Cayenne
Chanson
française – Cayenne – anonyme – vers 1900.
Interprétation :
Parabellum : https://www.youtube.com/watch?v=Kgnu3ekZSF0
BRUANT
DANS SON MIRLITON
|
Cette
chanson anarchiste
des
environs de 1900 souvent
chantée au
bagne
de Cayenne,
souvent attribuée à Bruant.
Elle fut reprise avec succès par le groupe de rock
Parabellum
en 1986,
mais le dernier couplet a volontairement été omis par le parolier
de l'époque. Puis
par Les
Amis d'ta femme,
en 2000. Ces derniers donneront une alternative au refrain à la fin
de la chanson. Opium
du peuple
a fait une reprise de la version de Parabellum en 2014 ; version
intégrée sur l'album La revanche des clones en 2015.
Elle
est parfois également interprétée par Sanseverino
lors de ses concerts, de même pour le groupe "Le grôs tour".
Le
dialogue maïeutique avec l'âne
Voici
encore, Lucien l'âne mon ami, une chanson à propos de Cayenne, ce
terrible bagne que la France entretînt en Guyane jusqu'en 1946 ;
du moins, Cayenne, c'est son titre et je trouve pourtant que ce n'est
pas une chanson sur Cayenne. Cayenne sert à appâter le badaud. En
réalité, c'est une chanson à propos d'un truand, qui a commis un
crime et va purger sa peine à Cayenne, comme Jojo les Grands Chemins
dans Les
Bambous, la chanson de Dulac que je t'ai dite l'autre
jour. Jusque là, on est devant un fait divers.
Évidemment.
Un type qui tue un autre pour histoire de femme, c'est un fait
divers.
Qu'il
s'agisse d'un « noctambule
en or massif » n'en fait pas une chanson
anarchiste. L'ennui,
c'est qu'on en a fait une chanson « anarchiste » ;
ce qu'à mon sens, elle n'est pas. C'est du maquillage pour
satisfaire à la mode de l'époque (les
anarchistes donnaient des frissons ; c'étaient de grands
méchants loups) et
en finale, elle reproduit le discours de l'ordre établi en
assimilant les anarchistes à des petites frappes, à ce que le même
ordre établi désigne sous le nom de racaille. Elle
contribuait grandement à cette propagande qui voulait disqualifier
les libertaires, les socialistes, les anarchistes.
Mais
quand même, dit Lucien l'âne, cette chanson insulte la police, s'en
prend aux sergents de ville, aux condés, aux flics en civil.
C'est
exact, c'est nécessaire à son maquillage, mais de là à être une
chanson « anarchiste », même uniquement pour la forme,
il y a de la marge.
Explique-moi
plus clairement, car « Mort aux vaches ! » – au
sens figuré s'entend – est souvent mis au compte des anarchistes.
Peut-être.
Mais crier une telle phrase ne fait pas pour autant un anarchiste.
« Mort aux vaches » est une expression argotique qui est
utilisée dans le « milieu », dans cette couche de
population interlope, qui vit en marge de la légalité, sans
avoir la moindre intention d'édifier un monde meilleur, de faire une
révolution, de changer le monde…
Que
les anarchistes, qui ont souvent maille à partir avec la police,
aient adopté ce « Mort
aux vaches ! » et
le trouvent drôle, c'est un fait. Que des gens se disent ou se
croient anarchistes parce qu'ils n'aiment pas la police, c'est une
erreur de leur part. L'anarchisme est une conception philosophique,
une conception politique dont je doute fort qu'ils partagent les
principes et les buts et une
façon d'être aussi qu'ils
soient prêts à assumer. Et encore moins près de la mettre en
pratique. Et pour en revenir à la chanson, il n'est pas dans les
habitudes, ni dans les conceptions anarchistes de tirer profit
d'autrui et particulièrement, de s'établir maquereau et de vivre
aux crochets d'une ou plusieurs femmes. Ce que fait le personnage
dont parle la chanson.
Peut-être,
mais on dit que la chanson serait de Bruant, celui-là même qui a
écrit la chanson des Canuts…
Admettons,
mais ça ne change rien à la question. Deux mots sur Bruant, dès
lors. Aristide Bruant
était – en fait – principalement un artiste de métier, et s'il
était anarchiste, c'était sur la scène et dans son cabaret.
C'était ce qu'on appelait un chansonnier populaire et il s'était
construit une image d'anarchiste pour épater le bourgeois et
conquérir un public. Il était assez dans le ton de son époque où
il était de bon ton d'aller s'encanailler à Montmartre et
il sut en faire son miel et son beurre.
Quant à la chanson elle-même, elle fait partie de ces chansons
dites de répertoire, mais d'un répertoire faussement populaire
comme Nini Peau Chien ou L'Hirondelle des Faubourgs. D'ailleurs, la
presse populaire tirait profit du même genre et tout
particulièrement, du fait divers, de préférence crapuleux et
sordide. C'est d'ailleurs encore le cas aujourd'hui.
Résumons :
C'est une chanson du monde ambigu de Bruant, une chanson de Bruant
sur un faux fait divers des bas fonds de Paris vers 1900, sur un
crime de carton-pâte, commis par un faux truand ; c'est du
guignol et on en restera là. Elle est loin, cette
chanson, très loin de l'Opéra de Quatre
Sous et de sa mise en perspective du monde glauque des faubourgs de
Londres.
J'avais
bien ressenti ça aussi. C'est du chiqué, on dirait du guignol, en
effet, mais rien n'empêche de s'amuser en allant voir un
chansonnier chansonner.
Quant à nous, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce
vieux monde frelaté, voyeur, assassin et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Je
me souviens encore de ma première femme ;
Elle s'appelait Nina, une vraie putain dans l'âme !
La Reine des morues de la plaine Saint-Denis,
Elle faisait le tapin près la rue de Rivoli !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !Elle aguichait le client quand mon destin de bagnard
Vint frapper à sa porte sous forme d'un richard…
Il lui cracha dessus, rempli de son dédain,
Lui mit la main au cul et la traita de putain.
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Moi qui étais son mec et pas une peau de vache,
Moi qui dans ma jeunesse pris des principes d'apache,Je sortis mon 6.35, et d'une balle en plein cœur
Je l'étendis raide mort et je fus serré sur l'heure !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Aussitôt arrêté, je fus mené à Cayenne.
C'est là que j'ai purgé le forfait de ma peine…
Jeunesses d'aujourd'hui, ne faites plus les cons,
Car pour une simple connerie, on vous fout en prison !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Si je viens à mourir, je veux qu'on m'enterre
Dans un tout petit cimetière près de la rue Saint-Martin,
Quatre cents putains à poil viendront crier très haut :
« C'est le Roi des julots que l'on colle au tombeau ! »
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Elle s'appelait Nina, une vraie putain dans l'âme !
La Reine des morues de la plaine Saint-Denis,
Elle faisait le tapin près la rue de Rivoli !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !Elle aguichait le client quand mon destin de bagnard
Vint frapper à sa porte sous forme d'un richard…
Il lui cracha dessus, rempli de son dédain,
Lui mit la main au cul et la traita de putain.
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Moi qui étais son mec et pas une peau de vache,
Moi qui dans ma jeunesse pris des principes d'apache,Je sortis mon 6.35, et d'une balle en plein cœur
Je l'étendis raide mort et je fus serré sur l'heure !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Aussitôt arrêté, je fus mené à Cayenne.
C'est là que j'ai purgé le forfait de ma peine…
Jeunesses d'aujourd'hui, ne faites plus les cons,
Car pour une simple connerie, on vous fout en prison !
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Si je viens à mourir, je veux qu'on m'enterre
Dans un tout petit cimetière près de la rue Saint-Martin,
Quatre cents putains à poil viendront crier très haut :
« C'est le Roi des julots que l'on colle au tombeau ! »
Mort aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Sur
sa tombe, on lira cette glorieuse phrase
Écrite par des truands d'une très haute classe :
« Honneur à la putain qui m'a donné sa main !
Si je n'étais pas mort, je te baiserais encore ! »
Écrite par des truands d'une très haute classe :
« Honneur à la putain qui m'a donné sa main !
Si je n'étais pas mort, je te baiserais encore ! »
Mort
aux vaches ! Mort aux condés !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !
Vive les enfants de Cayenne ! À bas ceux de la Sûreté !