La
Visite impériale
Chanson
française – La Visite impériale – Marco Valdo M.I. – 2020
ARLEQUIN
AMOUREUX – 37
Opéra-récit
historique en multiples épisodes, tiré du roman de Jiří Šotola
« Kuře na Rožni » publié en langue allemande, sous le
titre « VAGANTEN, PUPPEN UND SOLDATEN » – Verlag C.J.
Bucher, Lucerne-Frankfurt – en 1972 et particulièrement de
l’édition française de « LES JAMBES C’EST FAIT POUR
CAVALER », traduction de Marcel Aymonin, publiée chez
Flammarion à Paris en 1979.
Dialogue
Maïeutique
Souviens-toi,
dit Marco Valdo M.I., après l’enterrement de Serenus et la longue
veille qui s’en était suivi, à laquelle Matthias s’était mêlé,
manière de profiter un peu du banquet et avait pour ce faire laissé
sur la place du village tout son petit théâtre. Une rébellion, une
petite révolution avait secoué la troupe abandonnée. Il s’y
était élevé des velléités d’indépendance ; certains
s’étaient même quasiment mis en route. Ce n’est que grâce à
l’intervention du Docteur Faust et de Polichinelle, la scission
avait été évitée. Au matin, tous s’étaient ravisés et sous la
houlette de Matthias, devenu entretemps Andrea Sereno, ils avaient
repris le chemin de la clandestinité.
De
ça, je me souviens, répond Lucien l’âne. Et maintenant, que
va-t-il se produire ? Il faut quand même que parfois, ils
s’arrêtent et qu’ils donnent un spectacle histoire d’avoir de
quoi vivre. Et puis, quel sens aurait une troupe de théâtre qui ne
jouerait jamais ? On finirait par s’apercevoir de la
supercherie.
En
effet, Lucien l’âne mon ami, même s’il est dit « pour
vivre heureux, vivons cachés ! », même les déserteurs
doivent se nourrir et ne peuvent rester en permanence cachés. Ils
doivent nécessairement être quelque part ; en l’occurrence,
cette fois, en Enfer. Enfin, dans la salle de l’Auberge « À
l’Enfer » et dans cet Enfer, la troupe se sent bien et elle
consentirait volontiers – moyennant juste compensation – à y
donner quelques représentations divertissantes de théâtre
miniature. Tout se présente sous les meilleurs auspices, mais au
samedi matin, tout ce petit monde est proprement mis à la porte et
poussé hors de la ville ; le tout, sans ménagement. Bref, on
dégage ! Cet impromptu est inattendu, tout à fait anormal :
il doit se passer quelque chose.
Oui,
dit Lucien l’âne, j’ai déjà connu ça ; ce sont des
choses qui arrivent. Généralement, on chasse les mendiants, les
gitans, les juifs, les étrangers, les sans-papiers, les damnés de
la terre. Souvent, ça ressemble à un grand nettoyage de printemps :
on balaye tout.
Tu
vois juste, Lucien l’âne mon ami, c’est une sorte de grand
nettoyage qu’organisent les autorités de Litomyšl,
cette petite ville de Bohême
d’où Matthias, à l’époque Luigi Sevastiano, avait déjà dû
fuir. C’était le récit que faisaient :
L’Aveu
théâtral :
où pour survivre, Arlequin (alias, alias…)
à l’instigation de la Comtesse se fait conseiller in teatro auprès
du Comte de Wallenstein.
Le
Bouffon de Franziska :
où Arlequin, conseiller in teatro est captif de la Comtesse qui le
traite sous le nom germanisé d’Harlekin.
Une
Statue ne porte pas de Caleçon :
où Arlequin, revenu sur scène, se retrouve le cul nu sur la scène
du théâtre
du Comte Wallenstein.
La
Pécheresse aux jolis Doigts :
où on découvre le portrait d’Arlecchina.
La
Confession d’Arlequin :
où on apprend comment
Arlequin, chassé par le Comte, se réfugie pour l’hiver chez les
pères et obtient cette grâce par un artifice de confession.
La
Mare aux Cochons : où l’Arlequin qui étouffe entre les
murs religieux, fait le mur et tombe dans la mare aux cochons.
Le
Retour du Printemps : où Matthias n’en pouvant plus se
décide à rentrer chez lui.
On
se croirait dans le jeu de l’oie, dit Lucien l’âne, voilà un
fameux retour à la case départ. Je me demande ce que va faire
Andrea Sereno, qui si je m’y retrouve, est le nouvel habit
d’Arlequin.
Après
avoir marché un temps, dit Marco Valdo M.I., Andrea Sereno avec sa
hotte sur le dos rejoint la propriété de campagne du Comte
Wallenstein, composée essentiellement d’un haras et d’une
bergerie dont Matthias connaît l’existence et le berger depuis le
temps où lui-même travaillait pour ce comte aux ambitions
théâtrales. Habituellement, c’est un lieu calme, idyllique,
bucolique où il ne passe pas grand monde. Matthias trouve refuge à
la bergerie et est même nourri par le berger, mais au matin du
dimanche, à l’heure de la grand-messe, arrive toute une cohorte de
berlines, suivie par un peloton de gendarmes à cheval. C’est pile
le jour de la visite impériale – précisément, celle de François
Ier Empereur d’Autriche, mais François II comme
Empereur du Saint Empire. C’est un événement qui ne s’est
jamais produit qu’une seule fois dans l’Histoire : ce
jour-là. Le reste et comment Arlequin rencontre l'Empereur, je te laisse le découvrir avec la chanson.
Je
m’en vais le faire à l’instant, Marco Valdo M.I. mon ami, et je
suis déjà inquiet de savoir où cette visite perturbante va
conduire le déserteur Matěj Kuře, présentement Andrea Sereno,
soldat méritoirement démobilisé. En attendant, tissons le linceul
de ce vieux monde impérial, bucolique, protocolaire, hasardeux et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Septembre
mouille le soir de ce jeudi
À
l’auberge de l’Enfer – un bel abri,
Où
Matthias passe la nuit incognito,
Nul
ne l’a reconnu en Andrea Sereno.
Vendredi,
à l’Enfer, Sereno et sa troupe
Donneraient
volontiers quelques scènes.
Raus !
Dehors !, avec une grossièreté obscène,
Sans
explication, on chasse tout le groupe.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Pour
lors, ils vont par les prés verts
Chercher
un gîte où se mettre à couvert :
À
l’écurie du comte, ils trouvent à souper ;
À
la bergerie, du fromage de brebis pour déjeuner.
Branle-bas
de combat ! Arrive en matinée
Un
convoi de sept berlines bien chargées :
Caesar
Franciscus Secundus et sa dame,
Des
comtes, des burgraves et des gendarmes.
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
L’Empereur
à Litomysl, le comte Wallenstein rayonne :
Gloire
au haras, gloire à la jumenterie !
L’escorte
cuit des saucisses et fait une beuverie
Où
Andrea s’empiffre et s’entonne.
Face
à l’Imperator, dans le petit pavillon,
Les
soldats poussent Matthias, le mouton trublion
Et
le pitre déclame :« Que son Altesse en sa clémence,
Souffre
que devant elle, en artiste, je m’avance ! »
Oui,
Monsieur Po, oui, Monsieur Li,
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.
Oui, Monsieur Chi,
Oui, Monsieur Nelle,
Oui, Monsieur Polichinelle.