MALHEUR !
Version
française – MALHEUR !
– Marco
Valdo M.I. – 2019
Après
la version italienne de Riccardo Venturi, d’une
Chanson
allemande – Klage
– Erich
Mühsam – 1916
Poème
d’Erich
Mühsam, in
"Brennende Erde. Verse eines Kämpfers", publié
à
Munich
en
1920Musique de Christoph Holzhöfer
Dialogue
Maïeutique
J’espère,
je veux dire : je suis persuadé, Lucien l’âne mon ami, que
tu te souviens de cette chanson que j’avais faite en 2011 ; ça
fait déjà quelques années à propos d’Erich Mühsam.
Oui
bien sûr, dit Lucien l’âne, elle s’intitulait : « Erich
Mühsam, poète, anarchiste et assassiné ».
Elle
disait :
« D’accord,
Mühsam était juif, poète et anarchiste
Rien que ça, pour nous, le condamnait par avance
D’accord, il était écrivain, artiste et journaliste
Entre nos mains, il n’avait aucune chance. »
Rien que ça, pour nous, le condamnait par avance
D’accord, il était écrivain, artiste et journaliste
Entre nos mains, il n’avait aucune chance. »
C’est
bien que tu t’en souviennes, dit Marco Valdo M.I., car ça nous
évitera de raconter ici ce qui est dit là. Donc, Erich Mühsam,
poète assassiné par des imbéciles barbares, avait eu le tort
immense de plaider inlassablement pour que les humains s’attellent
à mettre au monde un monde de liberté, de coopération et de paix ;
un monde d’intelligence et de raison aussi. À
propos de cet engagement total d’Erich Müsham, il me plaît de
rappeler qu’il fut le fondateur, l’éditeur et probablement, le
seul rédacteur d’une revue qu’il appela : « Kain
– Zeitschrift
für Menschlichkeit »
– « Kain
– Journal
pour l’humanité », et qu’il publia à Munich de 1911 à
1919 – c’est-à-dire tout au long de la guerre, qu’il
n’applaudissait certainement pas des deux mains.
Ce
sont là, dit Lucien l’âne, des manières fort imprudentes quand
l’heure est aux gloires de la nation et des armes, quand les temps
sanctifient l’exploitation et la richesse. Il est périlleux de
vouloir remonter le courant dans la tempête.
Oh,
dit Marco Valdo
M.I., Mühsam savait tout cela ; ce qui ne l’empêcha pas de
dire ce qu’il avait à dire, ni de penser ce qui lui arrivait de
penser, ni de faire ce qu’il avait à faire. Notamment,
de sonner l’alarme. Cependant, comme nous le savons, presque
toujours, les mots des Cassandre ne sont entendus et compris qu’après
la réalisation des horreurs qu’ils annoncent.
Certes,
dit Lucien l’âne, je me demande à quoi tient un pareil
aveuglement, une telle surdité. Je me demande si, par hasard, ce ne
seraient pas des manquements volontaires.
Certainement,
mais pas vraiment, pas complètement, pas entièrement, Lucien l’âne
mon ami, pas tout à fait, mais quand même, partiellement. D’abord,
il n’y avait pas de surdité, pas d’aveuglement, car comment
auraient-ils pu savoir ce que disait, ce qu’écrivait Erich Mühsam
et dès lors, pourquoi auraient-ils voulu le faire taire, pourquoi
brûler ses écrits, pourquoi l’emprisonner, pourquoi
l’assassiner ? Mais tu as raison, il n’est pire sourd que
celui qui ne veut pas entendre ; pas entendre, soit !, mais
il faut formuler la chose différemment : il n’est pire sourd
que celui qui ne veut pas comprendre ou qui ne peut pas comprendre ou
qui n’a pas intérêt à comprendre ou qui ayant quand même
compris, ne veut pas changer le cours des choses ou entend à toute
force le maintenir ou le renforcer. Cela dit, on pourrait épiloguer
longuement, mais ce n’est pas ici le lieu ou le temps.
Oui,
dit Lucien l’âne, il faut reprendre notre tâche, comme
inlassablement le fit Erich Mühsam et tisser le linceul de ce vieux
monde assassin, nationaliste, belliqueux, imbécile et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Nous
avons cherché et voulu la paix.
Alors,
dans le monde, la guerre a éclaté.
Le
feu s’étendait et
la mort fauchait,
Et
le bon Dieu devint
un fantôme rancunier.
Malheur !
Nous
avons offert aux gens bonheur et raison.
Ils
ont choisi la
ladrerie.
Ils
crurent aux écritures impures de l’envie.
L’avidité
les arrosa de balles ;
la cupidité les
noya
de poison.
Malheur !
Nous
avons chanté un chant de liberté aux peuples.
Ils
ont marché en
rang pour leurs dirigeants.
Ils
se battirent pour le pouvoir de leur maître
Et
ils crurent
ainsi protéger
leurs enfants.
Malheur !
Nous
avons prévenu et
nous avons crié.
Cachée,
l’épouvante
a vacillé.
Sur
sa tête et son menton, son manteau elle
a posé.
Les
yeux et l’esprit des gens, elle
a frappé.
Malheur !
Nous
avons combattu l’horreur épouvantable.
Ils
lui ont donné main, cœur ou épée.
L’horreur
a dirigé la main de l’épée,
Des
millions de corps frémissent dans
le sable.
Malheur !
Nous
crions malheur ! Par la tourmente et le combat,
La
terre sera tombe et cendres.
Trois
maîtresses tendent leurs bras :
La
rapacité, l’esclavage et le meurtre. –
Malheur !