samedi 28 mars 2020

ODE À CORONA



ODE À CORONA


Version française – ODE À CORONA – Marco Valdo M. I. – 2020
Chanson italienneLo avrai, camerata CoronavirusAnonimo Toscano del XXI secolo27-03-2020







Il s’agit d’une adaptation de la célèbre épigramme de Piero Calamandrei. Peut-être a-t-elle été aussi écrite avec mes pas sur la petite place qui lui est dédiée au centre de Florence. Elle est plus longue que l’originale, et peut-être aurait-elle dû être encore plus longue. Il y a beaucoup plus de pierres pour ériger le monument au camarade Corona que celles énumérées ici. [AT-XXI]


Dialogue Maïeutique

« Est-il en notre temps
Rien de plus odieux,
De plus désespérant
Que de ne pas croire en Dieu ? »,

se demandait Tonton Georges « le mécréant », dit Marco Valdo M.I.
En effet, dit Lucien l’âne en rigolant. Dieu est très utile, on voit très bien ça en ce moment où les prières et les patients montent au ciel et où rien ne redescend.

Toi aussi, tu es un mécréant, mon ami Lucien l’âne. Donc, comme j’ai dit, Georges Brassens était un mécréant, car même mort, même dans la fosse commune du temps, comme il chantait dans Le Testament, il continue à seriner aux oreilles des vivants et des ânes, qui les ont longues. Et si j’ai évoqué cette question de la croyance, c’est qu’il y a à présent une réponse.

Laquelle ?, demande Lucien l’âne un peu interloqué.

C’est qu’il ne faut pas croire, répond Marco Valdo M.I., il faut penser. Je veux dire qu’il ne faut pas croire en Corona, ni en sa dangerosité, ni à sa perversion. Corona, contrairement à Dieu, n’est pas un ectoplasme, c’est un être réel, un peu spécial, mais réel et ce qu’il fait ou défait ou détruit est tout aussi réel et constatable, ô combien et au travers de tout cela, on peut constater la réalité de son existence et les effets de ses actions et de ses actes sur la vie humaine. Corona, le Camarade Corona, comme l’appelle ma version française, de cette chanson de l’Athée du XXIe Siècle, intitulée « Lo avrai, camerata Coronavirus », qui est elle-même une parodie de la lapidaire de Piero Calamandrei : « Lo avrai camerata Kesselring », dont j’avais fait il y a presque 15 ans, la version française sous le titre d’« ODE À KESSELRING ». C’est d’ailleurs pourquoi celle-ci s’intitule « ODE À CORONA ».

Hou là, Marco Valdo M.I. mon ami, nous voilà ramenés près de 15 ans en arrière et le titre est même élucidé avant que je le demande. Alors, ce qui m’intéresse à présent, c’est ce que dit la chanson.

D’abord, tu l’auras sans doute compris, Lucien l’âne mon ami, ce Camarade Corona n’est autre que le virus qui occupe à présent à peu près toutes les conversations et qui fait l’objet de bien des hantises, des fantasmes et des obsessions. Je précise tout de suite que ce n’est pas sans raison au vu des dégâts qu’il commet à son propre insu, car, vois-tu, la chose est paradoxale, il répand la mort sans intention de la donner ; il est responsable, mais pas coupable, dirait un juriste. En fait, face aux effets de son passage, qu’ils soient bons, mauvais, désastreux, terriblement létaux, le Camarade Corona est comme le chameau : il s’en fout. D’ailleurs, que pourrait-il faire d’autre ? Il y a là comme une erreur à vouloir le personnifier, ça obligerait à lui donner une intention, un but, une téléologie ; on sombrerait dans l’absurdité ; mais il s’agit d’une chanson et comme nombre de chansons, elle est prétexte à dire autre chose. Qui plus est, c’est une parodie. Je te laisse donc découvrir ce que raconte cette ode.

Soit, dit Lucien l’âne, elle doit avoir sa raison d’être, sa logique particulière et je vais m’empresser de voir de quoi il s’agit. Maintenant, tissons le linceul de ce vieux monde vérolé, infecté, infesté, contagieux et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Tu l’auras,
Camarade Corona,
Le monument que tu exiges de nous Italiens,
Et que tu exiges de tous les peuples du monde,
Tu l’auras, tu le sais bien,
Mais avec quelle pierre on le construira,
Cest à nous de le décider.

Pas avec la pierre financière
Qui se sert de toi pour cette hécatombe ;
Pas avec la pierre de la douleur
Des villes et des villages déserts ;
Pas avec la pierre des médecins et des travailleurs,
Condamnés à mort pour un profit sans limites ;
Pas avec la pierre de la solitude,
De l’isolement et du désespoir
Que chacun pour soi, nous vivons
En ce printemps noir,
Infecté de suspicion, de rétention,
Et de mort
Sans pouvoir fuir encore.
Pas avec la pierre inhumaine
Du calcul économique ;
Pas avec la gêne
Des comptes domestiques ;
Pas avec la pierre palliative, ce décor
Fondé sur des dieux plus morts que la Mort ;
Pas avec la pierre des prières,
Pas avec la pierre des processions ;
Pas avec les drones et les armes
De la répression
Qui nous frappe tous ;
Pas avec nos larmes
À nous tous.

Ton monument ! Tu l’auras,
Camarade Corona
Et ce monument sera
Fait avec la pierre de notre silence
D’une immense puissance,
Un silence qui hurle,
Fait de l’union et la dignité
De femmes et d’hommes libres
Qui ont débusqué la haine
Et décidé d’éliminer
La honte et la terreur du monde.

Tu l’auras
Camarade Corona
Ton monument,
Fait de la pierre des migrants,
Des prisonniers, des vieux seuls et sans foyer.
Tu l’auras
Camarade Corona,
Ce monument fait de la pierre
Taillée dans les budgets resserrés
Des malades et des soins de santé,
Tu l’auras fait de la pierre des dépenses militaires
Tu l’auras fait de la pierre dure du constat
Qu’en ce monde, il n’y a
Ni Italiens ni étrangers,
Que seule existe une humanité,
Gens écrasés et exterminés
Au nom du sacro-saint Marché.
Toi, camarade Corona,
Dont la rumeur dit comme ça
Que tu es né dans un marché.

Tu l’auras fait de la pierre
Du saccage naturel en cours ;
Tu l’auras fait de la pierre
Du pouvoir qui, plus que toujours,
Maintenant encore,
Aveugle et obéissant instrument de mort,
Est un virus bien plus mortel que toi
Et les SS d’autrefois.

Si tu voulais un jour revenir sur ces routes,
Tu nous trouverais à nos postes,
Morts et vivants avec le même engagement,
Pas un peuple, mais de simples gens,
Toute une humanité autour
De ce monument qui s’appelle
Aujourd’hui et pour toujours :
RÉSISTANCE !