PÉNÉLOPE
Version française – PÉNÉLOPE – Marco Valdo M.I. – 2020
Chanson italienne – Penelope – Fiorella Mannoia – 2019
Texte et musique : Ivano Fossati
ATTENTE Max Liebermann - 1890 |
Dialogue Maïeutique
Pénélope, Pénélope ?, voilà un titre que j’ai déjà rencontré, dit Marco Valdo M.I. un peu songeur.
Pénélope, dit Lucien l’âne, voilà un nom que je connais depuis fort longtemps. On en parlait déjà dans la plus haute Antiquité et je me demande même si ce n’est pas cette même Pénélope – oui, tout compte fait, j’en suis sûr, elle s’appelait Pénélope – que je véhiculais le soir à la plage d’Ithaque jusqu’à avoir mes pieds dans l’eau. La journée, je l’aidais aux champs. Elle disait que son mari était parti faire un cheval de bois à Troie et qu’il reviendrait bientôt par la mer, forcément par la mer, vu qu’Ithaque est une île. Je me suis dit alors, par-devers moi, que c’était vraiment une drôle d’idée de laisser sa femme au bord de la mer pour aller faire un cheval de bois à Troie. C’est un peu comme La complainte du phoque en Alaska, qui disait :
« Ça ne vaut pas la peine
De laisser ceux qu’on aime
Pour aller faire tourner
Des ballons sur son nez »
D’accord, c’est un cheval de bois, mais il est devenu célèbre ; quoique ce soit un cheval quand même et comme on sait, les chevaux de bois, ça tourne, ça tourne. Et puis, le gars, enfin, le mari de Pénélope avait promis qu’il rentrerait vite, sitôt le cheval fini, mais c’est toujours la même histoire, il avait traîné en route et il lui a servi au retour de ces fols racontars invraisemblables avec des géants, des sirènes, des tempêtes, des volcans en éruption, des cyclopes et que sais-je encore. Un fameux baratineur, car en finale, elle l’a cru ou alors, elle s’est ravisée et elle s’est dit qu’il valait mieux faire semblant de le croire et que ça n’aurait servi à rien de l’avoir attendu si longtemps et d’avoir tissé, tissé, tissé telle une araignée obstinée et patiente une toile monumentale pour se disputer avec lui et le renvoyer à son cheval de bois et ses sirènes. En somme, comme je lui avais personnellement conseillé, elle a fait semblant d’avaler tous ces bobards et d’admirer son héros. Comme beaucoup d’entre elles, c’était une femme intelligente.
Oui, certes, Lucien l’âne mon ami, Pénélope est une femme intelligente et nombre de femmes ont cette intelligence qui leur permet de supporter les hommes et cette odyssée a fait pas mal de chemin depuis et puis, ce n’est pas vraiment le sujet de la chanson, sauf indirectement. La femme qui chante ici fait bien sûr allusion à la virée du marin mari :
« Je n’imaginais pas, c’est tout,
Qu’une barque, que de simples avirons
L’emmèneraient,
Me le prendraient. »
et à la difficulté à le faire rentrer à la maison :
« Je chante pour continuer à espérer
Qu’il puisse ainsi me voir
Et penser à rentrer,
Et penser à rentrer. »
Cela dit, Marco Valdo M.I. mon ami, il me semble qu’au début, tu évoquais une chanson qui porte le même titre en français ; à quoi pensais-tu ?
Eh bien, Lucien l’âne mon ami, à celle – cette Pénélope – qu’avait composée Georges Brassens, qu’il avait interprétée lui-même et qui fut ensuite si fémininement interprétée par Barbara. C’est dire si c’est une chanson qu’il faut entendre et d’ailleurs, je suis certain qu’elle a toute sa place ici auprès de celle-ci, dont je me suis amusé à faire la version française. Je m’empresserai donc d’insérer cette chanson de Brassens, quand j’aurai un peu de temps, car cette Pénélope est emblématique et est un personnage au centre de la manière de considérer la femme dans notre société. Ailleurs dans le monde, je ne sais pas vraiment ; qu’en serait-il de Pénélope dans les pays sous influence musulmane ou par exemple, en Afrique, où circule ce proverbe très patriarcal qui dit : « La place de la femme est à la cuisine ».
Oufti, dit Lucien l’âne, voilà qui est rétrograde. Pour une telle réflexion, même l’ânesse la plus soumise foutrait au bonhomme un fameux coup de pied et je préfère ne pas préciser l’endroit comme disait Georges Brassens – encore lui – à propos de l’enterrement de son Grand-Père.
« Ma botte partit, mais je me refuse
De dire vers quel endroit,
Ça rendrait les dames confuses
Et je n’en ai pas le droit. »
Cela dit, reprenons notre tâche et tissons, tels des Pénélopes imperturbables, le linceul de ce vieux monde sexiste, patriarcal, benêt, menteur, borné et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Je ne suis pas une artiste,
Mais une femme optimiste.
Il ne me plaît pas d’implorer,
Je n’aime pas m’incliner,
Mais j’ai une grâce à demander,
J’ai une grâce à demander.
Je ne le savais pas du tout,
Que l’amour était aussi un poison.
Je n’imaginais pas, c’est tout,
Qu’une barque, que de simples avirons
L’emmèneraient,
Me le prendraient.
Je sais guérir les roses,
Je sais arranger les choses
Et j’attends le crépuscule les paupières closes
Face à la mer, à ses ondes
Et face au monde.
J’allume des lumières et le soir,
Je chante pour continuer à espérer
Qu’il puisse ainsi me voir
Et penser à rentrer,
Et penser à rentrer.
Oui, c’est curieux
Ce bandeau sur mes yeux.
Mais je respire mieux,
Quand une bouche l’embrasse,
Mais rien ne se passe.
Personne ne m’approche,
Personne ne me touche.
Je ne me sens pas en sécurité
Dans la nuit aux moments étouffants
Mais à la vérité,
C’est juste le vent qu’on entend
Et des mots vite oubliés.
Ici, on vit la vie ordinaire
Où tous ont un rêve.
Et quand quelqu’un partage votre rêve,
Alors tout s’apaise et se perd,
Alors tout s’apaise et se perd.
Je ne suis pas une artiste,
Mais une femme optimiste.
Je n’aime pas implorer,
Je n’aime pas m’incliner,
Mais j’ai une grâce à demander.
J’ai quelqu’un à faire rentrer,
J’ai quelqu’un à faire rentrer.