mardi 11 janvier 2022

LE MEILLEUR DES MONDES

 

LE MEILLEUR DES MONDES



Version française – LE MEILLEUR DES MONDES – Marco Valdo M.I. – 2022

d’après la traduction italienne de Flavio Poltronieri – VIVO NEL MIGLIORE DEI MONDI

d’une chanson russe

– Живу я в лучшем из мировVladimir Semënovič Vysotskij / Владимир Семёнович Высоцкий1976





LE MEILLEUR DES MONDES

Paul KLEE – 1939







Dialogue maïeutique



Cette fois, Lucien l’âne mon ami, la chanson s’intitule « Le Meilleur des Mondes ».



Hou là, dit Lucien l’âne, quel titre ! Ce doit être une chanson philosophique, un conte utopique ; rien que ce titre est déjà toute une histoire. C’est tout à coup Candide qui sort de la boîte où on l’avait rangé ; Candide et Mademoiselle Cunégonde et le Docteur Pangloss. Pangloss – de toutes les langues, ce pourrait être le saint patron des Chansons contre la Guerre, qui sont aussi optimistes que lui avec leur combat à la Sancho Pança contre les cavaliers de l’Apocalypse. Et puis, Leibniz moqué par Voltaire et puis, et puis, Huxley, lequel renvoie immanquablement à Orwell et aux Cavaliers en retraite de Pratchett. Tout ça se bouscule dans ma mémoire.



Halte, Lucien l’âne mon ami, on n’en demande pas tant et puis, on n’en finirait pas de dévider cet écheveau ; cependant, il y a bien tout ça dans ce titre et bien d’autres choses encore dans la chanson qui chante comme une comptine de Zinovie.



Quoi ?, s’étonne Lucien l’âne. La Zinovie ? Qu’est-ce qu’elle vient faire ici ?



Oh, tout simplement, répond Marco Valdo M.I., c’est que c’est le même pays – métaphoriquement, car la Zinovie (de Zinoviev) et la Russie (de Vysotsky) sont deux mondes parallèles et l’une est très certainement le reflet de l’autre. Ainsi, avec son meilleur des mondes, le poète russe Vysotsky décrit à l’encre ironique le pays dans lequel il vit. Son refrain – qui en gros et à haute voix, voix rocailleuse au ton grinçant du corbeau – dit : tout va bien, tout va bien, alors même qu’on comprend que rien ne va. L’Éden radieux est mité aux entournures et le manteau troué couvre tout le territoire.



En somme, suggère Lucien l’âne, Vysotsky et Zinoviev, même combat !



Certainement, répond Marco Valdo M.I., et chacun à sa manière raconte le réel quotidien et l’histoire vécue en vrai de son monde et sûrement, Vysotsky a raison : c’est le meilleur des mondes – possible – dans la Russie contemporaine.



Eh bien, dit Lucien l’âne, comme on ne peut rien y changer, tissons le linceul de ce vieux monde paradisiaque, optimiste, meilleur, prometteur et cacochyme.





Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane





Je vis dans le meilleur des mondes.

Je n’ai pas besoin d’abri :

La vallée est un refuge, la terre un lit,

Les murs sont la forêt, la tombe est une crevasse,

J’ai la chair de poule.



Je me sens bien ;

Vivre à la campagne, c’est sain.

Il y a au fond de ce trou,

Un silence agréable comme tout.



Pas besoin de bois, le soleil chauffe.

Vous pouvez tous me rendre visite,

Dommage que mon abri n’a pas de toit

Et que dans ce meilleur des mondes,

Il pleut parfois.



Je me sens bien chez moi.

Entrez voir, si vous ne me croyez pas ;

Asseyez-vous et ne vous inquiétez pas ;

Regardez et ne vous réveillez pas.



Tout est bien, tout est noir.

Louez les dieux de ma part.

Je dois serrer ma ceinture d’un quart

Et je pourrais aller à cheval,

Si seulement j’avais un cheval.



Je me sens bien ;

Tous mes soucis ne sont rien.

Moi, de mon ton grinçant,

Je chante trois jours de rang.

Écoutez ainsi mon refrain.



Je vis dans le meilleur des mondes.

Je n’ai pas besoin d’abri…