samedi 21 mars 2015

ENFIN LA GUERRE EST FINIE


ENFIN LA GUERRE EST FINIE

Version française – ENFIN LA GUERRE EST FINIE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Finalmente la guerra è finita – anonimo – ca. 1918/19




Paix, paix, nous sommes revenus






Voici, Lucien l'âne mon ami, une chanson qui donne à réfléchir à certains aspects de la mémoire des guerres. Je te précise tout de suite que je n'ai aucune envie de célébrer les chants guerriers, les hymnes à la nation combattante et autres fariboles, juste bonne pour les chœurs et les fanfares militaires et leurs aficionados nationalistes et guerriers. Je n'en ai pas plus pour les chants patriotards et les litanies aux glorieux vainqueurs – une fois dans un sens, une fois dans l'autre.


C'est donc une chanson qui raconte une autre histoire, une chanson de guerre mais qui ne sacrifie pas au Dieu de la Guerre : Arès ou Mars. Mais dis-moi ce qu'elle a de particulier...


Elle a une double caractéristique : d'une part, c'est une chanson sur une guerre finie, sur une paix renaissante et le héraut qui la chante n'est généralement pas repris au panthéon des héros. Et cela pour diverses raisons. D'abord, il a le très grand tort de ne pas être mort, car généralement, les héros, ceux que l'on classe comme héroïques, la plupart du temps sont morts ou à tout le moins mutilés. Ensuite, et la chose est paradoxale, c'est un vaincu, porteur du masque de la défaite et donc, aux yeux du vainqueur, des vainqueurs, de ses propres compatriotes, il a le grand tort de ne pas pouvoir stimuler les joies de l'exaltation patriotique. Cet étrange personnage, c'est le prisonnier qui revient de ses « grandes vacances », comme disait Ambrière. En plus, d'une certaine manière, c'est devenu un étranger, qui plus est, il est décalé dans le temps. Il revient de loin et surtout, il revient d'avant. Cet étrange personnage, c'est le prisonnier.

En effet, c'est un étrange statut que celui du prisonnier qui revient. Il est dérangeant, on avait pris l'habitude de vivre sans lui, comme s'il était mort. Depuis longtemps, on connaît cette scène du prisonnier qui revient chez lui et qui trouve sa femme mariée à un autre… La chose n'est pas nouvelle.

Curieusement, la chanson qui est une chanson de prisonnier rentrant, mais apparemment pas encore vraiment rentré… est pleine d'optimisme. Il suffit de lire les derniers vers :
Paix, paix, nous sommes revenus
De l'Autriche, de la faim et du bâton
En Italie, civile nation,
Et tes fils ne souffriront jamais plus.

« Ne souffriront jamais plus... », voire ! Pas si simple, il lui faudra se réinsérer dans un monde qui ne l'a pas attendu, mais dans un monde souvent détruit, lui-même en proie à une myriade de difficultés… En plus, le prisonnier a souvent des séquelles qui ne faciliteront rien… et puis, il va découvrir combien la paix est factice dans ce vieux monde qui n'en a pas fini avec cette Guerre de Cent Mille Ans. [[7591]]


Et rien ne dit que dans les temps qui suivent, on ne va pas remettre ça… Et c'est bien ce qui s'est passé. Quant à nous, voyons cette chanson et reprenons notre tâche que nous nous sommes assignée. Allons, tissons le linceul de ce vieux monde guerrier, incorrigible, héroïque et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Finalement la guerre est finie,
L'Europe est exsangue.
Nous sommes rentrés au soleil de l'Italie,
Nous en avons fini de nos souffrances.

Paix, paix, tu nous as ouvert à temps
Le chemin du retour et du soleil de l'Italie,
Et tu nous as libérés de cette harpie,
Qui nous a fait souffrir depuis si longtemps.

Autrichiens, vile race maudite,
Et sans cœur, gens infâmes,
Mais l'Italie se venge par la qualité
De notre martyre de prisonniers.

Aux travaux, vous nous avez forcés,
Pire encore que des esclaves vendus
À pied, affamés et battus,
Sans compassion et sans pitié.

Nous avons vu et plus d'une fois
Cent Italiens au poteau exécré,
La baïonnette sur la poitrine, tout droit
Mais qui bouge, est tué.

Au poteau cruel martyre
Avec les mains liées derrière,
Avec la pointe des pieds en l'air
Le supplice dura deux heures.

En sept jours, un seul pain
Avec une soupe qu'un chien refusera,
Avec nous, vous avez été inhumains,
Pour vous, la haine toujours sera.

Paix, paix, nous sommes revenus
De l'Autriche, de la faim et du bâton
En Italie, civile nation,
Et tes fils ne souffriront jamais plus.