Nouvelle version française – LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER – Marco Valdo M.I. – 2016
À tous présents et à venir, salut !
Il
existe une pièce de théâtre qui donne la parole à Jean Meslier et un
remarquable petit théâtre de Bruxelles qui la portait depuis sa
création. La Ministre de la Culture vient de tuer le Théâtre et
d’asphyxier la pièce. Il faut dire que la Ministre en question est membre du
parti catholique, qui se dissimule en Belgique sous le nom jésuitique de
« Centre Démocrate Humaniste », on ne peut plus faux-cul.
La pièce s’intitule :
Curé le jour, athée la nuit...
La bonne parole du curé Meslier
En
résumé, la Ministre de la Culture a supprimé la dotation au Théâtre
Poème où j'ai donné (in illo tempore) vers 1965 des conférences sur
Boris Vian et parmi toutes les conséquences de cet assassinat assez
analphabète, la pièce de Jean-François Jacobs à propos de Jean Meslier a
été elle aussi asphyxiée. Sauf si on l'aide, ce que j'ai déjà fait un
peu. Il n'est pas nécessaire de se ruiner, mais il est important de
faire savoir qu'on soutient les artistes.
Par ailleurs, ABA (association belge des athées) a décidé de se porter productrice de ce spectacle.
On peut aussi faire circuler l'info.
Voir en annexe pour les détails :
https://fr.ulule.com/cure-le-jour-athee-la-nuit
Cordial
Marco Valdo M.I.
Mes
chers amis, puisqu'il ne m'auroit pas été permis et qu'il auroit même
été d'une trop dangereuse et trop facheuse consequence pour moi de vous
dire ouvertement, pendant ma vie, ce que je pensais de la conduitte et
du gouvernement des hommes, de leurs religions et de leurs moeurs, j'ai
résolû de vous le dire au moins après ma mort... (JEAN MESLIER - 1729)
Ah,
Lucien l’âne mon ami, en ces temps troubles, je suis allé au spectacle
pas plus tard qu’hier à Bruxelles pour écouter la bonne parole du curé
Meslier. On n’était pas vraiment très nombreux, car la salle était
petite et puis, on n’aurait pas mis grand monde non plus dans l’église
de Jean Meslier à Étrépigny.
Que voilà une bonne idée d’aller écouter la bonne parole d’un si bon curé, dit Lucien Lane en riant.
En
effet, tu ne pourrais mieux dire, car c’était un excellent sermon, un
très remarquable prône dans lequel notre curé athée s’en prend
directement à toutes les religions – je dis bien à toutes les religions,
y compris in primis les monothéismes, les religions du Livre. Mais pas
seulement, cependant.
Pas
seulement aux religions et à qui donc peut-il faire de tels reproches,
de si grandes accusations ?, dit Lucien l’âne en levant les oreilles
vers l’infinitude des espaces et des temps.
Eh
bien, notre bon curé, qui connaît la vie qui est faire aux pauvres,
s’en prend également aux riches et aux puissants – comme nous le faisons
à la suite de Pierre Valdo – quand nous évoquons la Guerre de Cent Mille Ans que
les riches et les puissants (les mêmes) font aux pauvres afin de les
dominer, de les écraser, de les ruiner, de les mépriser et de s’assurer
en propre les plus énormes richesses et les plus grands privilèges.
C’était vrai au temps de Valdo, c’était vrai au temps de Meslier et
c’est toujours vrai de notre temps. Et je me suis souvenu qu’il y a déjà
huit ans, j’avais fait une version française d’une chanson italienne
d’Anton Virgilio Savona, intitulée précisément « Il Testamento del
parocco Meslier ». Mais, elle s’était un peu perdue à l’horizon.
C’est
un peu normal, car depuis ce temps-là, à vue de nez, tu as fait
plusieurs centaines de versions françaises de toutes sortes. Il est
assez compréhensible que tu perdes de vue les plus anciennes.
Et
donc, je me suis dit qu’il fallait profiter de l’occasion pour la
ramener au jour et tant qu’à faire, la toiletter un peu et en donner une
nouvelle version. Restait à la publier : bien évidemment, dans les
Chansons contre la Guerre et tout aussi évidemment sur les blogs : le
mien (Canzones) et le tien, celui de l’Asino resuscitato.
C’est
un bon jour que ce lundi de Pâques pour une résurrection, dit Lucien
l’âne en brayant un bon coup. Maintenant, voyons voir cette nouvelle
version et reprenons notre tâche qui consiste à tisser le suaire de ce
vieux monde crédule, croyant, superstitieux, religieux, sectaire et
cacochyme.
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Dernières nouvelles de Jean Meslier
Depuis Bruxelles 28 mars 2016.
Il s’agit de signaler deux livres à propos de Jean Meslier :
Celui de Serge Deruette :
Celui de Jean-François Jacobs :
LA BONNE PAROLE DU CURÉ MESLIER
chez le même éditeur (Aden)
et voir cette présentation du spectacle en un extrait de la véritable performance d’Alexandre Von Sivers
dont j’extrais (pour l’édification générale) cette petite citation :
« Unissez-vous donc, peuples, si vous êtes sages !
Toutes les religions ne sont que des inventions humaines.
La matière ne peut avoir été créée.
Elle a d’elle-même son être et son mouvement.
Il n’y a point de Dieu. »
À
entendre certains qui discourent sur les « racines chrétiennes de
l’Europe », dont je rappelle qu’il s’agit d’une marchandise
d’importation, d’une pacotille pour bons sauvages, d’une colonisation
cultuelle par des missionnaires venus du Moyen-Orient, je me dis qu’il
est bon et juste de leur opposer Jean Meslier, né dans les Ardennes et
solidement enraciné dans une des plus belles régions européennes.
Évidemment, également, une publication dans l’Asino s’impose, dit Lucien l’âne.
C’est ce que nous allons faire…
Car, comme les paysans (les terroni) de Lucanie, région du sud de l’Italie, anciennement Grande Grèce, pas loin d’Élée :
« Noi,
non siamo cristiani, siamo somari » (Nous, nous ne sommes pas des
chrétiens, nous sommes des bêtes de somme, des gens, des mécréants, des
athées…)
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Commentaire à la version de 2008.
Jean
Meslier (Mazeny, Champagne 1664 – Étrépigny, Champagne 30 juin 1729),
curé d’Étrépigny, en Champagne (commune proche de Charleville-Mézières,
où naquit et grandit plus tard un autre imprécateur de haut vol, le
dénommé Arthur Rimbaud – actuellement département des Ardennes – 08 –
Région Champagne-Ardennes) eut cette idée de publier – en les déposant
sous forme de testament – ses pensées et ses colères à titre posthume.
Est-ce parce qu’il y travailla jusqu’au bout de sa vie ou en application
d’un principe de précaution ? Toujours est-il que ce texte et sa lettre
aux paroissiens qui le présente, ont surgi à son décès, puis ont disparu et par
la suite, ont connu des fortunes diverses avant de pouvoir venir au
jour en édition intégrale plus de deux cents ans après ce dépôt, qui
pourtant les a sauvés. Dans cette aventure du « Mémoire des pensées et
sentiments de Jean Meslier », le caviardage de Voltaire fut assurément
une vilénie (Meslier à la sauce déiste de Voltaire est à la correction
littéraire et intellectuelle, ce que le fast-food est à la cuisine – une
trahison !), mais l’arrangement voltairien eût quand même le mérite
(involontaire) d’attirer l’attention sur les 3 exemplaires que Jean
Meslier avait déposés au greffe. Grâce soit rendue, dès lors, au
hollandais Rudolf Charles, éditeur de son état, qui tenta la première
intégrale !
Quant
à savoir pourquoi Jean Meslier n’a pas publié de son vivant, j’ai ma
petite idée à ce sujet. Tout simplement, il faut quand même connaître un
peu les Ardennes pour comprendre que un : trouver un éditeur était en
soi une odyssée, deux : qu’écrire le « Mémoire » (outre que de tenir sa
charge de curé), était aussi un formidable défi et trois : qu’enfin, en
rédiger les copies prenait du temps et était essentiel pour en assurer
la postérité. Le reste est sans doute dû à la volonté d’aller le plus
loin possible dans la rédaction. Jean Meslier ne s’en cache pas lui qui
commença son texte par : « Mes chers amis, puisqu’il ne m’aurait pas été
permis.. », et dit – en substance ensuite – « Je vous l’aurais bien dit
de vive voix, juste avant de mourir, mais je ne suis pas sûr (ceci
traduit en langage moderne) que j’aurai encore toute ma tête à ce
moment… Donc j’ai pris la précaution d’écrire ». En ce temps-là, la
mémoire des bûchers de l’Inquisition illuminait encore l’Europe.
Par
ailleurs, on n’a pas fini de disserter sur Jean Meslier. Je n’en dirai
pas plus ici, sauf à reprendre ce que les paysans de Lucanie disaient au
temps de Carlo Levi (1936) : « Noi, non siamo cristiani, siamo somari »
(« Nous nous ne sommes pas des chrétiens, nous sommes des bêtes de
somme »), sauf à reprendre la phrase de Jean Meslier qui excommunie
quiconque la prononce ou la reproduit : « Je voudrais, et ce sera le
dernier et le plus ardent de mes souhaits, je voudrais que le dernier
des rois fût étranglé avec les boyaux du dernier prêtre. »
Puis-je ajouter, dit Marco Valdo M.I., que c’est aussi le mien de souhait – et pas le dernier.
Et,
comme disait cet autre mécréant anarchiste de Brassens : « Et tant
mieux si c’est un péché, nous irons en enfer ensemble… Il suffit de
passer le pont… »
Le
texte qui précède date du 2 août 2008, date de son insertion dans les
Chansons contre la Guerre et il ne me paraît pas utile d’y changer, d’y
retrancher ou d’y ajouter quelque chose.
Sauf
que j’y adjoindrai volontiers les commentaires que j’en avais faits
depuis lors dans les Chansons contre la Guerre. À savoir :
(date d’insertion dans les Chansons contre la Guerre : 20 mai 2010)
Pour
en revenir à notre bon Meslier, curé de son état, il est proprement
indigne de lui imputer la méconnaissance du christianisme, fût-il des
origines. Bien au contraire, c’est de le bien connaître qu’il en eut la
dégoûtation. Il suffit de lire les écrits de Jean Meslier pour s’en
rendre compte de manière tout à fait objective.
Par ailleurs, il ne pouvait ignorer cela ayant subi le « séminaire » de
Châlons, été ordonné prêtre et nommé curé le 7 janvier 1769 curé
d’Étrépigny et de But dans les Ardennes.
Cela
dit, il voyait clair dans le jeu des illusions chrétiennes et plus
spécifiquement, catholiques, apostoliques et romaines. Il disait, par
exemple : « …vous adorez effectivement des faibles petites images de
pâte et de farine, et vous honorez les images de bois et de plâtre, et
les images d’Or et d’Argent. Vous vous amusez, Messieurs, à interpréter
et à expliquer figurativement, allégoriquement et mystiquement des
vaines écritures que vous appelez néanmoins saintes, et divines ; vous
leur donnez tel sens que vous voulez ; vous leur faites dire tout ce que
vous voulez par le moyen de ces beaux prétendus sens spirituels et
allégoriques que vous leur forgez, et que vous affectez de leur donner,
afin d’y trouver, et d’y faire trouver des prétendues vérités qui n’y
sont point, et qui n’y furent jamais. Vous vous échauffez à discuter de
vaines questions de grâce suffisante et efficace. Et en plus, vous
vilipendez le pauvre peuple, vous le menacez de l’enfer éternel pour des
peccadilles, et vous ne dites rien contre les voleries publiques, ni
contre les injustices criantes de ceux qui gouvernent les peuples, qui
les pillent, qui les foulent, qui les ruinent, qui les oppriment et qui
sont la cause de tous les maux, et de toutes les misères qui les
accablent. »
J’insiste
pour qu’on relise la dernière phrase, dit Lucien l’âne, on dirait
qu’elle parle de l’Italie actuelle et de bien d’autres pays.
Je
la relis, Lucien mon ami : « Et en plus, vous vilipendez le pauvre
peuple, vous le menacez de l’enfer éternel pour des peccadilles, et vous
ne dites rien contre les voleries publiques, ni contre les injustices
criantes de ceux qui gouvernent les peuples, qui les pillent, qui les
foulent, qui les ruinent, qui les oppriment et qui sont la cause de tous
les maux, et de toutes les misères qui les accablent. »
En
effet, dit Lucien l’âne en redressant la tête et en lançant d’un coup
de cou sec sa crinière en arrière pour dégager ses yeux, que cela plaise
ou non aux cagots, Jean Meslier avait une vision du monde assez lucide.
Ainsi parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.
Jean Meslier aurait connu le destin du Chevalier de
la Barre, si...
Jean
Meslier était un homme intelligent. De ce fait, il avait très bien
perçu que s’il voulait atteindre son but : transmettre et faire
connaître la nécessité de l’athéisme et la corollaire réfutation de(s)
dieu(x), en ces temps où on torturait joyeusement les incroyants, avant
de les massacrer, il était prudent d’être prudent et d’user de
discrétion. Ce pourquoi, il attendit d’être mort pour diffuser son
Testament.
Eût-il
fait autrement, l’eût-il fait de son vivant… Il aurait connu le destin
du Chevalier de La Barre (ou de tant d’autres qui finirent sur les
bûchers catholiques) et ses textes auraient connu le même destin, de
sorte que nul n’aurait pu savoir ce qu’il avait le souhait de faire
connaître.
Quant au destin du Chevalier de La Barre, voici :
Quarante
ans plus tard, le Chevalier de la Barre, un jeune homme de 20 ans –
moins prudent – finira torturé, décapité et enfin, brûlé pour avoir
chanté avec ses amis et n’avoir pas tiré son chappeau au passage de
capucins…
Voici le témoignage de Voltaire :
Dans
son article « Torture » de l’édition de 1769 du Dictionnaire
philosophique, Voltaire fait le récit du martyre du chevalier de La
Barre :
« Lorsque
le chevalier de La Barre, petit-fils d’un lieutenant général des
armées, jeune homme de beaucoup d’esprit et d’une grande espérance, mais
ayant toute l’étourderie d’une jeunesse effrénée, fut convaincu d’avoir
chanté des chansons impies, et même d’avoir passé devant une procession
de capucins sans avoir ôté son chapeau, les juges d’Abbeville, gens
comparables aux sénateurs romains, ordonnèrent, non seulement qu’on lui
arrachât la langue, qu’on lui coupât la main, et qu’on brûlât son corps à
petit feu ; mais ils l’appliquèrent encore à la torture pour savoir
combien de chansons il avait chantées, et combien de processions il
avait vues passer, le chapeau sur la tête. »
Pour de plus amples informations :
Et pour que nul n’en ignore, dit Lucien l’âne, il faudra en faire une chanson et même deux, une pour Meslier, une pour La Barre.
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
LE TESTAMENT DU CURÉ MESLIER
nouvelle version française – 28 mars 2016.
Vous avez sur le râble le fardeau pesant
Des princes, des prêtres, des tyrans et des gouvernements;
Des nobles, des moines, des chanoinesses et des prélats,
Des fripons de garde-sel et de tabac et des magistrats.
Vous avez sur le râble les puissants et les guerriers,
Les ineptes, les inutiles et les rusés et les douaniers,
Les riches qui volent pour s’engraisser,
Laissant le peuple entier –
Abattez les riches condottières