cristiani, siamo somari »... Cela étant, nous reprenons notre inlassable tâche qui est de tisser le linceul, le suaire de ce vieux monde encore crédule, croyant, religieux, inféodé aux vieilles lunes, rongé par les mythes et cacochyme.



Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




PTOLÉMÉE

Je sais qu'inséparable de l'idée
Que nous pouvons avoir
De l'homme, il y a l'homme
En lui-même ;

PTOLÉMÉE

Que parfois souffre le concept
D'être confronté
À son être concret
Qu'on peut appréhender ;

PTOLÉMÉE

Je sais que le chemin le plus court
Entre deux points lumineux
Passe nécessairement
Par l'ombre.

Haec homini est perfectio
similitudo Dei

Et que l'immobilité
Ne peut être sacrée

Haec homini est perfectio
similitudo Dei

Car la création
Est un acte
Et l'acte est

Une idée
En perpétuel mouvement.

PTOLÉMÉE

Si la terre a été conçue
À l'image et semblable
À la pensée de Dieu,
Si la pensée
A une trajectoire elliptique,
La Terre est une pensée
Qui tourne autour du Soleil

PTOLÉMÉE

Nous vous exorcisons
Esprits orgueilleux, arrogants,
Pensées de démons,
Anges sceptiques et dissidents.
Nous vous exorcisons au nom
De nos ténèbres,
De notre dogmatisme,
De nos vérités,
De nos sophismes.
Nous vous exorcisons au nom
De l'intangibilité
De notre pacte sacré
Avec la parole consacrée.

Pour les hommes qui survivront
Aux bûchers intolérables,
Qui naîtront dans la panique,
Qui subiront la critique,
Pour ceux qui renaîtront
De l'éternelle obscurité
Dans les prochaines dix mille années,
Pour ceux-là, je chante.

Et dire que ces oreilles
Pures, saintes,
Devront un jour être meurtries
Par des calomnies
Si irresponsables, si démobilisatrices,
Hérétiques,
Contraire aux politiques
De la Sainte Église
Chaotique, Monopolistique, Mondaine.

Elle se meut, pourtant,
Et dans ce pourtant
Toute la question se résume :
Malgré le silence
Imposé du haut de la puissance,
Si pourtant,
Malgré les blessures qui se rouvrent
Et malgré les morts qui
Continueront à mourir, oui
Oui, toujours, toujours pourtant
Elle se meut, pourtant
Si.