It’s
a long way to the Holy Sepulchre
ou
La
Croisade
du Prince
de Palerme
Chanson
française – Marco Valdo M.I. – 2017
Dis-moi,
Marco Valdo M.I. mon ami, où l’as-tu dénichée, cette histoire de
la dernière croisade et que raconte-t-elle vraiment ?
Eh
bien, Lucien l’âne mon ami, tu me croiras ou tu ne me croiras pas,
cette petite chanson raconte effectivement la dernière croisade en
date, celle que le Prince Monroy de Pandolfina, citoyen de Palerme en
Sicile, a faite, il n’y a pas si longtemps. C’est du moins ce que
raconte un livre d’histoires méditerranéennes, qui sont un peu
comme nos histoires d’Allemagne. Ce livre, dont je te recommande la
lecture, est dû à la plume alerte de François Beaune, un écrivain
français, qui a créé une
association qui rassemble ces histoires
[http://histoiresvraies.org/]
comme
les Chansons contre la Guerre rassemblent des chansons. En
particulier, l’histoire de la libération du Saint Sépulcre, celle
qui nous occupe, est rapportée par l’écrivain sicilien Roberto
Alajmo. Voilà pour l’origine. Quant à l’anecdote, elle est dite
dans la chanson et je te laisse la découvrir. Cependant, j’attire
ton attention sur ce refrain en langue anglaise et sur la vraie
raison de cette croisade du Prince Monroy : « For
the sweetest girl I know »,
alias Rediviva. Une
belle et admirable raison
de se lancer dans pareille croisade. Crois-moi, mon ami très cher,
une aventure aussi folle est une grande preuve d’amour et
d’intelligence. Rediviva ne s’y trompa pas qui soutint les
croisés de ses meilleurs plats.
Ah,
Marco Valdo
M.I. mon ami, ce
refrain en anglais, j’allais justement t’en parler ;
d’abord, car il est surprenant que tu fasses usage de cette langue
et en suite, car il me rappelle furieusement une chanson que les
régiments irlandais chantaient lors de la Grande Guerre en allant
mourir au pas cadencé dans les tranchées de l’Artois.
J’ajouterais, te connaissant, qu’il doit y avoir derrière ça,
Irlande pour Irlande, je ne sais quelle réminiscence des aventures
de Sally Mara et du cri de guerre révolutionnaire : Finnegans
wake !
Et tu
ne te trompes pas, Lucien l’âne mon ami, c’est bien cette
chanson qui a toujours son succès aujourd’hui, du moins chez les
Irlandais, qui sont gens de tradition. Elle devrait même figurer
dans les Chansons contre la Guerre, étant une chanson dans la
guerre. Je reprends ici le refrain exact pour aider à la comparaison
avec celui de la croisade du Prince.
- « It's a long way to Tipperary,
- It's a long way to go.
- It's a long way to little Mary
- To the sweetest girl I know! »
Il
me semble, Marco Valdo M.I. mon ami, qu’il y a derrière cette
chanson en apparence anodine, toute une littérature ou même
plusieurs. D’abord, que viennent faire là Toby et Trim ?
Certes, je les connais. Qui ne les connaît pas ? Et puis, je
subodore d’autres joyeuses références.
Évidemment,
Lucien l’âne mon ami, il y a là tout un monde complexe. En
premier lieu, il faut citer les histoires de croisade qui figurent
parmi les plus hauts faits de la chrétienté (on n’avait jamais
tué tant de monde que lors de la Première
Croisade [[9491]],
à commencer par les Juifs qu’elle
rencontrait sur son chemin) et
les chansons qui s’y rapportent.
Ensuite,
tu remarqueras la parenté du prince avec le Don Quichotte de
Cervantès et son trio infernal : Don Quichotte, Sancho et
Dulcinée, tout comme celle qui existe avec l’oncle Toby et le
Caporal Trim, lesquels également ne sont pas sans rapport avec Don
Juan et son Leporello. Je n’en dirai pas plus tant il y aurait à
en dire.
De
fait, de fait, dit Lucien l’âne extatique. Tout
comme, il faudrait la rapprocher de la chanson italienne du Preux
Anselme[[10431]] et celle de Charles
Martel, vainqueur de la bataille de Poitiers[[1095]]. Pour
conclure, car il me faut conclure comme c’est habituellement
mon rôle, je noterai quand même l’allusion à peine voilée à la
Palestine
et aux croisades en sens divers qui y ont des accointances. Je
noterai aussi le message de paix et d’intelligence que constitue
cette libération du Saint-Sépulcre sans occasionner la moindre
pagaille et sans tous ces
bains de sang que se mitonnent jalousement au nom de leur croyance
tous ces croyants. Ce
qui me plaît également, c’est cette vague déferlante d’ironie
qui ridiculise les papes, les croisades et tous les saints prétextes
à de sacrés massacres. La peste soit des croyances et des
croyants ! Mais reprenons notre
tâche, car elle n’est certainement pas finie et tissons, tissons,
Marco Valdo M.I. mon ami, à notre rythme, sans forcer, le linceul de
ce vieux monde peuplé de croyants, de crédules, de croisés, de
croiseurs, de croisades, de croix, de saints, de prophètes absurdes
et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Passent
les nuits, sonnent les heures
Le
Prince Monroy de Pandolfina
Fait
un vœu contre le malheur
Qui
menace de mort sa Dulcinée, Rediviva.
Si
Rediviva, sa bonne épouse, guérit,
Il
promet d’aller délivrer
Le
tombeau sacré
Des
mains de ses ennemis.
« It's
a long way to the Holy Sepulchre,
It's
a long way to go.
It's
a long way to the Holy Sepulchre
For
the sweetest girl I know ! »
Elle
guérit ! À la croisade !
À
la croisade, il faut aller !
Jusqu’à
Jérusalem, fameuse balade ;
Jusqu’au
tombeau, il faut marcher !
Le
Prince en appelle au Pape, à la chrétienté ;
Le
temps des croisades est passé.
La
chrétienté s’en fout
Et
le Pape demande : qui est ce fou ?
« It's
a long way to the Holy Sepulchre,
It's
a long way to go.
It's
a long way to the Holy Sepulchre
For
the sweetest girl I know ! »
Le
Prince se souvint soudain
Du
caporal Trim et de l’oncle Toby
Refaisant
dans leur jardin
Le
siège de Namur près de Tipperary.
Il
décide de faire sa propre croisade
Et
de s’en aller libérer symboliquement
Le
Saint-Sépulcre, quelle balade !
Sans
quitter Palerme, évidemment !
« It's
a long way to the Holy Sepulchre,
It's
a long way to go.
It's
a long way to the Holy Sepulchre
For
the sweetest girl I know ! »
Comme
Trim et Toby, il marche
Avec
Felicetto, tout autour de la villa,
Sans
rentrer manger, ils marchent.
Rediviva,
sur leur chemin, dépose les plats.
Comptés
et additionnés
Et
mètre par mètre, sont,
Jour après jour, les kilomètres sont
Sur
la carte de la croisade, reportés.
« It's
a long way to the Holy Sepulchre,
It's
a long way to go.
It's
a long way to the Holy Sepulchre
For
the sweetest girl I know ! ».
Felicetto,
voici Messine !
Rediviva,
voici Naples !
Hourra,
voici Malte !
Et
enfin, la Palestine !
Felicetto,
quelle bataille !
Le
Saint-Sépulcre, nous avons libéré,
Sans
la moindre pagaille.
Felicetto,
Rediviva, on va y rester.
« It's
a long way to the Holy Sepulchre,
It's
a long way to go.
It's
a long way to the Holy Sepulchre
For
the sweetest girl I know ! »