DEUTSCHLAND 1945
Version
française – DEUTSCHLAND
1945 – [11-11-2019] – Ucronia / Uchronie – Marco Valdo M.I. –
2019
Chanson
italienne –
Deutschland 1945 – [11-11-2019] – Ucronia / Uchronie –
Anonimo
Toscano del XXI secolo – 2019
Dialogue
Maïeutique
Regarde-moi
ça une fois, Lucien l’âne mon ami, quelle magnifique satire,
notre ami l’Anonyme du Siècle…
Mais,
s’écrie Lucien l’âne, y en a-t-il eu d’autres à d’autres
siècles ? Je ne le pense pas ; alors, il est inutile de
préciser davantage. De toute façon, on le connaît cet anonyme, qui
dit-on, réside présentement en Toscane.
En
effet, Lucien l’âne mon ami, mais reprenons. Quelle magnifique
satire, l’Anonyme du Siècle vient de nous présenter à propos de
la division de la Germanie, qu’il trouve tout à fait nécessaire.
Certes, son propos est ironique, mais il n’est pas sans fondement :
selon lui, tout tient à la fin de la dernière grande guerre que le
Pays des Deutschen unifié et expansionniste avait faite – avec ses
alliés, dont l’Italie – aux gens des pays d’Europe et
d’ailleurs ; et à la fin du Mur de Berlin qui avait réuni
les morceaux de l’Allemagne disjoints suite à la guerre sus-dite.
Oh,
dit Lucien l’âne, ce n’est ni à moi, ni plus encore à toi
qu’il faut expliquer tout ça, puisqu’il t’a pris la fantaisie
d’écrire des Histoires d’Allemagne qui racontent tout le siècle
écoulé, vu en quelque sorte de l’intérieur, vu la plupart du
temps par des yeux allemands. C’était un point de vue particulier
et pour l’étranger, inattendu et souvent, rassurant. En gros :
non, tous les Allemands n’étaient des fanatiques des Reichs
successifs ; non, tous les Allemands ne rêvaient de massacrer
tous les Juifs ; non, tous les Allemands ne croyaient pas à
l’Empire millénaire ; non, tous les Allemands ne voulaient
pas la guerre ; non, tous les Allemands n’étaient pas nazis.
Je renverrai à deux de ces chansons qui parlent elles aussi de cette
division : « D’Est
et d’Ouest » et « Ni
d’Est, ni d’Ouest, nazis ! ». La
première disait notamment à propos de 1945 :
«D’Est
et d’Ouest, l’ouragan est arrivé ;
Tout s’est écroulé, tout a flambé.
Lugubre année mil neuf cent quarante-cinq :
Dieu n’était plus avec nous, Dieu nous avait lâchés.
Remember, aucun n’a pu oublier
Mil neuf cent quarante-cinq. »
Tout s’est écroulé, tout a flambé.
Lugubre année mil neuf cent quarante-cinq :
Dieu n’était plus avec nous, Dieu nous avait lâchés.
Remember, aucun n’a pu oublier
Mil neuf cent quarante-cinq. »
Tu
fais bien, Lucien l’âne mon ami, de rappeler ces chansons-là qui
rappelle précisément ça ; pour un peu, on l’oublierait.
Cependant, revenons à cette longue diatribe de l’Anonyme et à
l’idée éclatante qu’il y développe tel une Pénélope en
attente du retour d’Ulysse, je veux dire ainsi, inlassablement.
Hoho,
dit Lucien l’âne, et quelle peut bien être cette idée
stupéfiante ?
Eh
bien, reprend Marco Valdo M.I., notre Anonyme suggère une retour à
la Germanie, autrement dit l’idée d’une division de l’Allemagne
en 87 micro-États, comme elle le fut aux temps où elle n’avait
pas encore son masque d’ogre et ses bottes de sept lieues. Une
Allemagne où les Allemands étaient tout aussi querelleurs et
massacreurs, mais entre eux. C’était excellent pour sa réputation
et surtout, pour tous ses voisins. D’un autre côté, ce serait une
bonne idée d’étendre ce système de décomposition
aristo-démocratique à l’ensemble des pays d’Europe. Ce serait
la réalisation de ce fantôme qui hante nos contrées :
l’Europe des régions. Au-delà de ça, il y a toujours intérêt à
démanteler les Empires et à tout le moins, d’atténuer le poids,
les effets et les interventions du pouvoir central sur les habitants.
Il s’agit de réduire à des dimensions maîtrisables la taille des
régions ; je veux dire aussi ramener les États nations à la
dimension de ce qu’un habitant peut sentir à sa mesure d’homme ;
où en quelque sorte, il peut se sentir vivre, où il peut se
comprendre comme une unité signifiante.
Arrête-toi
là, Marco Valdo M.I., sinon tu vas nous asséner une conférence et
ce n’est pas le lieu. Cela dit, tissons le linceul de ce vieux
monde belliqueux, envahisseur, centralisateur, titanesque costume mal
coupé et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Paraleient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Bonjour.
Je vous raconte
Le
25 septembre 1945,
Oui,
de 1945 !
Quelle
année incroyable !
Formidable !
Improcrastinable !
La
guerre est finie
Sur
Terre
Avec
quelques bombes à fission
Sur
les arrières
Du
Japon,
Et
de la Germanie.
La
Germanie,
Quelle
belle terre !,
Avec
la Poméranie,
La
Rhénanie,
La
Campanie
(non,
euh, la dernière n’a rien à y faire).
Ne
vous avisez pas
De
diviser en deux parties
La
Germanie !
La
Germanie
En
fait, dès minuit, sera
Divisée
en quatre-vingt-sept États
(Une
sage et clairvoyante décision
Qui
très strictement respectera
L’Histoire
et la Tradition).
Des
microétats :
Margraviats,
Principautés,
Grand-Duchés,
Comtés,
Marquisats.
(Je
me demande quel sera
Le
nom des micro-monarchies ?
Royalties ?)
Et
heureusement
Tout
a été remis droit
à
Yalta !
Non,
dis-je, jusqu’au dernier instant
Ils
voulaient se la partager à quatre
Et
en deux la diviser.
La
logique aurait aimé
De
la diviser aussi en quatre !
Non,
en quatre,
C’est
seulement pour Berlin.
Quel
machin !
Mais
en dernière minute un secret accord
A
discrètement restauré encore
La
vieille, chère, bien-aimée Germanie
En
respectant son Histoire et sa Kultur,
En
respectant son écriture en Fraktur,
Sa
grande science, son audacieuse philosophie,
Sa
somme linguistique, ses forts médiévaux,
Sa
guerre de Trente Ans, et tous ses maux :
Ses
révoltes paysannes et son grain de folie
Martin
Luther et les autres piétés
Je
veux dire, en résumé :
Des
microétats :
Margraviats,
Principautés,
Grand-Duchés,
Comtés,
Marquisats.
(Pour
tous les goûts évidemment
Et
pour tous les Allemands).
Saxe-Gotha-Cobourg,
Anhalt-Beckenbauer-Mecklembourg,
Weltanschauung -Vorpommern,
Ostpommern-Hanswurst-Hohenzollern,
Vogelweide-Von Braun-Adenauer,
Sankt Pauli -Rummenigge-Honecker,
(Pour tous les goûts évidemment
Et
pour tous les Allemands).
Un
margraviat constitutionnel démocrate,
Un
Grand-Duché communiste orthodoxe,
Un
marquisat libéral socialiste,
Un
comité insurrectionnel anarchiste,
Deux
ou trois comtés verts écologistes,
Une
principauté princière avant-gardiste
Où
on chanterait la Wacht am Rhein
À
l’intérieur du château de Neuschwanstein.
Et,
dans des circonstances si historiques,
Aussi
une Räterepublik
Avec
Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg
Et
pourquoi pas, pour toujours,
En
Thuringe, un quatrième Reich de 22,6 kilomètres carrés
Tout
aryen, tout blanc, où envoyer
Les
excités au bras levé.
Équipes
nationales de football : quatre-vingt-sept ;
Champions
du monde quatre étoiles : quatre-vingt-sept ;
Goethe,
poète national : quatre-vingt-sept ;
Chants
des Nibelungen : quatre-vingt-sept ;
Paires
de rouflaquettes de Bismarck : quatre-vingt-sept ;
Marks
allemands : quatre-vingt-sept ;
Bundesligues :
quatre-vingt-sept ;
Sage
prévoyance des puissances qui ont gagné.
Je
me dis et je me redis : comment a-t-on pu imaginer
En
deux, la Germanie diviser
Et
à quatre, Berlin se partager ?
À
compter du 25 septembre 1945, sur l’heure,
Berlin
sera divisée en secteurs
De
sorte que si quelqu’un a à cœur
De
dire "Ich bin ein Berliner", lui aussi,
Il
finira divisé en quatre-vingt-sept Kennedy.
Ou
si un autre, piqué par une autre mouche,
Veut
embrasser Leonid Brežnev sur la bouche,
Il
lui adviendra d’embrasser dès le matin
Les
quatre-vingt-sept membres du Soviet suprême de Berlin
Avec
la langue et sans les mains.
Pour
les ducs de Baader-Meinhof, un duché
Pour
les Comtes Wallenstein, un comté
Et,
il y aura quatre-vingt-huit unités,
Si
le Liechtenstein est également compté.
Qu’on
ne parle plus de réunification, saperlipopette
Et
surtout qu’on ne parle pas d’opérettes !
Il
y a un problème avec les opérettes ?
Sauf
si vous préférez le doktor Goebbels en jupette,
Ou
Braccobaldur Von Schirach
Au
lieu de Franz Lehár et d’Offenbach
(Et
si d’aventure, c’était le cas, voyez-vous,
Il
y a ce petit Quatrième Reich rien que pour vous,
Vingt-deux
virgule six kilomètres carrés, en tout).
À
nouveau pourra alors s’épanouir la Germanie,
Développer
ses énormes potentialités,
Multipliées
par quatre-vingt-sept dans la paix et la fraternité.
Elle
aura quatre-vingt-sept sièges aux Nations-Unies ;
Quatre-vingt-sept
joyeuses armées d’opérette ;
Si
besoin, bien sûr, une guerre guillerette
Entre
un margraviat et un duché,
Question
d’un peu s’entraîner
Et
de conclure des traités presque
Semblables
aux usages
En
usage en son grand âge
Chevaleresque.
En
définitive, cette décision
prise
ce 25 septembre 1945
Empêchera
les peuples de langue allemande
(langue
inexistante, car les Allemands
Parlent
sept cent mille dialectes différents)
De
trop croître et prospérer comme avant
De
sorte que le reste du monde n’ait plus à faire
Quoi
que ce soit avec des emmerdeurs réunifiés
Avec
leurs banques centrales au cœur de fer
Et
leurs économistes strictement bornés.
Les
quatre-vingt-sept ou quatre-vingt-huit États germains
Vivront
dans le calme et sereins.
(Soyez
assuré, Heinrich, c’est certain !).
Et
il n’y aura
jamais besoin
De
murs comme à Berlin !
Basta
les murs !
Et combien voulez-vous en faire, putain, de ces murs ?
Quatre-vint-sept, quatre-vingt-huit, nonante ?
Ils créeraient une dette géante
Plus gigantesque que la dette hellène
Ou un ajustement de la dette italienne.
Et combien voulez-vous en faire, putain, de ces murs ?
Quatre-vint-sept, quatre-vingt-huit, nonante ?
Ils créeraient une dette géante
Plus gigantesque que la dette hellène
Ou un ajustement de la dette italienne.