dimanche 31 juillet 2016

SOCRATE GITAN

SOCRATE GITAN
Version française – SOCRATE GITAN – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson espagnole – Un Sócrates gitanoOlga Manzano y Manuel Picón – 1978
Paroles et musique de Manuel Picón






Voici, messieurs, ici présent
Ce Socrate gitan,
Qui se baigne dans l'eau-de-vie
Et dans les odeurs des gens
Des bars et des barques.

Je leur vends les vérités
Apprises sur les routes.
Il n'y a pas meilleur dieu pour semer
Que la sueur mouillant le blé.
Il n'y a pas meilleurs hommes que les hommes
Qui donnent abri à d'autres hommes.
Il n'y a pas meilleures mamans
Que les femmes qui aiment leurs enfants.

Il n'y a d'autres guerres que les guerres que tous ont perdues.
Et, va là, guitare, dans des mouchoirs rouges tenue.
Il n'y a pas meilleures bouches
Que les bouches qui ont embrassé d'autres bouches.
Il n'y a pas meilleures bouches
Que les bouches qui ont embrassé d'autres bouches.

Voici, messieurs, chantant,
Des mots en sa gorge noués,
Ce poète priant
Pour les gens habillés
De vin renversé.

Le ver qui mue en papillon se transforme .
Le peintre de deux couleurs peint le monde et une rose.
Et, le tyran, même entouré d’uniformes,
A un arbre qui l'attend avec un nœud et un corde.

Peu à peu, toujours, l'histoire règle tous ses comptes.
Va là, guitare libre, comme un oiseau des contes.
Horizons, toujours lointains, mon dieu ! Comme j'ai vécu.
Horizons, toujours lointains, mon dieu ! Comme j'ai vécu.

Je leur vends les vérités, toutes
Apprises sur les routes.
Il n'y a pas d'autres hommes que les hommes
Qui donnent abri à d'autres hommes.


Le Parti des petits Lapins


Le Parti des petits Lapins


Chanson française – Le Parti des petits LapinsHenri Tachan – 1982



Lucien l’âne mon ami, si je pensais un instant que tu ne connaissais pas Henri Tachan, je me lancerais illico dans une longue histoire à propos de ce chanteur que je connais depuis longtemps. Mais voilà, je sais que tu le connais et qu’il n’est pas nécessaire de te tresser une biographie. Cependant, il me paraît utile de dire deux trois choses à propos de cette chanson. Sans doute, Henri Tachan devait avoir dans l’oreille ou dans un coin perdu de sa mémoire, le souvenir d’une chanson de Pierre Dac et Francis Blanche qui portait un titre fort proche de celui-ci : Le Parti d’en rire et qui abordait l’univers politique avec une forte dose d’acide ironique. Tachan est lui aussi sceptique que ces deux-là et que par exemple, Georges Brassens. Cela dit, à lire son titre, on dirait une chanson enfantine ou une chanson pour enfants – et elle l’est assurément.

Et pourquoi pas ?, demande Lucien l’âne. Pourquoi ne le serait-elle pas ? C’est très bien de faire des chansons pour les petits enfants.

De fait. Note, Lucien l’âne mon ami, et la chose te plaira que le même Henri Tachan avait fait une chanson sur La Chasse, que je trouve pas piquée des hannetons et qui prenait le parti des animaux face aux bourreaux en mal de loisirs actifs. Ici aussi, il prend le parti des animaux – et m’est avis que s’il avait connu la Déclaration Universelle des Droits de l’Âne, il l’aurait adoptée. D’ailleurs, quand on la lit, on a bien envie d’être comme toi, un âne.

Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, voilà qui fait plaisir. Malheureusement, ce n’est donné à tout le monde d’être un âne et le devenir est très difficile et comme je le sais d’expérience, fort périlleux. Mais je suppose qu’il ne dit pas que ça dans sa chanson.

Il s’annonce également comme rallié au parti des lapins, des enfants, des vieux, des fleurs et définitivement incurablement hors système. En somme, Henri Tachan est un « en dehors », un « à l’écart » des chemins trop fréquentés, un qui – tiens, comme Brassens, encore lui – ne suit pas le droit chemin. Tachan – comme le lapin – se perd volontiers dans la luzerne.

Comme tu le sais certainement, c’est aussi une habitude des ânes, que de baguenauder et d’aller se perdre dans des endroits eux-mêmes perdus. Mais rassure-toi, Marco Valdo M.I mon ami, on s’y retrouve fort bien. Alors, écoutons la chanson et puis reprenons notre tâche et tissons (dans la luzerne ou à l’orée du village ou carrément dans le bois où l’on évitera soigneusement de déranger les papillons) le linceul de ce vieux monde chasseur, tueur, sacrificiel, religieux et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




J’ai ma carte, je suis au parti des petits lapins,
Depuis quarante ans, leur drapeau, c’est le mien :
Carotte rose sur fond de luzerne,
Ça ne fait pas fuir les badernes
Qui me traquent, une carabine à la main.

J’ai ma carte, je suis au parti des petits lapins
Qui finissent à la moutarde, au romarin,
En civet, à la casserole,
Ne croyez pas que ça me console
De ne pas vieillir dans mon champ de thym.

Ma vie,
Qui l’a choisie?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.

J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui ne veulent pas plus tard devenir grands,
Qui ne veulent pas jouer au facteur ;
Qui ne veulent pas jouer au docteur ;
Ni jouer au papa et à la maman.

J’ai ma carte, je suis au parti des petits enfants
Qui s’ennuient beaucoup au milieu des parents
Mais qui s’envolent sur l’aile
Bien tiède d’une hirondelle
Qui, pour eux, quelquefois fait le printemps.

Ma vie,
Qui l’a choisie ?
J’ai les mains vides,
Ils ont le fusil.

J’ai ma carte, je suis au parti des pauvres vieux
Entassés dans ces fourrières de banlieue,
À l’hospice, à l’hôpital,
Mourir, c’est le moindre mal
Quand on est loin de chez soi, seul et vieux.

J’ai ma carte, je suis au parti des pépés, mémés
Qui n’ont plus personne à voir ni à aimer,
Même pas un bouquet de violettes,
Un chat de gouttière, une voilette ;
Que leurs souvenirs déjà embaumés.

Ma vie,
Qui l’a choisie?
Jai les mains vides,
Ils ont le fusil.

J’ai ma carte, je suis au parti des petites fleurs,
Au parti de tout ce qui souffre et qui meurt,
Loin de leurs jeux olympiques
U.R.S.S. – Amérique,
Loin de leurs cliquetis d’armes vainqueurs.

J’ai ma carte, et je persiste et je signe,
Je suis incurable, je reste dans ma ligne,
Et je garde dans l’oreille,
Juste avant le grand sommeil,
Un violoncelle qui pleure la Mort du cygne.

Ma vie,
Je la choisis,
Je garde les mains vides,
Eux, le fusil !

mardi 26 juillet 2016

LE CHANT DU COMPROMIS


LE CHANT DU COMPROMIS



Version française – LE CHANT DU COMPROMIS (Hymne du Cabaret Cornichon) – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemandeDas lied dem KompromißMax Werner Lenz – 1935

Paroles de Max Werner Lenz (1887-1973), acteur, réalisateur, cabarettiste et auteur suisse
Musique d’Otto Weißert (1903-1969), compositeur et directeur de théâtre allemand.




Cette fois-ci, Lucien l’âne mon ami, je t’amène une vraie rareté, une chanson quasiment introuvable et que j’ai transcrite à partir d’une photographie d’une revue publiée en 1954 à Zurich et qui reprenait des textes du programme du Cabaret Cornichon, à l’occasion de ses vingt ans. Je te rappelle qu’il s’agissait d’un cabaret monté en 1934 en Suisse par des artistes exilés allemands qui fuyaient le nazisme qui empestait leur pays. Cette chanson est en fait en quelque sorte l’hymne du Cabaret Cornichon, qui si j’ai bien compris, était chanté lors de chacune des représentations.

Voilà qui est fort bien, Marco Valdo M.I. mon ami, mais j’imagine que ce devait être un chant en allemand.

Évidemment, Lucien l’âne mon ami, mais en un allemand de cabaret et nullement standard ; peut-être, est une langue ancienne, je veux dire de ce temps-là – milieu des années 30 du siècle dernier ; peut-être aussi, un peu suisse. Bref, je t’en ai fait une version française, mais en quelque sorte au pif. Et si elle est fidèle quant au fond, elle peut parfois s’éloigner du pied de la lettre. Ce qui laisse la porte ouverte à toutes les remarques et corrections que toi ou quelqu’un d’autre voudra suggérer.

Oh, mais c’est déjà très bien ainsi, Marco Valdo M.I. mon ami. Mais j’aimerais quand même quelques mots de cette chanson de résistance de cabaret.


Pour ce qui est de la résistance de cabaret, c’est la manière dont les artistes de cabaret – genre fort développé et florissant à Berlin au temps de la République de Weimar, au temps où régnait là-bas une grande activité artistique et une grande liberté de mœurs – menèrent le combat contre la bête immonde. Après la venue au pouvoir des nazis, nombre de ces artistes ont fui et se sont exilés – en Autriche, en Suisse – pays limitrophes et de langue allemande où ils ont repris leur activité de résistance – souvent dans des conditions difficiles. Quant à la chanson, même si elle est d’une prudence de Sioux et d’une tonalité quasiment diplomatique, elle prend fermement position pour la république et la démocratie. Elle fait, en effet, l’éloge du compromis face aux héroïques postures ; en ce sens, c’est à la fois, une vraie chanson contre la guerre et une chanson de paix. Et le fait de la répéter, soirée de cabaret après soirée de cabaret, était déjà en soi une forme de résistance. Et puis, même en Suisse, en ces années-là, rien n’était sûr et spécialement en Suisse allemande, les pressions nazies étaient considérables.

Tu sais, Marco Valdo M.I. mon ami, comme toi, je comprends combien de courage et de volonté il a fallu à ces cabarettistes militants antinazis pour exercer cette forme de résistance. Imagine aujourd’hui, des artistes d’un pays de dictature, géographiquement proche de l’Europe, qui critiqueraient et dénonceraient le grand Turc tous les soirs et ridiculiseraient l’islamofascisme d’Erdoquoi, d’Erdoqui ? Ces gens-là ne seraient pas en sécurité et les pressions contre eux seraient considérables. C’est juste un exemple. Il en va de même pour tous les exilés qui pratiqueraient semblables activités, même avec une relative prudence. Ce qui me fait dire que nous, qui sommes pour l’instant dans une situation privilégiée, il nous revient de poursuivre inlassablement notre tâche et de tisser, comme ces cabarettistes de l’entre-deux guerres, le linceul de ce vieux monde brutal, héroïque, autoglorificateur, dictatorial et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.





Il y a une forme d’État, qui repose sur le peuple,
Qui aujourd’hui est calomniée dans le monde entier,
Mais en Suisse, elle resplendit dans sa forme la plus haute
Car chez nous, elle confine à l’idéal.
Cette forme d’État, que vous connaissez tous,
On l’appelle la république et on la nomme démocratie.

Démocratie, c’est une chose populaire,
Qui unit la circonspection à la tolérance.
Si nous aussi parfois, nous braillons comme des fous ,
Elle nous unit tous, elle nous élève.
Car chaque désaccord, chaque déchirure profonde,
Sont infailliblement guéris par le compromis entre nous.

Les États qui ne connaissent pas le compromis,
Nous traitent de démocraties méprisables,
Car chez eux un seul règne et commande,
Ils sont admiratifs d’héroïques postures.
Ils mettent un couvercle sur chacune la déchirure,
Car quand on veut être des héros, ainsi vraiment…
Très certainement !


lundi 25 juillet 2016

HOMME SANS PAPIERS


HOMME SANS PAPIERS

Version française – HOMME SANS PAPIERS – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson allemande – Mensch ohne Pass – Max Werner Lenz – 1935
Paroles de Max Werner Lenz (1887-1973), acteur, réalisateur, cabarettiste et auteur suisse
Musique d’Otto Weissert (1903-1969), compositeur et directeur de théâtre allemand.





Cette parodie de salut fasciste 

au Cabaret Cornichon

fut censurée et interdite

en raison des pressions du gouvernement de 

Mussolini.




Max Werner Lenz et Otto Weissert (le second fuit en 1934 en Suisse, car il est marié à une femme juive) furent parmi les fondateurs en 1934 à Zurich du Cabaret Cornichon, un cabaret théâtre qui visait à reproduire les expériences allemandes artistiques qui venaient d’être détruites par la montée au pouvoir du nazisme. Malgré les limitations imposées par la censure et en dépit de la surveillance constante et l’intimidation des services secrets nazis, le Cabaret Cornichon réussit malgré tout à condamner ouvertement fascisme et nazisme.

Le dictionnaire de la Suisse indique : « Le Cornichon fut d’abord un cabaret de divertissement; considéré comme l’une des armes de la défense spirituelle, il attaquait le national-socialisme allemand et le fascisme italien. Surveillé pendant la guerre par les autorités de censure, il s’imposa lui-même des limites si rigoureuses qu’il ne fut l’objet d’aucune sanction officielle. »


Dans cet « Homme sans papiers », Max Werner Lenz critiquait le manque de soutien aux réfugiés du régime hitlérien et, leur persécution de la part des autorités des pays-refuges…
Une chanson très actuelle, vu le traitement que l’Europe encore aujourd’hui réserve aux réfugiés…

Dialogue maïeutique


En griffonnant la version française de cette histoire d’exilé, mille idées et mille autres histoires me trottaient dans la tête. Il y avait Till le Gueux, le Guerrier afghan, l’Arlequin amoureux, Joseph le déserteur et ce marin du Vaisseau des morts de Traven ou ce Schwarz énigmatique de la Nuit de Lisbonne, tous gens errants, exilés en exil. Il y avait aussi tous ces gens qui cherchent refuge et que l’Europe et l’ONU appellent improprement des « réfugiés ». Ah si seulement, ils pouvaient trouver refuge. Mais voilà, on les arrête, on les rejette. Ou on les enferme et qu’en est-il du reste du monde ? HIC ET NUNC ! Aujourd’hui et maintenant ! Vous êtes antifasciste, mais vous vivez en Turquie ? Que faites-vous avant qu’ils ne viennent frapper à la porte, vous arrêter, vous abattre ? Qui voudra vous secourir, vous accueillir, vous donner refuge ? On vous dira que vous venez d’un pays démocratique, qui pratique l’élection (j’ai cru, dit Lucien l’âne que tu allais écrire la masturbation…), qui dit qu’il respecte les droits de l’homme, etc. En plus, vous êtes Kurde ou vous prétendez qu’il y a eu un génocide en Arménie. Certes, vous pourriez être Égyptien, Nigérian, Mauritanien, Algérien ou Chinois. En fait, si vous venez les mains vides, vous serez malvenu… Ne parle-t-on pas déjà de « charges déraisonnables pour un État » à l’Européen qui se trouve en difficulté dans un autre « pays européen ». Ce n’est pas une invention de ma part, c’est le texte de la loi communautaire. C’est arrivé récemment à un Italien, ici, au cœur de l’Europe ; pourtant, lui , il avait des papiers, des droits avant qu’on applique la loi sensée le protéger. Bref, j’arrête là et je laisse parler la chanson. Elle en dit assez.

Oh, je sais, tu as raison, Marco Valdo M.I. mon ami, on aura encore bien l’occasion, de reparler de ces horreurs. Ce sont les traces, les rides quotidiennes de la Guerre de Cent Mille Ans que les riches et les puissants font aux pauvres gens depuis la nuit des temps. Et tout ça pour s’enrichir encore et encore, étendre leur pouvoir, accroître leur domination et nous, tout ce que nous pouvons y faire, c’est de poursuivre autant qu’on le pourra cette tâche et tisser le linceul de ce vieux monde médiocre, méprisant, ridicule et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane


Je suis un exilé, je suis chassé.
Ils m’appellent « cochon d’émigrant ».
Ils disent, tu aurais dû quand même rester !
Je voulais être une personne tout simplement.
Au lieu de hurler « Heil ! », je dis « Bonjour ».
Alors, on m’a menacé de détention, à mon tour.
Mais je n’ai pas vocation au martyre !
Je me suis enfui – d’une détresse dans une autre détresse.
Je suis maintenant un être non déclaré,
Je n’ai pas de papiers.
Je suis et je reste un surnuméraire,
Abhorré des fonctionnaires.

Les États ont des devises admirables !
En France, c’est l’admirable :
« Liberté, égalité, fraternité » ,
La Suisse, c’est réputé :
Ce pays est une terre d’asile.
Mais là, la détention m’attend seule.
Alors, tel que je suis, je suis hors la loi.
Mais là, on est civilisé, on ne me frappe pas,
Me toucher est hors de question,
Mais là, on peut torturer l’âme sans gêne.

Car je suis non déclaré,
Je n’ai pas de papiers.
Je suis et je reste un surnuméraire
Abhorré des fonctionnaires.

Mais là, il y a maintenant des Commissions, j’ai entendu dire,
Elles s’occupent de nous et de notre bien-être ;
Alors ils décident que je ne dérange pas.
Mais là, la décision doit parvenir aux fonctionnaires !
Et pour que les paragraphes deviennent réglementaires,
Cela prend du temps – entre-temps, ça va mal pour moi.
On me chasse en secret vers des frontières étrangères.
Et là, avec la loi et le droit pour moi, je crève.

Comme je suis non déclaré,
Je n’ai pas de papiers.
Alors je reste moi et plus un surnuméraire,
Par-delà la haine et les frontières.

dimanche 24 juillet 2016

Ni gauche, ni centre, ni droite

Ni gauche, ni centre, ni droite




Texte : Henri Tachan (Montluçon, le 16 avril 1976)




Henri (Tachan) et Léo (Ferré)




Quand je suis au micro, ce n’est pas un « meeting ».
Dans mes chansons, crénom, ni messages ni consignes,
Je ne veux pas refaire votre monde, je veux rêver le mien
Et quand je vous raconte mes révoltes, mes chagrins,
Ne vous croyez donc pas obligés d’adhérer ;
Dans mon parti, il n’y a que moi et c’est déjà le merdier!
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Je suis seul sur le « ring »
Avec ma gauche, ma droite,
Sans soigneur ni « doping »,
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Je suis seul sur le « ring »
Avec mon corps qui boite.
La Mort qui me fait signe !

Croyez-moi, ce choix-là n’est pas des plus faciles :
Les moutons de Panurge me traitent d’inutile,
Les miliciens rasés, de révolutionnaire,
Les militants de choc, de rêveur littéraire,
Il n’y a rien qui irrite tant tous les troupeaux honnêtes
Que de ne pas pouvoir me coller d’étiquette !
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Ni blabla, ni béquilles,
Ni rouge, ni blanc, ni noir,
Ni fusil, ni faucille,
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Je suis seul sur le « ring ».
Avec mon corps qui boite
La Mort qui me fait signe !

L’engagement politique, pour moi, c’est comme la foi :
Tu crois en Dieu, Bon Dieu, ou bien tu n’y crois pas.
Je crois parfois en l’homme dans mes moments de fièvre,
Mais dedans mon terrier, mi-sanglier mi-lièvre,
Loin des meutes de chiens, des cors et des clameurs,
Je suis gibier d’abord, vous n’êtes que chasseurs !
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Ni slogans, ni insignes,
Ni rouge, ni blanc, ni noir,
Ni complice, ni consigne,
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Je suis seul sur le « ring »,
Avec mon corps qui boite.
La Mort qui me fait signe!

Voilà onze ans bientôt que je chante « au secours! »,
Que je chante « ma révolte ! », que je chante « mon amour! »
Voilà onze ans bientôt, que d’hivers en automnes,
Je me bats par instinct à côté de ma lionne,
Que je remets cent fois sur le papier l’ouvrage,
Que cent fois sans raison, je refais le voyage !
Ni gauche, ni centre, ni droite,
Je suis seul sur le « ring »
Avec ma gauche, ma droite,
Sans soigneur, ni « doping »,
Ni gauche, ni centre, ni droite.

Je suis seul sur le « ring »,
Avec mon corps qui boite.
La Vie qui me fait signe !