mercredi 13 juin 2018

MAÎTRE HIERONYMUS VAN AKEN DE BOIS-LE-DUC, DIT JÉRÔME BOSCH


MAÎTRE HIERONYMUS VAN AKEN DE BOIS-LE-DUC, 
DIT JÉRÔME BOSCH

Version françaiseMAÎTRE HIERONYMUS VAN AKEN DE BOIS-LE-DUC, DIT JÉRÔME BOSCH – Marco Valdo M.I. – 2018
d’après la version italienneMAESTRO HIERONYMUS VAN AKEN DA HERTOGENBOSCH DETTO BOSCH – Krzysiek Wrona – 2014
d’une chanson polonaise – Mistrz Hieronimus van Aeken z Hertogenbosch zwany Boschem – 1977
Texte et musique : Jacek Kaczmarski
D
e son album « Carmagnole 1981 »
Te
xte : http://www.kaczmarski.art.pl/index.php


Et là, d’une certaine manière – mon frère
Comme un Christ étendu sur la harpe





Dialogue maïeutique

Ah, Lucien l’âne mon ami, la traduction ! On ne peut savoir tant qu’on n’en a pas fait un certain nombre, une certaine quantité, un certain volume, enfin, je ne sais en quelle unité l’exprimer. Mais bref, on ne peut savoir quels tourments elle éveille.

Oui, certes, évidemment, je compatis, dit Lucien l’âne rigolard, mais encore ?

Eh bien, reprend Marco Valdo M.I., je viens de terminer à l’instant la version française de cette chanson polonaise qui évoque, Jérôme Bosch. Je fais cette version française au travers d’une version italienne, écrite par un Polonais. Comme je l’ai souvent exposé, il n’y a pas à tortiller, je dois lui faire confiance, car pour ce qui est du polonais, en toute franchise, je ne le connais pas et ce n’est pas maintenant que je vais l’apprendre.

Oh, dit Lucien l’âne en riant, pourquoi pas ? J’ai entendu dire que d’autres le font.

Bien sûr et c’est très bien ainsi, réplique Marco Valdo M.I., mais alors, il faudrait passer son temps à apprendre les langues de toutes les chansons et aux dernières nouvelles, dans les Chansons contre la Guerre, il y en a dans près de 150 langues. À raison d’une année seulement pour pouvoir maîtriser un peu la langue nouvelle, les traductions risquent d’attendre.

Soit, dit Lucien l’âne, on ne peut attendre un siècle et demi. Mais revenons à cette excellente chanson et à ce qu’elle raconte.

Comme l’indique le titre, dit Marco Valdo M.I., c’est une chanson qui évoque Jérôme Bosch et j’en ai fait une version française « à ma mode ». Dès lors, elle doit comporter quelques écarts par rapport au texte d’origine, mais je ne saurais te dire lesquels. Cependant, connaissant « de visu » l’œuvre de Bosch et vivant, comment dire, à l’intérieur d’une familiarité culturelle, d’un certain plissement mental commun, comme qui dirait mosan, je suis assez ravi du résultat que je trouve suffisamment grotesque et aussi, évocateur de ce temps des massacres et des bousculades iconoclastes où vécurent Jerôme Bosch et un peu plus tard, Till. L’un comme l’autre s’inscrivent en dissidents, en résistants, dans ce monde malmené par les guerres et les répressions qui ont pour cause les religions. L’un comme l’autre sont confrontés directement aux malheurs.

Et la chanson raconte ça ?, demande Lucien l’âne.

D’une certaine manière, oui, répond Marco Valdo M.I. et même assez directement quand elle dit :
« Que chacun amadoue ces diables aux groins grotesques de cadavres !
Que les bienheureux dorment dans leurs bulles d’arc-en-ciel tranquilles,
Avant que les crament les flammes des moulins, des châteaux et des villages ! »

Cependant, il ne faut pas perdre de vue qu’elle évoque aussi le rapport individuel du peintre Jérôme Bosch au monde et sa peinture, qui sous couvert de paraboles religieuses – il lui fallait bien en passer par là, est une dénonciation de ce vieux monde dans lequel il était tombé à la naissance.

Comme nous tous, dit Lucien l’âne. Alors, comme lui, tissons le linceul de ce vieux monde grotesque, caricatural, délirant, déréglé et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Et je monte une truie ! Et cent diables me poursuivent !
Vous, occupés de même, tourn
ez-vous pour voir !
Ici,
la bière du broc, tenue par une main simiesque, au-dessus ma trogne
Coule de mon menton et de ma gorge engorgée sur ma poitrine poilue !
Ici, la
rouchie aux cheveux rouges a un crapaud sur la vulve,
Sur les lacets de
mes bragues grimpe lentement sa main lascive ;
Sous le chaudron de ma pan
se, elle attise la flamme sauvage ;
Alors, je ricane
bruyamment et de mon escarcelle, je lui sors son !


Et là, d’une certaine manière – mon frère
Comme un Christ étendu sur la harpe
Et ce serait parfait, s’il le méritait !
Qui sait qu’il n’est pas toujours facile d’être un saint !

Et je monte une truie ! Et je m’agrippe à sa soie !
Mais qui s’en soucie que les oripeaux des corps sont accrochés sous la poutre ?
Je dois être peu sage pour émettre des bulles par la bouche
Et parler de parfums d’Arabie, quand tout autour fleurent les fèces !
J’ai ferré la coche d’or et j’imprime ses traces dans le fumier !
Que chacun amadoue ces diables aux groins grotesques de cadavres !
Que les bienheureux dorment dans leurs bulles d’arc-en-ciel tranquilles,
Avant que les crament les flammes des moulins, des châteaux et des villages !
Et là, d’une certaine manière – mon frère
Comme un Christ étendu sur la harpe
Et ce serait parfait, s’il le méritait !
Qui sait qu’il n’est pas toujours facile d’être un saint !

Et je monte une truie ! Je traverse le fleuve noir et brûlant,
Mais l’eau bouillante du feu n’éteint pas ses fougueux hurlements !
Alors, la joie nous suffira ! La fin est proche.
Ses liens pileux chatouillent, atroces !
Aucune pensée n’honore vos visages véreux,
Le monde est couvert d’yeux reflétant Couteau, Argent, Baise !
Alors regardez comme dans le ciel rampent les bruches luisantes,
Comme naît par nuées leur espèce d’insectes nocturnes !
Et là, d’une certaine manière – mon frère
Comme un Christ étendu sur la harpe
Et ce serait parfait, s’il le méritait !
Qui sait qu’il n’est pas toujours facile d’être un saint !

Et je monte une truie ! J’évite tous les obstacles !
Regardez, si à part vous-mêmes, vous voyez autre chose !
Profitez-en tant que, je prodigue les autographes gratis !
Je dépense et je répands le sang du doigt, car je peux me le permettre !
Je suis Moi, le Roi de la Vie !