mercredi 31 octobre 2018

Le Marié malgré lui


Le Marié malgré lui

Chanson française – Le Mariage malgré lui – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
103
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
IV, VII)



Le Marié malgré lui

Chanson française – Le Mariage malgré lui – Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux –
103
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel –
IV, VII)



Dialogue Maïeutique

Le Marié malgré lui, dit Lucien l’âne, voilà un titre qui me rappelle une pièce de théâtre que j’ai dû voir il y a bien longtemps, quelque temps après le temps de Till. Ainsi donc, Till va se marier, qu’est-ce qui a bien pu lui prendre ? En voilà une aventure qu’on n’attendait pas ; du moins, pas ici en plein milieu de cette guerre qui n’en finit pas. Qu’il se marie un jour, la chose était prévisible et même, on peut présager de l’élue. Bref, on s’y attendait depuis longtemps ; justement depuis qu’il fréquentait sa jeune amie ; peut-être, même avant. C’était, comme qui dirait, écrit dans le vent. D’ailleurs, si ma mémoire d’âne est bonne, il s’est déjà marié une fois, mais c’était pour du beurre, comme on disait quand enfants, on jouait à jouer la vraie vie.

C’est bien comme ça, Lucien l’âne mon ami, que va se produire cet événement : de manière tout à fait impromptue. Till va se marier, mais en quelque sorte par accident et comme tu le dis, au moment où il s’y attend le moins. Et nous aussi, d’ailleurs. Mais il fallait bien qu’à un certain moment, il se marie ; il ne pouvait quand même pas attendre la fin de la guerre. Remarque bien que son mariage sera une tribulation de cette interminable guerre et si cette guerre est interminable, c’est qu’elle dure quatre-vingts ans, une vie d’homme en somme et que la Légende est précisément l’histoire de cette guerre et de comment en faire advenir la libération de l’occupation espagnole avec tous les massacres et les inconvénients qu’elle comporte. Pour en revenir au titre et à ce « marié malgré lui », il faut comprendre que si sans aucun doute possible, Till était destiné à épouser Nelle et Nelle à épouser Till – ce qui était écrit dans les étoiles déjà du temps de Nabuchodonosor, nul n’avait imaginé des noces aussi soudaines, aussi abruptes et aussi expéditives.

Ah oui, dit Lucien l’âne, depuis le temps que duraient les fiançailles et puis, si loin de Damme, quelle histoire ! Mais, dis-moi, au juste, quelles ont les circonstances de ce mariage soudain ? Comment Till en est-il arrivé là ?

Eh bien, Lucien l’âne mon ami, lors de la prise de Gorcum, Till avait reproché au capitaine Marin de ne pas respecter l’accord conclu lors de la capitulation de la ville, à savoir que les assiégés ne seraient pas inquiétés et qu’ils pouvaient en toute liberté s’en aller. 19 religieux catholiques avaient été arrêtés et Till avait protesté contre ce reniement de la parole donnée. Les religieux avaient été réclamés par le Sire de Lumey, grand amiral, Till avait été chargé de les amener à La Brielle ; là aussi, face au Sire de Lumey, Till prit leur défense en répétant : Parole de soldat est parole d’or. Souviens-toi, il dit aussi :

« La libre conscience est notre trésor
Et le prince de liberté a parole d’or
De celui qui se rend sans détour,
On respecte la personne toujours. »

Néanmoins, le Sire de Lumey fait pendre les moines en leur prison et exige que Till, s’il ne veut ne pas être pendu lui-même, reviennent sur ses accusations et déclare que Lumey avait raison d’arrêter et tuer les religieux. Till refuse, il doit donc être pendu.
On dresse la potence sur la Grand Place de la ville. Le reste est dit dans la chanson et tu découvriras là comment et avec qui Till s’est marié et pour quelle raison il l’a fait à ce moment.

Oui, dit Lucien l’âne, tu as bien fait d’arrêter là et de ne rien dire de la suite. On la découvrira avec la chanson. Ensuite, tissons le linceul de ce vieux monde parjure, menteur, lâche, malhonnête, imbécile et cacochyme.

Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Une barque emmène droit à la mort
Les dix-neuf moines à Gorcum arrêtés.
Till leur dit : « Si je peux, je vous sauverai :
Parole de soldat est parole d’or. »

Plus tard, les dix-neuf religieux pendus,
Sire de Lumey, grand amiral des Gueux,
Fit venir Till pour être entendu
Et lui dit : « Tu mourras comme eux. »

« Parole de soldat n’est plus parole d’or,
Répond Ulenspiegel, je suis ton prisonnier.
Tu peux me faire pendre à ton grand hunier,
Mais de les assassiner ainsi, tu as eu tort. »

« Soldat, demande pardon ou tu es mort. »
« Je ne lèche pas des bottes sans conscience.
Je ne le ferai pas, parole d’or. »
« Parole de chanvre, qu’on le mène à la potence ! »

On dresse les fourches au Grand-Marché.
Ainsi, la ville consternée apprend
Qu’on va pendre sans justice et sans pitié
Till le Gueux, Till l’esprit libre et vaillant.


Sire de Lumey, avec sa garde et cuirassé,
Vient à cheval par lui-même s’assurer
De l’exécution de celui qu’il a condamné.
Sur la place, le peuple se presse courroucé.

Till est déjà sur l’échelle de la mort,
En son linge, bras liés au corps,
Mains jointes et corde au cou,
Contemple la foule de son air doux.

À l’instant où va basculer la vie,
Tout de blanc fleurie, une jeune fille
Au pied du gibet surgit et pousse un cri :
« Cet homme est le mien, je le prends pour mari ! »

« Vive la fille qui sauve la vie ! Vive la pucelle ! »
Les us et coutumes d’ici font défense
De pendre un homme qu’une demoiselle
Veut prendre pour époux au pied de la potence.

« Il doit l’épouser, vive la mariée ! Vive la Belle ! »
Et l’amiral Trèslong demande : « Qui est-elle ? »
« C’est mon aimée, dit Till, c’est mon éternelle. »
« Moi fifre et Till soldat, nous embarquons avec toi », dit Nelle.