mercredi 6 mai 2015

MARCHE DE LA LIBERTÉ

MARCHE DE LA LIBERTÉ


Version française – MARCHE DE LA LIBERTÉ – Marco Valdo M.I. – 2015
d'après la version espagnole – MARCHA DE LA LIBERTAD d'une
Chanson en polonais – Marsz o WolnościKrystyna Żywulska1944
Texte de Krystyna Żywulska (1914-1992, de son vrai nom Sonia Landau), juive polonaise, originaire de Łódź.
Sur l'air
d'une chanson russe « Moskva mayskaya » de Dmitri & Daniel Pokrass, 1937.






Avec le temps, tu te rappelleras ton cher lit de bois,


Chanson prophétique, composée seulement une semaine avant que, sous la pression des troupes soviétiques, les nazis décident d'évacuer les camps d'Auschwitz, en forçant les prisonniers déjà épuisés à une « Todesmärsche », une marche de la mort en plein hiver (en janvier 1945). Pour beaucoup, ce fut la fin ; pour d'autres, comme Żywulska, ce fut vraiment la marche vers la liberté.

Je suis forcé – pour l'instant - à proposer la version allemande de l'original polonais, que je n'ai pas réussi à trouver à l'exception du fragment « Tańcz, tańcz dziewczyno / władze ci każą, z przyjemną miną / są dziś w humorze panowie śmierci, tańcz… », les seuls vers présents sur le Net.
Après l'invasion allemande, Sonia Landau se retrouva avec sa famille dans le ghetto de Varsovie. Mais en 1942, elle décida de passer à l'action ; elle fuit du ghetto, adopta une identité fausse (Zofia Wiśniewska) dans la « partie arienne » de la ville et rejoignit la Résistance. Capturée en 1943, elle fut identifiée comme prisonnière politique, et pas comme juive, car elle donna de faux renseignements d'identité en assumant le nom qu'ensuite elle conserva de Krystyna Żywulska.

Internée à
Auschwitz-Birkenau (Brzezinka), elle commença à écrire des poèmes qui rapidement, se répandirent de bouche en bouche parmi les prisonniers polonais du camp. Krystyna Żywulska dut littéralement la vie à une de ces poésies, « Apel » (« l'appel »). Un prisonnier de longue date, bien placé, fut frappé par ces vers, en chercha l'auteur et ainsi il sauva presque moribonde Krystyna en la faisant transférer à l'« Effektenkammer kommando », le magasin où ils étaient ramassés les effets personnels confisqués aux nouveaux arrivés. La vie était beaucoup moins dure que celle réservée aux autres prisonniers, forcés d'oeuvrer dans les équipes de travail en plein air. Krystyna Żywulska reprit des forces et put continuer à décrire à la vie et la mort dans le camp au travers de ses poèmes, dont quelques-uns furent mis en musique et représentés au cours d'un cabaret satirique clandestin préparé des prisonniers dans le grand magasin. Un de ceux-ci, composé à la fin de 1944, s'intitulait « Marsz o Wolnosci » (« la marche de la liberté ») et fut entonné par les prisonniers, Żywulska comprise, lorsqu'en février 1945, ils furent forcés à évacuer le camp devant l'imminente arrivée des troupes soviétiques.

Żywulska survécut à cette marche de la mort et dans l'après-guerre, elle créa une famille et continua à écrire des mémoires (« Przeżyłam Oswiecim », « J'ai survécu à Auschwitz »), des poèmes et des chansons (c'était aussi compositrice), dont quelques-unes devinrent populaires en Pologne dans les années 50 et 60. (source :  ”Krystyna Zywulska. The Making of a Satirist and Songwriter in Auschwitz-Birkenau is Discovered Through Camp Mementos., de Barbara Milewski, Assistant Professor of Music au Swarthmore College, Pennsylvania, USA.)






Il est un lieu sur Terre,Ni conte de fées ni rêve,
Sais-tu qu
'il s'y passe
Des choses indignes et macabres ?
Cinq cheminées
rejettent une fuméeComme une espèce de magie noire.
À l'intérieur, le sang à grands jets s'écouleEt crame en un incendie horrible et inimaginable.

Alors, tire tes sabots et ton vêtement à rayures,Relève ta tête rasée, relève-la !
Re
ntre tranquillement chez toi,Avec une chanson joyeuse sur tes lèvres !

Avec le temps, tu te rappelleras ton cher lit de bois,Et comme tous voulaient se battre,Et comme tu livrais des batailles sanglantesPour prendre un bain une fois par mois.
E
t comme durant l'appel, tu restais là, Ravalant tes larmes.
Le kapo du
camp et la GestapoTe rendront visite dans tes rêves, tantôt.

Alors, tire tes sabots et ton vêtement à rayures,Relève ta tête rasée, relève-la !
Re
ntre tranquillement chez toi,Avec une chanson joyeuse sur tes lèvres !

Des « Zugangs », on en a par dessus la tête
De les avoir entendus ici encore et encore,Marre de ces « Lager-ruhe »
E
t de l'orchestre qui joue pour nous-autres.
A
dieu, Auschwitz horrible,
A
dieu, Birkenau terrible,
L'hiver, sur les baraques vides

Seul un vent plaintif souffle.
Alors, tire tes sabots et ton vêtement à rayures,Relève ta tête rasée, relève-la !
Re
ntre tranquillement chez toi,Avec une chanson joyeuse sur tes lèvres !