mercredi 17 juillet 2019

LA DIGNITÉ DU COCHON EST INTANGIBLE !


LA DIGNITÉ DU COCHON EST 
INTANGIBLE  !

Version française – LA DIGNITÉ DU COCHON EST INTANGIBLE  ! – Marco Valdo M.I. – 2019
Chanson allemande – Die Würde des Schweins ist unantastbar !Reinhard Mey1991









Dialogue Maïeutique


Sans commentaires !, dit Marco Valdo M.I., sauf pour dire que Boris Vian avait fait le lien dans son Joyeux tango des Bouchers de la Villette, que je résume :

« Faut que ça saigne !
Faut que les peaux se fassent tanner,
Faut que les pieds se fassent paner,
Que les têtes aillent mariner,
Faut que ça saigne !
Faut avaler de la barbaque
Pour être bien gras quand on claque
Et nourrir des vers comaques,
Faut que ça saigne !
Bien fort !

C’est le tango des joyeux militaires,
Des gais vainqueurs de partout et d’ailleurs ;
C’est le tango des fameux va-t-en-guerre,
C’est le tango de tous les fossoyeurs !
...
Tiens ! Voilà du boudin ! Voilà du boudin !
Voilà du boudin ! »

Oh, dit Lucien l’âne, mourir tout seul, âne, homme ou cochon, on meurt toujours tout Seul, disait Brel :

« On est deux à vieillir
Contre le temps qui cogne,
Mais lorsqu’on voit venir
En riant la charogne,
On se retrouve seul. »

Et j’ajoute, car cela s’impose absolument, dit Marco Valdo M.I., un poil de philosophie réaliste : mourir seul ou tous ensemble, hommes et bêtes, quelle importance ? Quel est le sens de la vie ?, demande le cochon. Mourir, dit l’homme. The meaning of life ! : « Always Look on the Bright Side of Life », c’est le seul conseil qu’on peut donner à chacun, le seul qui vaille pour tous les destins.

Certes, mais la cruauté est-elle bien raisonnable ?, dit Lucien l’âne. Tissons le linceul de ce vieux monde carnassier, carnivore, assassin, condamné à la mort et d’ailleurs, cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane






C’était dans une boîte hermétique,
Sur du béton, à l’usage de couche impropre,
Qu’elle a découvert l’éclairage électrique.
Elle était le porcelet numéro quatre,
Trois autres étaient tassés au-dessus d’elle.
Elle faillit étouffer dans une cohue pareille  !
Après deux semaines d’allaitement,
Quelqu’un est venu et a emmené sa maman,
Mais même après que le souvenir se soit défait,
Parfois, il lui arrivait
De se souvenir des mots de sa maman :
« La dignité du cochon est intangible  ! »


Sa prison est devenue son chez soi ;
Jour après jour, toujours au même endroit
Et toujours assise dans sa propre abjection.
Pour son nez fin, quelle puanteur  !
Elle était triste de cette horreur ;
Puis, il y a eu les injections.
Puis, on l’a forcée à la reproduction,
Elle n’a jamais accepté ça,
La porcitude n’est qu’élevage et engraissement
Et quand on a ouvert son testament,
Elle y disait comme sa maman le disait déjà :
« La dignité du cochon est intangible  ! »


Puis un jour, la bétaillère est arrivée,
Par la queue et l’oreille, on l’a attrapée
Avec ses compagnons de servitude,
Qui tremblaient et criaient de peur,
Transportée debout pendant des heures,
Beaucoup plus confinée que d’habitude.
La truie est intelligente, elle sent déjà
La situation tragique qui l’attend là.
Elle sait qu’elle va à son dernier reposoir.
Elle reconnaît l’abattoir,
Et elle s’y rend sans se battre.
« La dignité du cochon est intangible  ! »


Elle n’a jamais vu le ciel, ni sa lumière,
Jamais été gambader dans un pré vert,
Jamais été assise sur la paille fraîchement cueillie,
Jamais lavée dans la boue en plein air,
Jamais joyeusement accouplée, ni divertie.
Comment pourrais-je manger tant de misère ?
Le menu à la main, mon regard se morfond,
Je réfléchis à ce terrible destin
Et je pense soudain.
Je ne veux pas, pauvres cochons,
Être complice de vos douleurs.
Comme j’étais invité dans ce restaurant,
J’ai commandé à l’instant
Le chou-fleur cuit à la vapeur.
« La dignité du cochon est intangible  ! »