Espagne
1937
Chanson
française – Marco Valdo M.I. – 2017
Voici,
Lucien l’âne mon ami, une nouvelle chanson qui s’intitule
Espagne1937. Elle fait suite, dans une très courte série, à celle
que j’avais intitulée « La
Maison des Morts
» (on trouvera là un complément à ce commentaire). Comme cette
première chanson, elle est tirée du récit d’Arthur Koestler qui
relatait sa terrible mésaventure espagnole et son destin d’otage,
de prisonnier politique et de condamné à mort dans la partie de
l’Espagne aux mains des putschistes franquistes, alors qu’A.K.
était à Malaga comme envoyé d’un journal libéral britannique.
Condamné
à mort sans procès, il est détenu dans la prison de Séville.
« Ce
que j’ignorais, c’est que la cour martiale de Malaga avait déjà
prononcé ma condamnation à mort sans m’avoir auparavant cité à
comparaître. La seconde chose que je ne savais pas, c’était qu’à
ce jour – samedi 13 février 1937 – cinq mille hommes avaient été
exécutés à Malaga depuis la chute de la ville ;
dont six cents pour ma seule prison. »
Il
échappe à son exécution, après plusieurs mois de prison, sous les
pressions du gouvernement britannique et suite à un échange de
prisonniers (on l’échange contre l’épouse d’un haut
responsable franquiste), opéré à la frontière entre l’Espagne
et Gibraltar.
Je
me souviens très bien, Marco Valdo M.I. mon ami, de cette Maison des
Morts (la prison de Séville) et du commentaire introductif,
autrement dit de notre dialogue maïeutique à son sujet.
Cette
canzone-ci, Lucien l’âne mon ami, est elle-même un dialogue,
quoique tronqué. Un dialogue entre
un franquiste qui justifie le putsch militaire et sa devise
arrogante : « España
¡Una, Grande y Libre ! », son régime réactionnaire et
clérical et l’idéologie simple qui y fleurit, d’une part et
d’autre part,
son auditeur forcé, qui compte tenu de son statut de prisonnier ne
peut laisser deviner sa pensée que par des questions. Enfin, je te
laisse apprécier la chose.
Ah,
Marco Valdo
M.I., méfions-nous de la simplicité de
raisonnement,
qui
laisse toujours présager qu’on nous prend pour
des « simples d’esprit ». À y regarder de plus près,
je trouve que cette histoire peut encore servir à comprendre ce qui
guide certaines gens au pouvoir aujourd’hui ; cette simplicité
politique me rappelle celle du discours de certains dirigeants de
grands pays d’aujourd’hui. À mon sens, il faudrait replacer ces
discours dans le cadre de la Guerre
de Cent Mille Ans que
les riches (en ayant l’air de rien et de revendiquer la paix
sociale) font aux pauvres pour asseoir leur pouvoir et protéger
leurs intérêts et leurs privilèges, généralement connus sous le
nom de l’« ordre établi ». En somme, comme la plupart
de tes canzones, on trouve au-delà de ce qui est raconté une
parabole d’un usage plus général. Mais, reprenons notre tâche et
tissons le linceul de ce vieux monde monotone, simple, conservateur,
réactionnaire et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Où
allons-nous, monsieur ?
Dans
une autre ville
Là,
tous les gens sont heureux
Quoi ?
Tous
heureux !
Tous
les gens sont heureux et libres.
Quoi ?
Libres !
Expliquez-moi.
Chez
nous, en Espagne –
Une,
grande, libre,
Les
choses sont comme ça.
Chez
nous, les pauvres
Ne
luttent pas contre les riches ;
Nous
avons un autre système.
Ici,
on n’est pas riche ou pauvre,
Mais
seulement bon ou méchant.
Voyez
donc, c’est évident !
Les
bons pauvres et les bons riches
Forment
un parti.
Les
mauvais pauvres et les mauvais riches,
L’autre
parti.
Comment
les distinguer ?
Ici,
on ne réfléchit pas beaucoup.
Comment
les distinguer ?
C’est
facile comme tout :
Chez
nous, en Espagne – Una,
grande, libre,
Dans
notre parti, on reste entre soi.
Les
bons riches avec les bons riches
Les
bons pauvres avec les bons pauvres.
Dans
l’autre parti, c’est aussi comme ça.
Riche
ou pauvre, chacun reste chez soi.
Les
riches par ici,
Les
pauvres par là.
On
n’est pas ennemis.
On
ne se connaît même pas.
Les
bons vont à l’église et saluent le roi.
Les
mauvais crient vive la République et ne prient pas.
Chez
nous, en Espagne –
Una,
grande, libre.
Oh,
vous savez quoi ?
Dans
tous les pays, c’est comme ça.