mercredi 16 août 2017

Fanny

Fanny

Chanson française – Fanny – Marco Valdo M.I. – 2017






Voici, Lucien l’âne mon ami, un portrait de femme, une femme telle qu’elle est vue par un de ses soupirants, un de ses anciens amants, peut-être ; ou simplement, une femme telle qu’un certains hommes dans certaines conditions peuvent la rêver. Un songe, une idée, un idéal, une idéale. Évidemment, on se demande si de ce portrait, on tire le portrait d’une certaine femme ou celui d’un certain genre de femme.

Moi, à le lire, je me demande, s’il est vraiment possible que de telles personnes existent chez les humains, demande Lucien l’âne un peu interloqué. D’un autre côté, il est vrai que j’ai entendu dire qu’il existait des ânesses très calmes et très rondes et douces et assez nonchalantes et pour tout dire, passives ou placides. Je dois pourtant à la vérité de dire que moi, les ânesses, je ne les fréquente pas beaucoup ; je ne sais trop quoi leur dire et elles ne me disent de toute façon, rien. Mais alors là, rien du tout. Il faut dire aussi que je suis un âne un peu particulier et d’un âge outrageusement canonique et même, au-delà de ces saintes normes. Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, excuse-moi, je t’ai interrompu.

Ce n’est pas bien grave, Lucien l’âne mon ami, car, comme tu le sais, nous avons tout le temps. Pour ce qui est de cette femme qui s’appelle Fanny, je ne pourrais te dire grand-chose d’autre que ce qui est dit dans la chanson. Cependant, malgré son extrême sobriété, on peut tirer plus qu’on l’imagine de ce petit texte. Ainsi, en apparence, le physique, le mental et la psychologie de Fanny vont de pair. Est-ce l’un qui entraîne l’autre ? Ou l’inverse ? Ou une symbiose ?

Pour répondre à cette question, Marco Valdo M.I. mon ami, il faudrait probablement pouvoir remonter à son enfance et connaître également sa vie, sa famille, les lieux où elle a vécu, etc. Il y faudrait tout un roman, une chanson comme celle-ci ne pourrait y suffire.

Effectivement, Lucien l’âne mon ami, c’est pour cela que la chanson a cette forme caricaturale. Et puis, il n’est pas sûr que cette Fanny-là existe ; elle pourrait être une poupée, une marionnette.

Peut-être, Marco Valdo M.I. mon ami, est-elle un rêve, un fantasme, une obsession. N’est-ce pas le genre de rêve, de personnage imaginaire qu’un prisonnier longtemps tenu à l’écart de la vie réelle avec ses rencontres, ses relations, ses contacts et tout son univers de sensations, de sensualités, de sentiments, d’émotions et d’envies pourrait poursuivre des heures, des nuits, des jours entiers ?

Évidemment, Lucien l’âne mon ami, qu’un homme longtemps privé de contacts et de relations affectives et mis dans l’impossibilité d’en avoir, se met à compenser ce manque en puisant des éléments dans ses souvenirs, dans ses affects anciens, dans ses moments passés pour se construire à l’aide de ces matériaux dématérialisés, de ces bribes et morceaux de réel enfui, d’immatériel et d’intangible, un monde fantasmé.

On dirait, Marco Valdo M.I. mon ami, que tu décris la façon dont un croyant édifie un paradis, dont il se construit un Dieu et toutes les imaginations qui l’accompagnent.

On dirait, Lucien l’âne mon ami, mais finalement, c’est assez juste et c’est ainsi que l’homme, apeuré par le vide ou la taille incommensurable de l’univers qui l’entoure, peuple le monde de créatures fantomatiques. Elles n’ont sans doute d’autre réalité que son imaginaire et servent à donner une forme à ses peurs. Pour en revenir à Fanny et à sa passivité, on ne trouve de curieux exemplaires dans notre monde actuel ; j’ai vu passer dans la presse récemment l’histoire de ce Japonais, citoyen du pays du Soleil Levant, qui s’était mis en ménage avec une poupée à taille humaine et l’emmenait pique-niquer les dimanches d’été ; par ailleurs, on annonce pour bientôt les femmes-robots, les robots-femmes ou les robotes (on trouvera également l’équivalent mâle), conçues pour tenir compagnie et chérir ces messieurs (ou ces dames).

Où donc s’arrêtera le flot de l’amour ?, dit Lucien l’âne en souriant de toutes ses grandes dents. Mais de ce fait, notre Fanny est un modèle, une anticipation, un prototype. Et finalement, pourquoi pas, si ça peut désennuyer et désangoisser ceux qui s’y attachent, grand bien leur fasse. Quant à nous, nous avons assez de notre tâche et alors, reprenons-la et tissons le linceul de ce vieux monde aphasique, aboulique, apeuré et cacochyme.

Heureusement !

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane





Je l’ai trouvée
Et maintenant
Je l’ai perdue
Fanny


Fanny est une femme
Merveilleuse
Elle est elle
Énorme
Toute blanche
Tendre
Accueillante
D’une passivité
Absolue


Je l’ai trouvée
Et maintenant
Je l’ai perdue
Fanny


Fanny reste muette
Elle ne bouge pas
Elle se laisse embrasser
Et
T’engloutit
Elle prend tout
Fanny
Merveilleuse Fanny
Bien et mal
Avec son grand
Corps blanc
Plein
De mamelles
Elle t’engloutit
Elle se laisse embrasser


Je l’ai trouvée
Et maintenant
Je l’ai perdue
Fanny
Fanny est une femme
Merveilleuse
Elle est elle
Énorme
Toute blanche
Tendre
Accueillante
D’une passivité
Absolue


Je l’ai trouvée
Et maintenant
Je l’ai perdue
Fanny
Fanny passivité.