Ami jusqu’à la Mort
Chanson
française – Ami
jusqu’à la Mort
–
Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 64
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXVI)
Ulenspiegel le Gueux – 64
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXVI)
Lamme Goedzak
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Dialogue
Maïeutique
« Ami
jusqu’à la Mort »,
je
pense, Marco
Valdo M.I. mon
ami,
que
tu choisis volontairement des titres aussi énigmatiques. Regarde
celui-ci et son singulier ami au singulier ; moi, j’aurais mis
ami au pluriel.
Évidemment,
Lucien l’âne mon ami, c’est de cette façon que généralement
on présente la chose. Et précisément, c’est pour cette raison
particulière que j’ai mis ami au singulier ; comme tu le
sais, le
pluriel ne vaut rien à l’homme,
car c’est la seule manière d’affirmer que cette devise – Ami
jusqu’à la mort, concerne un seul individu ou plus exactement,
elle se focalise sur l’opinion ou l’attitude d’une seule
personne (même s’il se révèle après coup qu’elle n’est pas
nécessairement univoque et que l’ami en question pense pareil), en
l’occurrence, Lamme Goedzak, l’ami de Till.
Voilà
qui éclaire ce singulier titre, dit Lucien l’âne, mais pas la
chanson. De quoi parle-t-elle véritablement ?
En
fait, Lucien l’âne, cette chanson est une sorte de bilan dressé
par nos deux compères Till et Lamme qui sont ballottés au creux de
la houle absurde de cette guerre de libération qui oppose, je le
rappelle, les populations des Pays-Bas à l’occupant espagnol et à
des affidés et qui oppose aussi la population à la répression
catholique, menée tambours battant par l’Inquisition, à ses
tortionnaires, à ses bûchers et à ses troupes de choc qui ravagent
villes et campagnes. Un bilan général d’abord où il apparaît
que les élites se sont ralliées à l’occupant et collaborent à
la répression ; un bilan personnel ensuite où Lamme et Till
font le point sur leur participation à cette guerre. Comme le révèle
la chanson, Lamme a un tempérament plus réservé que Till et leurs
caractères respectifs sont aussi tranchés que ceux de Don Quichotte
et Sancho, dont je suis persuadé qu’ils sont de lointains
descendants. D’ailleurs, Charles de Coster y avait certainement
pensé quand il donna à Lamme le nom de Goedzak, qui signifie
littéralement bon sac, gros sac, grosse panse tout comme Cervantès
avait nommé Sancho Pança – panse, bedaine.
Oh,
sûrement, dit Lucien l’âne, on pouvait le savoir depuis longtemps
que Lamme n’était pas un foudre de guerre et que Till était plus
audacieux. L’inverse aurait étonné tout le monde et comme toi, je
vois très bien cette filiation littéraire et légendaire de ces
héros en tandem sur des ongulés. Mais, il nous faut reprendre notre
tâche et tisser le linceul de e vieux monde envieux, avide, jaloux
traître et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
« Les
nobles des Pays-Bas – par jalousie,
Le
Taiseux ont trahi et aussi,
Les
confédérés et même, le compromis
Qui
protégeait les libertés dans la patrie.
Il
ne reste, dit Till, que le populaire
Pour
défendre la terre des pères. »
« Et
nous, dit Lamme, on pérégrine
Entre
la corde, la roue, le bûcher et la famine. »
« Oh,
Lamme mon ami, ce n’est qu’un début,
Continuons,
ce combat n’est pas perdu.
Nous
allons avec des florins en nos gibecières,
Bien
lestés de viande, de vin et de bière.
Nous
avons le certificat orné
Du
cachet de cire du curé
Et
nos passes et nos billets de confession
Et
au service du duc par profession,
Nous
vendons des indulgences
Par
ordre exprès d’Albe et en confiance.
Nous
vendons des choses catholiques
Pour
ramener à la Sainte Église, les hérétiques.
Ainsi,
chez les nobles fortunés,
Ainsi,
chez les prospères abbés,
Ainsi,
nous recevons la plus douce hospitalité,
Ainsi,
leurs plans secrets nous sont dévoilés. »
Lamme
dit : « C’est métier d’espions. »
Till
dit : « Par droit et loi de guerre, nous devons ».
L’âne
Jef s’arrête tout net et mange un chardon ;
L’âne
Jean le rejoint et grignote un autre chardon.
« J’ai
mis sur mon drapeau :
Vivre
toujours à la lumière ;
De
cuir est ma peau première ;
D’acier,
ma seconde peau. »
Ainsi
chante Till et ainsi, Lamme répond :
« J’ai
la peau et le cuir bien mous,
Le
moindre coup y ferait un trou
Et
nous courrons par vaux et par monts,
Mais,
loin des crêpes dorées, avec toi,
Till
mon ami, sous les balles de plomb,
Contre
les vilains soudards du roi,
J’irai
à la mort en vrai compagnon. »