Le Roi ne rit pas
Chanson
française – Le
Roi ne rit pas
– Marco Valdo M.I.
– 2018
Ulenspiegel le Gueux – 85
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XLI)
Ulenspiegel le Gueux – 85
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XLI)
Dialogue
Maïeutique
Donc,
Lucien l’âne mon ami, Je te remémore ce qui était dit dans notre
dialogue maïeutique à propos de Festins de Carême, la précédente
chanson de la Légende :
« Mais
vois-tu, Lucien l’âne mon ami, il faut lier cette chanson à la
suivante, dont je ne connais pas encore le titre, ni le texte, mais
qui sera le négatif de celle-ci. Lamme incarne le bonhomme et
l’homme bon, aimant la vie et la bombance, mais aussi celui qui ne
fait cette guerre que contraint et forcé et encore, afin d’accéder
à la paix dans les Hauts et Bas Pays et fait contraste avec
Philippe, roi d’Espagne, fauteur de guerre, de religion et de
malheur. Lamme est authentiquement contre la guerre et sa chanson
aussi. »
Tout
comme lorsqu’au début, je veux dire au moment de sa naissance ou à
peu près, Till le (futur) Gueux était
mis en balance avec Philippe le (futur)
Roi, dans la canzone précisément
intitulée : « Till
et Philippe », cette confrontation traçait
l’antagonisme essentiel entre les Pays (Hauts et Bas) et l’occupant
espagnol et son Inquisition, Till apparaissait comme le symbole de la
résistance, de l’engagement volontaire de liberté, ici, dans une
autre confrontation – entre Lamme le
Gueux bedonnant et Philippe le
Roi aigre, Lamme incarne l’autre
facette de la
Guerre de Cent Mille Ans,
celle de la résistance malgré elle, du pacifique contraint
à se muer en guerrier à son corps défendant, par la force des
choses. De façon principale et
préférentielle, a priori, le bonhomme préfère la vie calme et
tranquille, et tel l’ours d’autres légendes du Nord, il ne
s’agite que s’il ne peut faire autrement, que sa dignité et sa
conscience l’en persuadent et
l’y poussent fortement. Souvent cette résistance ne se révèle
que par une forme d’inertie, de lenteur dans l’obéissance, de
candeur dans le raisonnement, ne se dévoile pas, reste
confidentielle et agit clandestinement, parfois même, à l’insu de
son porteur.
Fort
bien, dit Lucien l’âne. Je comprends bien ce parallèle et ce
qu’il exprime, mais, dis-moi, mon ami, au fond que raconte la
canzone.
Comme
le laisse entendre le titre « Le Roi ne rit pas », répond
Marco Valdo M.I., titre qui n’est autre que la rengaine de la
chanson, ce Roi Philippe est un triste sire, dans tous les sens.
C’est un personnage aigre, méchant, absurde, sadique qui ne règne
que par la peur qu’il inspire, même en ses amours.
Souvent
d’ailleurs, je me demande, Marco Valdo M.I., comment les hommes, je
veux dire les humains, peuvent volontairement obéir à de tels êtres
et comment ils ne les ignorent tout simplement pas, les laissant
ainsi à leur bêtise et à leur rancœur et je ne pense pas qu’à
ce roi Philippe qui ne pleure pas plus qu’il ne rit.
Une
fois encore, cet illuminé, qu’il eût mieux valu enfermer dès sa
prime jeunesse quand il torturait la
jeune Guenon, ce furieux torture des animaux avec
raffinement, plaisir et malsaine délectation, précise Marco Valdo
M.I. Il met au supplice du feu les mulots et les souris, il joue du
clavecin à chats. Ce dément aurait mérité que s’accomplisse la
vengeance que Georges Brassens imagine dans son Testament :
« Mais
que jamais – mort de mon âme !,
Jamais il ne fouette mes chats.
Quoique je n’aie pas un atome,
Une ombre de méchanceté,
S’il fouette mes chats, il y a un fantôme
Qui viendra le persécuter. »
Jamais il ne fouette mes chats.
Quoique je n’aie pas un atome,
Une ombre de méchanceté,
S’il fouette mes chats, il y a un fantôme
Qui viendra le persécuter. »
Quelle
différence avec le bon Lamme et l’intrépide et honnête Till !,
dit Lucien l’âne. Encore une fois, comment les humains peuvent-ils
tolérer ça ? D’autant qu’un tel signe de décrépitude
morale est le reflet du caractère profond de cet ignoble et du
danger potentiel et dans le cas de ce Roi Philippe et des autres du
même acabit, du danger réel qu’il fait courir à ses
contemporains. La torture de la Guenon hérétique s’est traduite
au fil du temps par des milliers de morts d’hérétiques. Mais,
ce qui peut quelque peu rassurer et laisser un peu de vie à
certains d’entre nous, c’est que ces cinglés, je veux dire les
hommes de pouvoir, n’ont qu’une action marginale et ne peuvent
toucher directement qu’une très petite partie des milliards de
gens, qui échappent ainsi à leurs pénibles manigances. La dernière
guerre mondiale fit des dizaines de millions de victimes, après
quoi, la population est passée de grosso
modo, un milliard à sept milliards et demi à présent. La-dite
guerre fit environ 60 000 000 de morts, ce qui est
largement inférieur à l’accroissement annuel de 90 000 000
que l’on connaît à présent. Il n’empêche que ces tortures,
ces massacres, ces assassinats sont d’authentiques saloperies et
qu’il conviendrait de refuser d’obéir à ceux qui les promeuvent
et les décident. Quant à nous, reprenons notre tâche et tissons le
linceul de ce vieux monde furieux, dément, débile, pervers et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Manger
trop de chocolat
Donne
la colique.
La
pâtisserie rend le Roi
Philippe
mélancolique.
Quand
il broie du noir,
Philippe
joue du clavecin vivant,
Une
caisse avec des chats en dedans
Où
chaque touche actionne un dard.
Le
dard frappe à chaque note
La
tête d’un chat ;
Chaque
chat chante une note ;
Chaque
note charme l’oreille du Roi.
Douleur
de chat n’émeut pas le Roi :
Philippe
s’amuse des cris des chats,
Il
joue cette sonate à sept voix,
Mais
Philippe ne rit pas.
Philippe
est plus catholique
Que
le Pape et l’Italie ;
Sur
le trône d’Albion, fin politique,
Au
lieu d’Élisabeth, il veut Marie.
Deux
assassins vont là-bas
Sur
les ordres du Roi.
Élisabeth
les pend à son grand mat,
Mais
Philippe ne rit pas.
Philippe
se voit roi d’Angleterre,
Puis
maître de toute la Terre,
Pour
la foi, exterminer les réformés
Et
des biens des victimes être l’héritier.
Philippe
aime beaucoup la torture ;
Il
fait chauffer en une boîte en fer
Des
souris, des mulots, de pauvres créatures
Sans
défense, elles ne savent que faire.
Elles
crient, geignent, gémissent,
Courent,
sautent, mais n’en sortent pas.
Les
bestioles cuites meurent,
Mais
Philippe ne rit pas.
Have,
pâle, blême, tout tremblant,
Il
s’en va triste amant
Dans
le lit de celle qui craint le Roi,
Mais
ne l’aime pas.