FROID
Version
française – FROID – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson
allemande – Kälte
– Erika
Mann – 1933
Poème
d’Erika et Klaus Mann
Musique de Magnus Henning (1904-1995), compositeur et pianiste bavarois
Dans le spectacle de cabaret intitulé « Die Pfeffermühle », « le Moulin à poivre », imaginé par Erika et Klaus Mann, avec la collaboration de Walter Mehring et de Wolfgang Koeppen, et interprété par la même Erika, son amie Therese Giehse et d’autres acteurs et de danseurs (Lotte Goslar, Sybille Schloß, Cilli Wang et Igor Pahlen.)
Musique de Magnus Henning (1904-1995), compositeur et pianiste bavarois
Dans le spectacle de cabaret intitulé « Die Pfeffermühle », « le Moulin à poivre », imaginé par Erika et Klaus Mann, avec la collaboration de Walter Mehring et de Wolfgang Koeppen, et interprété par la même Erika, son amie Therese Giehse et d’autres acteurs et de danseurs (Lotte Goslar, Sybille Schloß, Cilli Wang et Igor Pahlen.)
En
1933, la majeure partie des cabarettistes allemands avait déjà
quitté l’Allemagne. Il fut alors qu’Erika et son frère Klaus –
en guerre ouverte avec l’encombrante figure de leur père Thomas
Mann, jusqu’à ce moment silencieux face au nazisme alors
triomphant – décidèrent de se charger de cette scène littéraire
et théâtrale en extinction et de la proposer de manière
ouvertement anti-nazie.
« Die Pfeffermühle », « le
Moulin à poivre » – nom suggéré justement par Thomas Mann
– débuta le 1 janvier de 1933 dans un petit local de Munich, la
Bonbonnière, pas loin de la brasserie où en 1923, avait débuté
sur la scène politique un jeune peintre triste et médiocre, un
certain Adolf Hitler.
Avec le coup d’État hitlérien après les élections de mars 1933, les Mann furent aussi contraints à l’exil ; d’abord en Suisse, ensuite à Paris, en Grande-Bretagne et enfin, aux USA. Erika risqua sa vie en rentrant dans le courant de 1933 à Munich pour sauver quelques manuscrits de son père. « Le Moulin à poivre » devint « Kabarett de l’exil » et fut présenté ensuite partout où Erika et Klaus furent amenés à vivre.
« Kälte »,
le froid. Ces vers d’Erika Mann – qui sur la scène les récitait
dolente, dans un vêtement blanc de Pierrot – expriment mieux que
tant d’autres le gel qui se propageait à travers l’Allemagne, en
tuant toute forme de vie, et la désolation et le désespoir (dans
beaucoup de cas résolu avec le suicide) de tant d’artistes,
d’écrivains et d’intellectuels allemands – Juifs et non-Juifs
– qui avant même la venue de Hitler au pouvoir furent contraints à
quitter leur pays, car ils étaient empêchés de travailler et de
survivre, poursuivis, insultés et battus par des bandes qui
régulièrement entraient par effraction durant les spectacles, en
ravageant les scènes.
L’anniversaire
des 13 ans d’Erika Mann fut aussi celui de la république (de
Weimar); le jour de ses 18 ans a vu la tentative de coup d’État
dans sa ville, Munich. À trente-trois ans, c’était la
Kristallnacht, la Nuit de Cristal.
Toute
la famille Mann fut privée de la nationalité allemande par les
nazis. En premier, et fier, Heinrich. Ensuite, tous les autres. Y
compris Thomas, qui s’était décidé à prendre une position
politique claire seulement suite aux pressions de sa fille. Ils
continuèrent à s’adresser au peuple allemand et au public
international, résistants exilés et loin de l’Allemagne, à
vingt-huit ans, Erika monte sur scène à Zurich avec son ensemble et
son costume de Pierrot, et introduit le spectacle avec ce morceau ...
Dans
le froid hivernal, l’année était née, –
Il est si tendre, – soyez précautionneux avec l’enfant !
On en a déjà perdu quelques-uns cette année,
Et au jour d’aujourd’hui, le vent est coupant.
Il est si tendre, – soyez précautionneux avec l’enfant !
On en a déjà perdu quelques-uns cette année,
Et au jour d’aujourd’hui, le vent est coupant.
La
neige est bleuâtre dans le froid ascète, –
Pauvres et nus, les arbustes gèlent ;
Deux corbeaux tournent affamés au-dessus d’un champ, –
Un paysan marche pesamment, comme le Géant du mont des Géants.
Pauvres et nus, les arbustes gèlent ;
Deux corbeaux tournent affamés au-dessus d’un champ, –
Un paysan marche pesamment, comme le Géant du mont des Géants.
Pourquoi fait-il si froid ?
Pourquoi le froid glace !
Pourquoi ? Bientôt le monde ne sera
Plus que neige et glace!
Le monde est froid – peu lui importe cependant,
De ceci et de cela qui existent malheureusement.
L’indifférence, ce plus frais des oreillers
Apprécié de tous et très demandé.
Pourquoi avons-nous si froid ?
Pourquoi, – cette glace !
Pourquoi ? Nous ne sommes déjà
Plus que neige et glace!
Participez, – il s’agit de votre terre !
Et vous êtes seul, à avoir tout le pouvoir entier !
Faites qu’il fasse un peu plus chaud
Dans notre dure nuit de cet hiver glacé !
Tout
est empli d’une
froide épouvante
–
Tant que nous ne l’attaquons pas au corps ;
Résistez et combattez et nous verrons alors,
Si les fantômes emporteront cette lutte !
Tant que nous ne l’attaquons pas au corps ;
Résistez et combattez et nous verrons alors,
Si les fantômes emporteront cette lutte !