LA LUCIOLE ET L’ENFANT
Version française – LA LUCIOLE ET L’ENFANT – Marco Valdo M.I. – 2021
Chanson italienne – La lucciola e il bambino – Tiziano Mazzoni – 2017
LES LUCIOLES
Dialogue maïeutique
Le titre de la chanson est, Lucien l’âne mon ami, La luciole et l’enfant.
Oui, Marco Valdo M.I. mon ami, et alors ? Ça me fait de belles jambes. Cela dit, c’est un fort joli titre, mais je n’en sais toujours pas plus à propos de son contenu.
D’abord, Lucien l’âne mon ami, où as-tu été chercher cette idée saugrenue qu’une chanson a ou devrait avoir un contenu ?
Oh, dit Lucien l’âne, j’i dit ça comme ça, sans trop réfléchir, mais en effet, une chanson ne doit pas avoir de contenu, du moins si on se réfère à la production discographique. Il y a tant qui n’en ont pas. Boris Vian, qui s’y connaissait en chansons et en diffusion de disques, lequel Vian (professionnellement, directeur artistique de la maison de disques Philips) parlant du « tube » – mot qu’il avait inventé pour désigner un succès commercial énorme dans le domaine musical et de la chanson, dit : « Pourquoi un tube ? Un tube, parce que c’est creux. » Est-ce le cas de celle-ci ? Est-elle une chanson creuse, digne d’être un « tube » ?
Pas vraiment, répond Marco Valdo M.I., et ce serait même le contraire. En résumé, c’est l’histoire d’un enfant (fille ou garçon, peu importe, un enfant, quoi) qui se trouve dans un champ et voit arriver des chars, puis se dérouler une scène de guerre et cet enfant à la fin s’échappe de cet univers terrible grâce à l’intervention d’une luciole. Parenthèse, il faut entendre « luciole » au sens premier de petit insecte luminescent, car en italien « lucciola » a d’autres significations dont celle que laissent entrevoir ses presque synonymes que je me garderai bien de traduire en français, tous mots que je reprends d’une très sérieuse encyclopédie italienne : bagascia, baiadera, baldracca, battona, bella di notte, buona donna, cagna, cocotte, cortigiana, donnaccia, donna da marciapiede (o di malaffare o di strada o di vita o di facili costumi), donnina allegra, etera, falena, gigolette, lupa, malafemmina, marchettara, meretrice, mignotta, mondana, passeggiatrice, peripatetica, prostituta, putta, puttana, sgualdrina, squillo, taccheggiatrice, troia, vacca, zoccola.
Donc, une luciole lumineuse, dit Lucien l’âne. Je vois. Une chanson allégorique où les lucioles sont les consolantes fées des contes et n’existent que dans l’imaginaire.
Évidemment, reprend Marco Valdo M.I., la chanson se situe dans l’imaginaire, mais quand on est pris dans la guerre et qu’on est enfant, la fuite dans l’imaginaire est à peu près la seule solution pour sauver sa tête ou à tout le moins, ce qu’elle contient. Songe un instant aux chansons de Thérésine (cette Comptine par exemple) et aux poésies, aux rêves, aux chansons qu’ils ont laissés et je suis certain que si on cherchait, on trouverait d’autres chansons, poèmes, histoires où les enfants soumis à la guerre militaire, civile, psychologique, sociale, cherchent une sortie, un exutoire à la brutalité du monde.
À la brutalité du monde, répond Lucien l’âne, à la bêtise du monde, à la stupidité du monde, à la méchanceté du monde, à l’atrocité du monde et je pourrais encore y ajouter la grossièreté du monde, l’avidité du monde, l’insensibilité du monde, l’insondable ignorance du monde et mille autres raisons pour lesquelles nous tissons inlassablement le linceul de ce vieux monde absurde, massacreur, inconscient, violent, violeur et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Une luciole dans le champ
Se rapproche de moi
Pas à pas ;
Une luciole dans le champ
Pas à pas,
Me montre comment
Pas à pas,
M’en aller de là.
Une
étoile me regarde
Sous cette lune pleine
Comme une vieille amie.
Comme une vieille amie,
Dans la nuit sereine,
L’étoile vient me saluer.
Comme une vieille amie,
Elle vient me saluer.
J’ai
vu les murs s’effondrer
Et dans la poussière tomber,
Et de la poussière plus épaisse,
Des monstres d’acier apparaître
Avec leurs lourdes chenilles
Et tout écraser.
Avec mon cœur en vrille,
J’ai couru sans plus regarder.
La lassitude aussi passe,
Même la peur s’efface,
Quand je descends vers le bois,
Quand je descends vers le bois,
Même le passé passe là,
J’ai passé la clairière,
Je descends dans le bois ;
Dans le bois, je me perds.
Une luciole dans le champ
Dans les mains d’un enfant
Dans l’ombre d’une grotte
Dans l’ombre d’une grotte
Une luciole dans le champ
Dans les mains d’un enfant
Dans la grotte, dans l’ombre,
Reste immobile à attendre.
Grande
lune, fais-toi
sombre,
Entre le ciel et l’ombre,
Fais-toi pente, montagne,
Fais-toi pente, montagne ;
Grande nuit, fais-toi sombre,
Et cache tous tes sentiers ;
Fais-toi pente, montagne
Et personne ne pourra monter.
J’ai
vu les femmes
pleurer,
J’ai vu les vieux s’agenouiller
Et dans la poussière,
Un à un tomber face à terre.
D’autres soldats sont arrivés
Et tout a recommencé ;
Et avec mon cœur écartelé,
J’ai fui sans plus regarder.
Une luciole dans le champ
Se rapproche de moi
Pas à pas,
Une luciole dans le champ
Pas à pas,
Me montre comment
Pas à pas,
M’en aller de là.
Pas à pas,
M’en aller de là.