L’Île
Saint Louis
Chanson française – L’Île Saint Louis – Léo Ferré – 1948
Texte
et Musique : Francis
Claude – Léo
Ferré (1948)
Biographie
du coauteur
: Francis Claude https://fr.wikipedia.org/wiki/Francis_Claude
Interprétations :
Léo
Ferré : https://www.youtube.com/watch?v=c9yNn3a1kXk
Léo
Ferré : https://www.youtube.com/watch?v=AfBie4MRNws
Catherine
Sauvage : https://www.youtube.com/watch?v=fTGDBBYrSb0
Si l’on a trop de vague à l’âme, Mourir un peu n’est pas partir. Quand on est île à Notre-Dame, On prend le temps de réfléchir. |
Voici
une chanson éminemment poétique, dont on pourrait se demander ce
qu'elle vient faire dans les Chansons contre la Guerre. On pourrait
faire valoir que c'est une chanson d'émigration et d'une émigration
ratée, puisqu'en finale, elle revient à son point de départ. Mais
le principal argument n'est pas celui-là.
Quel
est -il dès lors, dit Lucien l'âne un peu interloqué ?
Mais,
ajoute Marco Valdo M.I., tout simplement celui qui veut que les
meilleures chansons contre la guerre sont des chansons qui n'en
parlent pas, ce sont des chansons de paix. Cependant, pour revenir à
l'argument premier, c'est curieux, mais il me semble que le destin de
pas mal des émigrés, réfugiés, personnes déplacées, fuyards
contemporains est ou sera précisément celui-là de fuir un endroit
avec dans la tête une « île au trésor » qui s'est
noyée depuis longtemps… C'est un destin tout à fait tragique…
Heureux encore quand on peut rentrer dans son pays de départ. Il
reste la leçon de la chanson qui dit : le large ne vaut pas le
port…
Je
sais. Rien n'est plus épouvantable. Fuir, mais où ? Camus
avait raison. Globalement, ce monde est absurde, plongé qu'il est
irrémédiablement dans sa Guerre de Cent Mille Ans que les riches et
les puissants font aux pauvres et aux plus faibles pour asseoir leur
domination, étendre leur pouvoir, renforcer leur exploitation et
accroître leurs richesses. Et face à ça, seul l'être vivant (qui
ne peut quand même pas attendre la fin de cette guerre absurde) en
vivant sa vie, sa simple vie quotidienne de grain de sable sur une
plage, parvient à lui donner un sens obstiné. Mais trêve de
philosophie, écoutons la chanson et reprenant noter tâche, tissons
le linceul de ce vieux monde absurde, suicidaire, dément et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
L’île Saint Louis en ayant marre
D’être à côté de la Cité,
Un jour a rompu ses amarres
Elle avait soif de liberté.
Avec ses joies, avec ses peines
Qui s’en allaient au fil de l’eau,
On la vit descendre la Seine.
Elle se prenait pour un bateau.
Quand on est une île,
On reste tranquille
Au cœur de la ville,
C’est ce que l'on dit
Mais un jour arrive,
On quitte la rive,
En douce, on s’esquive
Pour voir du pays.
De la Mer Noire à la Mer Rouge,
Des îles blanches aux îles d’or,
Vers l’horizon où rien ne bouge,
Point n’a trouvé l’île au trésor.
Mais tout au bout de son voyage,
Dans un endroit peu fréquenté,
On lui raconta le naufrage :
L’île au trésor s’était noyée.
Quand on est une île,
On vogue tranquille
Trop loin de la ville
Malgré ce qu’on dit,
Mais un jour arrive
Où, l’âme en dérive,
On songe à la rive
Du bon vieux Paris.
L’île Saint Louis a de la peine.
Du pôle Sud au pôle Nord,
L’océan ne vaut pas la Seine,
Le large ne vaut pas le port.
Si l’on a trop de vague à l’âme,
Mourir un peu n’est pas partir.
Quand on est île à Notre-Dame,
On prend le temps de réfléchir.
Quand on est une île,
On reste tranquille
Au cœur de la ville,
Moi je vous le dis.
Pour les îles sages,
Point de grands voyages,
Les livres d’images
Se font à Paris.