mardi 12 décembre 2017

LE CHASSEUR

LE CHASSEUR


Version française – LE CHASSEUR – Marco Valdo M.I. – 2017
Chanson italienne – Il cacciatoreJoe Fallisi – 2005
Parole
s et musique de Joe Fallisi [Milan, sabato 24 settembre 2005]





« Chansons contre la guerre ». Ainsi s’appelle notre site. Eh bien, je ne sais pas si vous avez en tête que tous les ans, à la fin de l’été, dans notre pays comme dans des dizaines et dizaines d’autres, s’ouvre une guerre légalisée (le plus souvent définie « sport ») durant laquelle de véritables armées de types armés jusqu’aux dents envahissent les bois et les campagnes pour aller tirer sur des êtres vivants pacifiques et sans défense. Et c’est une guerre d’agression, véritable ; il n’est même pas rare que, comme dans toutes les guerres, les envahisseurs se tirent dessus « par erreur » ; souvent, les victimes sont des beaux-frères. On ne sait jamais comment, mais les titres du type « un chasseur tue son beau-frère par erreur, il l’avait pris pour un sanglier » sont à l’ordre du jour. Ach je sais, ces guerriers du dimanche, avec leurs fusils de précision… Cette chanson de Joe Fallisi trouve donc ici sa place plus que méritée. [RV]

Dialogue maïeutique

Mon ami Lucien l’âne, je peux facilement imaginer que tu ne sois pas un ardent partisan de la chasse.

Évidemment, Marco Valdo M.I. mon ami ; du moins, de cette sorte de chasse où un animal bipède armé d’un fusil s’en prend à un lapin sans arme. C’est cruel, c’est stupide, c’est ridicule et c’est bêtement assassin. Bien sûr mon point de vue est largement dicté par le fait que je suis moi-même un âne, même si pour ce qui me concerne c’est en apparence ; mais en l’occurrence, c’est l’apparence qui compte. Un âne et donc, un animal non humain et de ce fait, il me paraît assez odieux de se livrer à pareille occupation pour le loisir et plus encore, pour le sport. Pour le sport ? Ce serait un sport, si le jeu se déroulait à armes égales. Que peut-il se passer dans la tête d’un individu qui trouve son plaisir et sa glorification dans le massacre d’êtres vivants ? Passe encore, s’il s’agissait de chasser sportivement des humains armés comme lui ou qu’ils s’organisent des parties de chasse entre chasseurs, au cours desquelles ils seraient à la fois, le gibier et les chasseurs ; ce serait un jeu entre adultes consentants.

Ah, enchaîne Marco Valdo M.I., si les lapins avaient des fusils, je me demande s’il y aurait autant de chasseurs. Que peut-il bien se passer dans leur tête ? Faut-il y voir je ne sais quel résidu d’infantilisme ? C’est précisément la question que se pose tout être sensé. Que l’on chasse, que l’on tue d’autres êtres vivants est un comportement fréquent dans la nature. D’ailleurs comment et de quoi se nourriraient une grande partie des êtres vivants ?
Cependant, quand je vois parfois le chat ou l’enfant tuer un insecte comme par jeu ou par expérimentation. La question que je me pose alors est de savoir s’il a conscience de ce qu’il fait. Personnellement, je n’aimerais pas trop être l’insecte et de façon générale, je n’aimerais pas être le gibier.
Ce qui est vraiment en cause, c’est ce comportement de tueur « gratuit ». On est en droit d’attendre de l’homme un comportement plus en conformité avec une certaine conscience du droit à la vie des êtres déjà vivants et actifs.
Il faut reconnaître et admettre que des êtres vivants mangent d’autres êtres vivants et que la liste de ces carnivores est incommensurable ; elle commence aux unicellulaires. Certes, l’homme chasse ou pêche pour se nourrir et dans de tels usages, il ne voit pas malice. On ne peut le nier. Mais là encore une fois, il y a la limite de l’humanité.

Il n’y voit pas malice, intervient Lucien l’âne ; moi non plus, du temps où j’avais encore mon apparence d’être humain, je n’y voyais pas malice à manger du cochon, de la vache, du cheval, du faisan, de la poule ou du poisson, mais depuis que j’ai été métamorphosé en âne, je vois les choses différemment. Je t’assure, Marco Valdo M.I. mon ami, que je n’aimerais pas du tout finir prématurément en boudin ou en saucisson.

Moi non plus, dit Marco Valdo M.I. ; à la réflexion cependant, ce n’est pas de finir en côtelette ou en ragoût qui m’effraie, car une fois mort, peu m’importe par qui et comment je serai mangé. Il est indifférent d’être transformé par des vers, des poissons, des bactéries ou par le feu ; ce qui est gênant, c’est de passer prématurément de l’état d’être vivant conscient à celui de cadavre.

De fait, c’est fort dérangeant, reprend Lucien l’âne. Par ailleurs, j’ai cru entendre qu’il y aurait une « limite d’humanité », qui permettrait ou même, c’est à espérer, imposerait de réduire ces pratiques assassines. De quoi pourrait-il s’agir ?

Ce à quoi je pense, Lucien l’âne mon ami, est que – jusqu’à preuve du contraire – l’humanité disposerait d’une sorte de guide intérieur, d’une étrange boussole, qu’on appelle généralement la conscience et qui s’est créée et s’est développée au fil de l’évolution et devrait l’être encore.

Effectivement, dit Lucien l’âne.

Donc, Dit Marco Valdo M.I., cette conscience devrait, dans le cas qui nous occupe : la chasse, devrait indiquer ce qui acceptable et ce qui ne l’est pas. Ainsi, tuer un animal enragé qui vous attaque relève de l’autodéfense et dès lors, est un acte acceptable ; ce serait pareil si c’était un animal humain. Par contre, organiser un massacre volontaire d’êtres vivants, humains compris, sans autre raison que le sport, le loisir, le plaisir ou la haine est proprement intolérable. Elle est là entre les deux, la « limite d’humanité ».

Par parenthèse, remarque l’âne Lucien, je note que la chasse ou le massacre entre humains se pratique encore dans certains lieux, dans certaines circonstances et à grande échelle.

Et même là, Lucien l’âne, il y aurait nécessité à faire jouer la « limite d’humanité ». En fait, hors ces massacres d’un genre organisé et assez particulier, disons dans les circonstances courantes de la vie quotidienne de nos régions, cette limite d’humanité est un peu plus imperméable. Par exemple, si on admet l’idée de tuer pour manger, on admet également une restriction en ce qui concerne les humains eux-mêmes. Il est assez mal vu de tuer des humains pour les manger et même, de simplement l’envisager. Il est rassurant de constater que cette restriction s’étend de plus en plus aux animaux, à commencer par les animaux de compagnie et les espèces biologiquement proches.

Oh, dit Lucien l'âne, il ne nous reste plus qu’à espérer que l’humanité va continuer à progresser en ce sens et à affiner cette perception d’une « limite d’humanité » ; il lui faudra renforcer et étendre son usage autant qu’il est possible. Quant à nous, il nous faut reprendre notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde assassin, chasseur, imbécile, sportif et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.


Je suis sportif,
Je tue d’un cœur festif.
Je tire sur le lapin
Comme sur mon gamin.

J’extermine les phoques,
J’anéantis le tarin,
Ah ! quelle époque !
Je trinque avec le vin.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.


Ah quel orgueil, ah quel plaisir,
Fusiller cette perdrix !
J’exulte, je délire,
Je faisande et je pourris.

Notre espèce seule
Et aucune autre
N’a le droit
D’accomplir de tels dégâts.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.


Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien, fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Oh quelle joie, quel régal !
Buter un animal.
Ma folie s’envole
Lorsque je tue en vol.

Je n’aurais pas ce canon,
Je serais un bipède impuissant,
Mais je flingue à profusion,
Les animaux innocents.


CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.


Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Avec grand courage j’affronte
Et je combats l’éléphant ;
À plus de cent mètres, je tire
Et je le foudroie à l’instant.

Gazelles et lions,
Léopards et vous aussi, chimpanzés,
Sous ma protection,
Vous êtes placés.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.


CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Ils me disent exterminateur,
Ne croyez pas leurs accusations,
Ce sont des exagérations.
Je suis un écologiste, de tout mon cœur.

J’aime, je vénère, je protège toute
La faune, la flore, la nature ;
Seuls les lâches redoutent
Le fusil que je possède.

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.


Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.


CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Avec nos fusils et nos flèches,
Nos mille ruses et nos pièges,
Nous dictons notre loi
Et les bêtes sont sans voix.

Pour chasser, nous voulons
Des saisons, des réserves, des terrains
Plus vastes. Protester ne sert à rien,
Notre hymne en chœur, nous entonnons :

CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.

Ouvre la porte, aurore,
Je vais chasser encore.
Ah quel délice, le sang !
J’aime le gibier saignant.


Viens chien fidèle esclave,
Suis ton maître, sois brave,
Le sanglier massacré
Sera doux à manger.



CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.
CHASSEUR, CHASSEUR,
TU PASSES ET LA VIE TRÉPASSE.