QU’EST-CE
QU’ON FOUT NOUS AUTRES
ALLEMANDS EN AFRIQUE ?
Version
française –
QU’EST-CE QU’ON FOUT NOUS AUTRES
ALLEMANDS EN AFRIQUE ? – Marco
Valdo M.I. – 2019
d’après
la version en italo-tedesque – MA
KE CI SI FA A FARE NOIALTRI TETESKI IN AFRIKA? de Rikkardo Fenturi
(2016)
d’une
chanson allemande – Was treiben wir Deutschen in Afrika? –
anonyme – 1898
Texte
d'auteur anonyme à chanter sur la mélodie de la chanson romantique
pour enfants "Es klappert die Mühle am rauschen Bach,
klipp-klapp, klipp-klapp, klipp-klapp, klipp-klapp". Texte
repris dans un "Demokratisches Liederbuch", publié à
Stuttgart en 1898. À chanter sur la mélodie de la chanson
romantique pour enfants "Es klappert die Mühle am rauschen
Bach, klipp-klapp, klipp-klapp, klipp-klapp, klipp-klapp".
Église allemande en pays Herero |
Deutsch-Südwestafrika,
l'Afrique du Sud-Ouest allemande, ainsi fut appelée une partie du
continent africain, qui correspond maintenant plus ou moins à la
Namibie, que l'Empire allemand a considérée comme sa colonie entre
1884 et la fin de la Grande Guerre (1914-18). Ce que les colons et
les soldats allemands firent n'est rien de moins qu'un génocide,
quelques années avant le génocide arménien, communément considéré
comme le premier génocide du XXe siècle. La survie des populations
indigènes des Nama, des Ovambo et surtout des Herero a été
gravement menacée par les soldats du Kaiser sous le commandement du
sanglant général Lothar von Trotha, et elles auraient certainement
disparu si la guerre en Europe n'avait pas été terminée au
détriment des Allemands.
Voir
aussi la chanson Vernichtungsbefehl d'Andries Bezuidenhout,
magistralement traduite en italien et commentée par notre ami
Riccardo Venturi.
Dialogue
Maïeutique
Ce
qui est étonnant avec cette chanson, Lucien l’âne mon ami, c’est
le temps lointain où elle a été imaginée, composée ou écrite –
comme on voudra, et le fait qu’elle soit quand même parvenue
jusqu’à nous. D’abord, à cause du temps passé, de cette
ancienneté, mais aussi à cause de l’éloignement, car comme tu le
sais, la Namibie n’est pas à côté de la porte. Et enfin, même
en Allemagne, le souvenir des colonies (depuis longtemps perdues –
elles furent retirées aux Allemands après la guerre 1914-18) s’est
estompé, a été balayé par d’autres aventures nationales et
d’autres grands massacres.
Oh,
dit Lucien l’âne, l’histoire des vivants est parsemée de grands
massacres volontaires en tous genres, tous plus absurdes les uns que
les autres, même si en finale – jusqu’à présent, la vie finit
par submerger le malheur. Et pour s’en tenir aux humains, ils ont
au cours de leur courte présence au monde, du bref délai où a sévi
leur espèce commis bien des génocides et des ethnocides. On ne les
compte plus, on n’a même plus la mémoire des espèces éradiquées.
Certes,
Lucien l’âne mon ami, tu as raison de le dire, mais c’est là un
autre débat, car la chanson est déjà assez terrifiante : elle
montre des hommes (blancs) opérant le massacre systématique de
populations noires. Cependant, il y eut aussi dans l’histoire de la
plupart des « colonies » d’Afrique, que la traite
négrière fit aussi de terribles chasses à l’homme (femmes et
enfants compris), qu’il y a eu récemment encore de grands
massacres dans certains pays d’Afrique – mettons : Congo,
Rwanda, Burundi ( deux anciennes colonies allemandes), Soudan,
Nigeria, Sahara, etc. ; la liste est sans doute plus longue.
Sans compter ce qui s’est fait en Amérique par les conquérants et
par les empires amérindiens eux-mêmes.
Oui,
dit Lucien l’âne, arrête-toi là, on n’en finirait pas.
Parle-moi un peu de la chanson ;
De
fait, dit Marco Valdo M.I., un peu de précision, car la chanson
dénonce sur le mode parodique la colonisation. Elle fait surgir le
mensonge de la propagande et raconte avec une sorte de réalisme
directe l’aventure africaine, les soubresauts de la
« colonisation-décolonisation ». Dans l’histoire
récente, presque toutes les nations européennes ont eu leur heure
de (dé)gloire ; du moins, celles qui ont eu ou voulu avoir des
colonies. Mais, il fut un temps où un État-nation sérieux se
devait d’avoir des colonies. Pour terminer, je compléterai la
remarque de Riccardo Venturi à propos du mot « Krupp »
qu’il traduit par « angina » (en italien), qui pourrait
être l'« angine » en français, mais aussi : le
« croup » ; j’ajoute que le mot « Kruppe »
en allemand se traduit en français par la « croupe » –
et en italien…
Oh,
dit Lucien l’âne en agitant son arrière-train, en italien, c’est
la « groppa », et maintenant, il faut conclure et tisser le
linceul de ce vieux monde assassin, génocidaire, ethnocide,
missionnaire et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Mais
qu’est-ce qu’on a à foutre
nous autres Allemands en Afrique ?
Oyez ! Oyez !
Oyez ! Oyez !
Nous
allons éradiquer
complètement l’esclavage
Et
dès lors, si un nègre ne veut plus de nous,
Nous
le ferons taire
pour toujours.
Pif,
paf, boum, hourra !
Heureuse
Afrique !
Nous
prêchons le christianisme aux païens.
Oh,
comme nous sommes braves !
Et
ceux qui ne veulent pas croire, nous les zigouillerons !
Paf,
boum !
Heureux
soient les sauvages, car nous leur enseignons
L’amour
chrétien par le feu et l’épée.
Pif,
paf, boum, hourra !
Heureuse
Afrique !
Nous
autres, on est de
courageux missionnaires
Eviva !
Eviva !
La
Croix, le Krupp et le Mauser
La
Sainte Trinité !
Et
nous portons ainsi en Afrique le Saint Nom de Dieu.
Charité !
Feu ! Alléluia !
Pif,
paf, boum, hourra !
Heureuse
Afrique !