samedi 10 mai 2014

NOVEMBRE 18

NOVEMBRE 18


Version française – NOVEMBRE 18 – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanson allemande – November 18 – Kurt Tucholsky – 1926
Texte de Kurt Tucholsky (publié sur Die Weltbühne du 16 novembre 1926, signé de son pseudonyme de Theobald Tiger), adapté par Hanns Eisler.
Musique de Hanns Eisler.
Interprétée par Ernst Busch

http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?lang=it&id=47212






Berlin 1918
Là pour la première fois

En Prusse, la terre trembla. 


Tiens, Lucien l'âne mon ami, j'espère que Novembre 1918, te rappelle quelque chose. C'est à la fois, l'effondrement du Reich allemand, la fin de la guerre et l'éclatement d'une révolution rapidement avortée en Allemagne et pire que tout, avortée par ceux-là mêmes qui auraient dû la soutenir... si l'on en croit leur déclaration de principe, autrement dit et en clair : les sociaux-démocrates. Et ce sera une chirurgie violente, pratiquée directement sur le peuple insurgé. Pour en venir à la traduction, comme tu peux le voir, il y avait ici deux versions presque semblables du même texte en allemand et comme bien tu penses, j'ai pris la version originale de Theobald Tiger, personnage que tu as souvent rencontré ici sous le nom de Kurt Tucholsky et que tu as sans doute apprécié sous celui de Peter Panter (Mademoiselle Ilse).






Oh, je te comprends bien. Si les versions sont presque semblables, il n'y a pas beaucoup de raison de les traduire toutes les deux... et tant qu'à faire, il vaut mieux en effet choisir la version originale.






Ce n'est pas que l’adaptation soit moins bonne, mais j'aime presque toujours mieux m'en tenir à l'originale... Peut-être par corporatisme... Que sais-je ? Cela dit et pour en venir à la chanson elle-même, Novembre 18, vu de Berlin huit ans plus tard, c'est assez bouleversant. D'où l'intérêt de faire paraître dans le site des CCG toutes les chansons de ce temps-là. Elles éclairent le nôtre. C'est le sens du titre : huit ans après, rien n'a fondamentalement changé... D'ailleurs, huit ans plus tard, ce sera pire encore.


Huit ans plus tard ? Que veux-tu dire ? Moi, je ne m'y retrouve plus dans tous ces huit ans, dit Lucien l'âne en piaffant sur place.


Alors, il faut tout t'expliquer, dit Marco Valdo M.I. en riant. C'est bien simple pourtant. Commençons à 1918... J'ajoute huit ans, je suis en 1926 ; là, c'est la république de Weimar. J'ajoute encore huit ans, je suis en 1934... Je te rappelle qu'on est en Allemagne... 1934 , les nazis s'installent définitivement ; en 1933, on aurait encore pu croire qu'ils ne resteraient que six mois, un an au maximum... Continuons, huit ans plus tard, donc en 1942, les choses empirent : les nazis adoptent la « solution finale », c'est-à-dire décident l'extermination industrielle de populations entières sur une base ethnique : les Juifs, les Roms et de pureté raciale : les handicapés, les homosexuels le tout nourri du concept fumeux de sauvegarder la race aryenne ; sur le plan militaire, les choses commencent à aller mieux... Le vent tourne à l'Est... Huit ans plus tard, …


Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, arrête, je t'en prie, tu as déjà fait cent histoires d'Allemagne... Et puis, nous avons à faire. Il nous faut reprendre notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde hanté par les fantômes du nazisme, poursuivi par son délire d'accumulation, rongé par sa cupidité, malade d'ambition, souffleté par l'indécence, suant de puissance, gonflé d'infantilisme et cacochyme.


Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane







IL Y A HUIT ANS



Texte original de Theobald Tiger (alias Peter Panter)





Alors, oui !
Là pour la première fois
En Prusse, la terre trembla.
Le dernier caporal l'a ressenti :
Air lourd ! C'est l'orage !
On a éteint la chaudière.
Bas les armes ! Et tout le monde au logis.

Et alors…
Où étaient-ils quand même alors :
Les empereurs avec leurs grands colliers ?
Ils étaient assis tremblant dans leur tanière,
Avec des voitures et des toilettes pour dames.
Insectes muets : Kronprinz, officiers
Aucun n'était droit. Tous sont tombés.

Alors, oui !
C'est si loin… aujourd'hui!
Ils sont toujours tous au pouvoir.
Criminels. Armée, gloire.
Tout a repoussé.
Vos gueules, Allemands ! Préparez ! Préparez !
La bouffe pour vingt monarchies.


Alors, oui !
Comment ont-ils baptisé ça ?
Révolution ? Ce n'en était pas.
Ils vous ont vendus et trahis
Vous pensez toujours que c'en fut une :
1918 ? Un nombre d'or.
Ce sera mieux la prochaine.
Encore. Encore.