Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens |
Moi
aussi quand j’étais petit, je jouais aux Cow-boys- Indiens,
lesquels, malgré les westerns de John Ford et John Wayne, me
plaisaient seulement lorsqu’ils se tiraient dessus. Peut-être déjà
quand j’étais petit, les perdants me plaisaient plus ; pour
parler comme Finardi « Nous sommes tous Vil Coyote ». Et
alors ce morceau pourrait donner le départ à une série de chansons
pour un parcours « Du côté des perdants ».
Dialogue
Maïeutique
Mon
cher Lucien l’âne, cher ami, je ne sais si chez les ânes, on joue
aux cows-boys (il y a plusieurs boys, mais aussi ils gardent
plusieurs vaches ; généralement, un troupeau ; d’où,
la nécessité de mettre au pluriel les vaches – en anglais cow ;
et les gars, en anglais boy) et aux Indiens (il y a généralement,
plusieurs Indiens), aux gendarmes et aux voleurs (voir ce qui est dit
des vaches et des gars), aux brigands et aux carabiniers…
En
effet, les ânes ne jouent pas à des jeux aussi « humains ».
Mais je les connais quand même ; quoique du temps où j’étais
encore un garçon, je n’ai jamais joué à de pareils jeux ;
on jouait au gibier-chasseurs ; il est vrai que certains
jouaient aux Spartiates – Athéniens ou aux Grecs – Perses, aux
citoyens – ilotes, aux maîtres – esclaves. Une remarque
piquante, si tu veux bien l’entendre : je n’ai jamais
entendu, ni a fortiori, vu jouer aux fascistes-communistes, ni aux
patrons-ouvriers… sauf chez les adultes, évidemment !
Bref,
en matière de jeux, ce sont des universaux. On les trouve partout
sous des dénominations et des formes diverses. Ces
jeux sont
les premières manifestations formalisées
de
la Guerre
de Cent Mille Ans dans la vie enfantine. Avant cela, dès
les premiers instants de socialisation, dès que se forment des
groupes d’enfants, de contemporains, on voit apparaître des
comportements de dominants et des comportements de dominés. C’est
une chanson
où dans la mythique guerre, dans la guerre fantasmée, le « héros »,
entretemps
déjà plus âgé, prend parti pour les
« perdants ». Je n’aime d’ailleurs pas trop cette
formulation. Je parlerais plutôt volontiers d’un côté : de
révoltés, d’agressés, de défenseurs et de l’autre côté :
d’attaquants, d’agresseurs et de dominateurs. C’est donc une
chanson qui pose à sa manière la question centrale de la Guerre
de Cent Mille Ans et qui, en même temps, montre
l’importance des jeux d’enfants dans
la formation de la personnalité du petit humain.
Sans doute même qu’elle dévoile quelque chose de plus profond
qu’on ne l’imagine habituellement : le fait que la division
en deux camps opposés de l’humanité s’établit très tôt dans
l’existence. Je dis ça sans chercher à trancher la question de
l’éventuelle propension génétique ou d’un acquis de
socialisation ; même si, j’ai fortement tendance à imaginer
que ces types de comportement sont des traits sociaux qui sont le
résultat d’une éducation ou d’une absence d’éducation,
souvent induit. Une sorte d’imprégnation par le milieu dans lequel
le jeune enfant baigne. Ce qui ferait que sauf changement volontaire
ultérieur, le pli est pris et on se retrouve de l’un ou de
l’autre
côté.
Si
je comprends bien, dit Lucien l’âne en fronçant ses énormes
sourcils, on est très rapidement soit du camp des riches et des
puissants, soit de celui des pauvres ou des faibles. La Guerre de
Cent Mille Ans commence très tôt chez les hommes. Mais alors, il
n’en reste pas oins que si ce positionnement social se fait par
imprégnation, il échappe à la volonté de l’enfant ; il lui
est instillé, il s’impose dès le plus jeune âge.
En
effet, c’est comme le baptême, c’est comme un conditionnement
qui se fait en dehors de la volonté de la personne elle-même (trop
jeune encore pour déjà en avoir une très développée) et qui lui
est imposé. Et comme pour l’attachement à une croyance, à une
religion, seule la raison peut redresser la barre. Évidemment, tout
dépend du côté où l’on se place ; on peut choisir d’aller
dans le sens imposé ou dans l’autre ; soit maintenir le cap,
soit s’orienter de l’autre côté. Ce choix est le résultat de
ce processus souterrain qu’on appelle la pensée et la conscience
morale. Dans la conscience de l’enfant s’établit progressivement
une sorte de cartographie, un dictionnaire, un guide interne, une
boussole qui lui indique les choses qui se font, celles qui ne se
font pas ; ce qui est acceptable, ce qui ne l’est pas.
Cependant, l’imprégnation par le milieu est très précoce et il
est très difficile de s’en départir ; d’autant plus
difficile qu’on la renforce par l’éducation. C’est ce qui
explique que les religions (avec ou sans Dieu(x)) entendent mettre la
main sur l’éducation dès la plus petite enfance afin de pouvoir
museler toutes les tentatives d’émancipation des enfants et des
jeunes et par voie de conséquence, également, celle des adultes et
de toute l’humaine nation.
En
effet, dit Lucien l’âne, l’enjeu est de taille… Quant à moi,
j’aime beaucoup cette expression qui donne le titre à la canzone :
« Dalla parte delle bestie – Du côté des bêtes »,
qui me paraît aller dans le même sens que noter propre antienne :
« Noi, non siamo cristiani. Siamo somari – Nous, nous ne
sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de somme. » À
présent, il nous reste à reprendre notre tâche et tisser le
linceul de ce vieux monde encombré de Dieux, de prophètes, de
religieux et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens
Qui étaient chassés par les Américains.
Du côté des bêtes.
Toute ma vie contre la peste,
Contre les premiers de classe,
Les espions des maîtresses.
Je me rappelle au cirque ces lions sans dents,
Au sourire triste, éteint et fatigué de perdants
Et tous ces zèbres, et tous ces singes
Si gais, si sautillants,
Mais dans mon cœur, des momies,
Mais dans mon cœur, des momies
Me persécutaient sans bruit.
Elles
mettaient le sel au milieu des cheveux
Et ces regards perçants me lançaient des lazzis.
Il est fou debout sur le bord d’un toit.
Il est fou quand il sort, serrez-le à l’étroit.
Il est fou sur la porte de chez lui, on a écrit :
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens
Qui étaient chassés par les Américains.
Du côté des opposants fiers,
Toute ma vie par les sept mers,
Contre les rets des chasseurs,
Et ces regards perçants me lançaient des lazzis.
Il est fou debout sur le bord d’un toit.
Il est fou quand il sort, serrez-le à l’étroit.
Il est fou sur la porte de chez lui, on a écrit :
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Tout petit, je tenais toujours pour les Indiens
Qui étaient chassés par les Américains.
Du côté des opposants fiers,
Toute ma vie par les sept mers,
Contre les rets des chasseurs,
Et
les pièges des trappeurs.
Pauvre de moi, je m’illusionnais, je voulais changer le monde,
Mais je me suis pris des claques
Et maintenant, c’est le fond que je racle.
Mais j’espère au paradis me débarrasser de l’hyène
Qui me poursuit sans gêne,
Dans ma vie sur scène,
Dans ma vie sur scène.
Pauvre de moi, je m’illusionnais, je voulais changer le monde,
Mais je me suis pris des claques
Et maintenant, c’est le fond que je racle.
Mais j’espère au paradis me débarrasser de l’hyène
Qui me poursuit sans gêne,
Dans ma vie sur scène,
Dans ma vie sur scène.
Du
côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Et si vous venez me chercher, je suis ici
Dans ce train de dernière classe, oui.
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des damnés,
Il y a une bande de pirates,
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des opposants,
Du côté des bêtes et des opposants.
Toute ma vie par les sept mers et les océans,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes…
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Et si vous venez me chercher, je suis ici
Dans ce train de dernière classe, oui.
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Toute ma vie contre la peste,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes et des perdants,
Du côté des bêtes et des perdants.
Toute ma vie en montrant les dents,
Du côté des bêtes, des bêtes.
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des damnés,
Il y a une bande de pirates,
Du côté des bêtes et des damnés,
Du côté des bêtes et des opposants,
Du côté des bêtes et des opposants.
Toute ma vie par les sept mers et les océans,
Du côté des bêtes, des bêtes,
Du côté des bêtes, des bêtes…