LA GUERRE AUX VIEILLARDS
Version
française – LA GUERRE AUX VIEILLARDS – Marco Valdo M.I. – 2017
Récitatif
Le
siècle que nous avons derrière nous est le Vingtième Siècle. Un
siècle de sang, de mort, de sueur, de larmes. De douleur.
Il
y eut la première
guerre mondiale, quelques
millions de morts
dans une connerie.
Avant, il y avait
eu la guerre de Libye.
Et ensuite, la guerre civile espagnole :
trois années où
les hommes se sont tués comme des bêtes féroces. La guerre
d’Afrique. Et finalement, la seconde guerre mondiale. CINQUANTE
MILLIONS DE MORTS. Vingt millions
rien qu’en
Russie. Six
millions de Juifs
: l’holocauste. Hiroshima. CENT QUARANTE
MILLE MORTS CE MATIN-LÀ.
Nonante mille
morts à Nagasaki. Le jour où
sont débarqués les alliés, les Américains
en Normandie, le
D-DAY. Sauvez le
soldat Ryan. En ce seul jour : TROIS
MILLE MORTS. LÀ, SUR LA PLAGE.
Je
suis un ex-colonel du Génie. Je suis un
génie. On m’appelle
Eugène. Je suis
au repos, mais je ne me repose jamais. Je cogito ergo sum. Je pense.
Et l’autre nuit, j’ai pensé. Une
idée géniale m’est venue qui fera de
moi un des hommes les plus
célèbres après Einstein. Ils me donneront le prix Nobel pour la
paix. J’irai aux Nations Unies exposer mon plan. Une bêtise.
Un œuf de
Colomb. Ça
suffit ces guerres où nous envoyons tuer
et se faire tuer ces jeunes dix-huit, vingt
ans pour enrichir des pétroliers
ou des banquiers
internationaux.
Dorénavant les guerres seront faites par
les vieux !
Ces
vieillards que
vous abandonnez dans les
jardins publics
en compagnie des
chiens, des chats
et d’autres
animaux pour aller faire un
voyage dans
le monde l’été, dorénavant… un coup
de pied au
cul !
Les
vieilles nous les mettrons
toutes à la
Croix Rouge. Nous
les ferons marner
ces vieillardes,
putain !
Allez,
la vieille, à
la Croix
Rouge !
« Ils tirent sur la Croix Rouge ! »
« On s’en fout ! »C’est dans l’ordre des choses. Nous irons dans les hôpitaux, nous irons dans les hospices, partout. Tous les malades en phase terminale : tous kamikazes !
« Mais je suis mal ! »
« Putain, on s’en fout, tu dois mourir, et putain con ! Quelle euthanasie, euthanasie mon cul !
« Ils tirent sur la Croix Rouge ! »
« On s’en fout ! »C’est dans l’ordre des choses. Nous irons dans les hôpitaux, nous irons dans les hospices, partout. Tous les malades en phase terminale : tous kamikazes !
« Mais je suis mal ! »
« Putain, on s’en fout, tu dois mourir, et putain con ! Quelle euthanasie, euthanasie mon cul !
Quoi,
vous voulez faire mourir votre
petit-fils, qui y
a dix-huit- vingt ans ?
Allez vous faire enculer ! »
Il
vaut mieux mourir d’un
coup sur la
tête, d’une
balle dans la tête,
que mourir sans couilles
: dans un hôpital
là, intubé comme un serpent après des mois de souffrances.
Monsieur
Marinetti, le futuriste, disait « Les
guerres, c’est
la hygiène de l’humanité ». Une vilaine
phrase, elle ne
m’a
jamais plu. Mais
peut-être dans ce cas, elle
pourrait quand même
faire bon usage.
Première
ligne :
« Tirez ! »
« Et sur quoi, je tire ? Je ne vois pas à deux mètres ! J’ai la cataracte. Et vous voulez que je tire ? ! ? ! »
« Alors, lancez une grenade ! »
« OUI, bonne chance ! La grenade… j’ai l’épaule ici que je ne peux pas bouger… Allez vous faire lanlaire ! »
« Mais que faites-vous ? Vous vous chiez dans le froc ? Vous avez peur ? »
« Mais quelle peur, je n’ai pas peur ! J’ai passé quatre-vingts ans, bordel ! De temps en temps, je chie dans mon froc ! Et quoi, vous ne le savez pas ? »
« Tirez ! »
« Et sur quoi, je tire ? Je ne vois pas à deux mètres ! J’ai la cataracte. Et vous voulez que je tire ? ! ? ! »
« Alors, lancez une grenade ! »
« OUI, bonne chance ! La grenade… j’ai l’épaule ici que je ne peux pas bouger… Allez vous faire lanlaire ! »
« Mais que faites-vous ? Vous vous chiez dans le froc ? Vous avez peur ? »
« Mais quelle peur, je n’ai pas peur ! J’ai passé quatre-vingts ans, bordel ! De temps en temps, je chie dans mon froc ! Et quoi, vous ne le savez pas ? »
« Achtung
achtung ! Un instant ! Frères, ennemis que faisons-nous
ici, que sommes-nous en train de faire ?
Traduisez un
peu !
Achtung !
Ah… À
quoi joue-t-on ici ?
Nous avons réussi à arriver à nos
quatre-vingts ans
et on va se massacrer comme un tas de
cons ? On
vous aime bien frères !
Venez ici que nous fassions la
paix, embrassons-nous ! »
« Vous
connaissez la dernière ? »
« Que s’est-il passé ? »
« Ils ont pris trois otages italiens. »
« Ah les pauvres garçons… »
« Mais quels garçons ? Ils ont septante, quatre-vingts, nonante ans… Tout le monde s’en fout ! Et ensuite, même s’ils les renvoient ces otages, nous, savez-vous ce que nous ferons ? Nous les remettrons à l’hospice ! »
« Que s’est-il passé ? »
« Ils ont pris trois otages italiens. »
« Ah les pauvres garçons… »
« Mais quels garçons ? Ils ont septante, quatre-vingts, nonante ans… Tout le monde s’en fout ! Et ensuite, même s’ils les renvoient ces otages, nous, savez-vous ce que nous ferons ? Nous les remettrons à l’hospice ! »