dimanche 26 avril 2015

LE CROISÉ

LE CROISÉ


Version française – LE CROISÉ – Marco Valdo M.I. - 2015
Chanson italienne – Il crociato – Joe Fallisi – 2006







En chantant de joie, nous levons la main ;
Pour notre Seigneur, élevons nos prières !
Très pure Vierge et Église de Rome
Nous vous offrons la proie enchaînée maintenant domptée.







Texte inédit envoyé par Joe.
« 
Pour illustrer la barbarie de la conquête et les attitudes particulières de ses acteurs, voilà les réflexions de deux parmi rares critiques blancs contemporains des événements. Le missionnaire dominicain espagnol Bartolomé de Las Casas écrivait dans sa Brevísima relación de la destruyción de las Indias (1552) :

« Ils entraient dans les villages et ne laissaient ni enfants, ni vieux, ni femmes enceintes ou parturientes, si ce n'est après les avoir éventrées et coupées en morceaux. Ils pariaient lequel savait déchirer un homme d'un seul coup de couteau, ou lui coupait la tête d'un coup de pique, ou lui mettait à nu les viscères. Ils arrachaient les petits du sein des mères et leur claquaient la tête sur les roches. D'autres, de dessus leurs épaules, les lançaient dans les fleuves ; ils les embrochaient sur une épée avec leurs mères. Ils élevaient de longs gibets auxquels ils attachaient des groupes de treize personnes, en honneur et référence à notre Rédempteur et ses douze apôtres ; ils y mettaient feu et ils les brûlaient vifs. Les hommes et les nobles, ils les tuaient ainsi : sous les gibets, ils alimentaient un feu ténu, pour qu'ils rendissent l'âme lentement, en des hurlements atroces. J'ai vu toutes les choses que j'ai dites et bien d'autres, innombrables. Ne serait-il pas convenable d'appeler diables ces chrétiens et de confier les Indiens aux diables de l'enfer plutôt qu'aux chrétiens des Indes ? ».

Et, quelques années après, le voyageur italien Girolamo Benzoni dans son Historia del Mondo Nuovo (1565) : « En voyant la manière de vivre et les très grandes cruautés qu'on commettait partout, les Indiens n'ont non seulement jamais voulu admettre que nous soyons chrétiens, mais encore maintenant certains ne veulent pas croire que notre réalité est que nous sommes nés sur la terre et disent ainsi qu' « on a congelé la mer et nourri l'écume et que nous sommes venus sur la terre pour détruire le Monde.Disant que les vents ruinent les maisons, tronquent les arbres et le feu les brûle, mais que ceux-là dévorent tout, consument la terre, forcent les fleuves, ne sont jamais tranquilles, ni au repos, vont toujours en courant d'un côté et de l'autre en cherchant l'or et l'argent, en ne s'en rassasiant jamais ; ensuite, les jouent, font la guerre, se tuent, volent, jurent, renient, ils ne disent jamais le vrai, et sont privés de nos maintiens. Et finalement, ils maudissent la Mer qui a mis dans la terre de si mauvais et de si âpres fils. » (on peut trouver les deux les citations à l'intérieur du cap. II - pp. 33-52 - P. Coppo, Passages. Éléments de critique de l'anthropologie occidentale, I libri dell’Oroboro, Edizioni Colibrì, Milano 1998. Cfr. N. Chomsky, An 501, la conquête continue. L'épopée de l'impérialisme du génocide colonial à nos jours, Gamberetti Editrice, Roma 1993.)

Commettre des massacres abominables au nom du « Rédempteur » et de la « civilisation » était du reste une attitude avec de solides racines chez les chrétiens d'Occident. Il suffit de rappeler, bien avant l'Inquisition, le comportement des croisés dans le victorieux assaut de Jérusalem de 1099 : «  Une fois une brèche faite, les croisés purent monter l'escalier d'assaut et entrer par effraction dans Jérusalem. Les portes furent ouvertes, et les chrétiens s'essaimèrent au cri de « Dieu le veut, Dieu nous aide ! » dans les rues. Et commença l'horrible massacre des fugitifs :

« Les nôtres les poursuivirent de près, en les tuant à coups d'épée, jusqu'au temple de Salomon, où ils firent un tel massacre qu'on pataugeait dans le sang jusqu'aux chevilles. Pas une maison ne fut épargnée. Le simple meurtre de vieux, de femmes et d'enfants ne leur suffisait pas . Pour cela, certains furent forcés de se jeter des tours, d'autres furent jetés des fenêtres pour que la rupture de l'os du cou leur donne une mort lente ; et les enfants furent arrachés du sein maternel et lancés contre des murs et des poutres pour en faire jaillir le cerveau. Certains, enfin, furent rôtis à feu lent, à d'autres, ils ont déchiré le ventre pour vérifier s'ils avaient avalé de l'or ou des bijoux.

« Ce furent des choses admirables à voir, » trouve le clerc Raimondo d'Agiles. « D' innombrables sarrasins furent décapités , d'autres tués avec les flèches, d'autres flanqués des créneaux des tours, d'autres encore torturés pendant des jours et puis, livrés aux flammes. Les routes étaient couvertes de tas de têtes, de mains et de pieds coupés, et partout il fallait s'ouvrir un passage entre des chevaux morts et des cadavres humains. » Personne n'échappa au massacre. Les Juifs, réfugiés dans la synagogue principale, furent enfermés dedans et tous brûlés.

Entre 40 et 70.000 êtres humains, selon les chroniqueurs, perdirent la vie en un jour de la main des pèlerins venus au nom de la croix. Et un autre chroniqueur écrit : « Personne n'a jamais vu, ni entendu de tel massacre parmi les païens. » Et ce même chroniqueur, ayant fait le relevé des meurtres et des pillages, se hâte d'ajouter : « Dès lors, heureux et pleurant de joie, les nôtres allèrent vénérer la tombe de Notre Sauveur » (J. Lehman, I crociati, Garzanti, Milano 1996, pp. 127-128) Cfr. Historiens arabes des croisades, par F. Gabrieli, Einaudi, Torino 1987 ; . À Maalouf, les croisades vues des Arabe, SIX, Torino 2001 ; Bernard Lewis, What went wrong ? Western impact and Middle Eastern response, Oxford University Press, 2002 ; plus en général, sur le rôle de la chrétienté : http://www.uaar.it/documenti/cultura/numeri/numeri04.html.

On peut lire semblable évocation horrible chez Ludovico Ariosto : «.../leurs destriers nageront jusqu'au ventre/dans le sang humain dans toute la campagne... » (Orlando furioso, III, 55). »
(de J. Fallisi, Maradona e l’emisfero australe, in preparazione)



Nous partîmes de la Lorraine par un froid matin
En selle vers la gloire et le salut divin.
Eustache et Baudouin, mes chers frères
Sous peu nous attendent des jours splendides.
Un fleuve de sang d'infidèles
Lavera les plaies du Christ notre Seigneur,
Jérusalem nous apparaîtra dans sa splendeur,
Nous en enlèverons les murailles pour le Rédempteur !
Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.

De se répandre en ville par les brèches, est venue l'heure,
Nos épées seront féroces comme nos cœurs.
Juifs, musulmans tremblez et implorez,
Le cœur des chevaliers est sans pitié.
Jésus Homme-Dieu, Christ rené, de toi
Notre Condottiere, j'écoute la voix.
Nous sommes les instruments du destin divin,
Du Dieu unique, du droit chemin.
Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.

Oh Sainte Jérusalem en flammes, tu flamboies
Nous exultons de la gloire que tu nous dois.
L'amour chrétien guide notre main
Et ouvre la route à un futur lointain.
Ô Christ de vie mort, tu veux que je donne la mort
Et la mort et encore la mort et toujours plus, la mort.
Christ, avec Christ, du Christ, de Christ
Oh Duce terrible, très saint Christ !
Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.

Arrachez les petits enfants aux seins tremblants ;
Jetez-les en repas aux chiens grondants !
Islam et Mahomet et dieux païens,
Pour vous maudits, il n'y a plus de lendemain.
Égorgez, mes preux, éventrez, pendez ;
De toutes les manières possibles, détruisez !
Brûlez la synagogue, brûlez-les vifs,
Cette race de déicides, ces infâmes Juifs 
Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.

Dans le sang jusqu'aux chevilles, nous marchons vainqueurs ;
Baisse la tête infidèle et puis, meurs !
On n'entend plus une plainte, pas une jérémiade ;
Seul reste le silence du Saint Sépulcre.
En chantant de joie, nous levons la main ;
Pour notre Seigneur, élevons nos prières !
Très pure Vierge et Église de Rome
Nous vous offrons la proie enchaînée maintenant domptée.
Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.

Quand je pense à cette histoire
Et me regarde dans le miroir,
Je vois un monstre, un damné.
Je suis Godefroid le croisé.