lundi 1 mars 2021

IL Y AVAIT

 

IL Y AVAIT


Version française – IL Y AVAIT – Marco Valdo M.I. – 2020

Chanson italienne – C’eraUgo Mazzei – 2012







Dialogue maïeutique


« Il y avait », dit Marco Valdo M.I., raconte le rêve ou le cauchemar ou plutôt, le songe épouvanté d’un marin qui se souvient dans ses nuits, qui par intermittences se répètent, du dernier voyage d’un pétrolier sur lequel il avait embarqué à New York et qui filait vers le grand Nord. Le marin et l’équipage faillirent y rester ; le pétrolier y resta, au fond. Je dis tout de suite qu’on ne saura jamais qui était le marin, qui était le capitaine, ni le nom du pétrolier. Peut-être, ce pétrolier (ce marin, ce capitaine également) est-il la mémoire de tant de navires (de marins, de capitaines) qui se sont perdus dans les eaux lointaines ? Qui sait et combien furent-ils ? Victor Hugo (OceanoNox) se posait la même question :


« Oh ! combien de marins, combien de capitaines
Qui sont partis joyeux pour des courses lointaines,
Dans ce morne horizon se sont évanouis !
Combien ont disparu, dure et triste fortune !
Dans une mer sans fond, par une nuit sans lune,
Sous l’aveugle océan à jamais enfouis ! »


Je me disais bien, s’exclame Lucien l’âne, que ça me rappelait quelque chose, cette histoire de marins et de capitaines. De toute façon, « combien ? », on ne le saura jamais et puis, le compte augmente tous les jours. Mais, il y a quand même quand un pétrolier périt en mer que les pétroliers salissent les côtes de leur sang noir et de ce liquide gluant tuent pour un très long temps toute la vie du bord de mer. En plus, ces réservoirs flottants sont des cibles énormes, facilement repérables et des proies de choix dans les guerres, grandes ou petites soient-elles. Sans compter les pirates des mers qui s’en emparent pour les négocier auprès des pirates des terres contre d’incalculables rançons. Ces histoires de pétrole sont de perpétuelles extorsions de fonds.


De fait, dit Marco Valdo M.I., ce sont là des épisodes particulièrement polluants de la Guerre de Cent Mille Ans, vue dans un de ses aspects discret et récurrent. Ces barges gigantissimes que sont les pétroliers sont visées à plusieurs titres : comme transporteurs, comme masse de pétrole, comme maillon essentiel de l’approvisionnement de la civilisation carbonée. Essaye d’imaginer un instant qu’on arrête d’importer le pétrole…


Ce serait un fameux foutoir, dit Lucien l’âne, pire encore qu’une pandémie comme on en connaît une actuellement et puis, il y aurait une de ces guerres. Et si je me souviens bien, ça s’est déjà produit. De l’épouvante partout et puis, il faudrait d’urgence réduire la voilure ; enfin, je veux dire, changer de mode de vie, accéder à une certaine modestie, rationner tout et si ça dure, changer carrément de façon de vivre. À la longue, on s’y ferait à vivre autrement. Moi, par exemple, je m’y ferais sans grandes difficultés ; d’ailleurs, j’ai connu longtemps un monde sans pétrole ; ça ne marchait pas trop mal. Évidemment, il y avait moins de monde et aussi, beaucoup moins de choses. Cependant, y revenir brutalement serait quand même une fameuse épreuve. Cependant, tu as raison, on a connu des guerres pour moins que ça.


Finalement, reprend Marco Valdo M.I., à penser à tout ce grand chambardement (Le grand Chambardement), la catastrophe que raconte la chanson me paraît soudain être une parabole, dotée d’une fin des plus optimiste. Et pourquoi pas ? Personne ne peut présager de ce qui adviendra.


Oui, dit Lucien l’âne, ça laisse de la place au rêve au-delà du cauchemar. Allons, tissons le linceul de ce vieux monde carboné, pétrolisé, militarisé, éruptif, éructant et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane







Dans un pays étranger,

Au-dessus d’un pétrolier,

Il y avait,

Il y avait un nuage sombre,

Le vent soufflait

Et la mer poussait

Et le capitaine dormait encore.


Il y avait

Seulement la peur de se trouver

Sur le pont, intoxiqués

Par cet air obscur et secret,

Cet air qu’on respirait,

Et puis, l’équipage fuyait

Et puis, plongeait.


Souvenez-vous de New York, alors,

Le timonier prit la route vers le nord,

Avec nos rêves fiers.

Avec nos rêves à bord,

On pouvait naviguer sur les mers.


On avait,

On avait la fumée en escorte

Et l’espérance était morte

De retrouver le bon chemin, mais

Peut-être, que si on ouvrait la porte,

On aurait une vie tordue, à jamais.


Souvenez-vous au Cap Horn, on accosta

Et la dame de la pluie dit : « Nenni,

Je n’irai pas avec ces deux bandits »

Et dans la brume, s’envola.


Et on abandonna nos femmes, nos rêves, nos maisons,

Et en mer, pendant les deux ans de ce voyage,

On se fia aux étoiles, aux soupirs et aux horizons

Pour chercher dans nos cœurs leurs visages.

Puis, on sécha nos larmes dans le vent,

On s’empoisonna de pétrole et de plomb

Et on coula dans cet océan.


Il y avait

L’ombre d’un pétrolier

Qui sur la mer dérivait

Vers des fonds étrangers,

Et le vent soufflait,

Le soleil brillait,

Et autour, tout brûlait.


Souvenez-vous, un navire nous sauva,

La mer soudain s’apaisa,

Un rayon de soleil nous illumina.

Je n’oublierai jamais.

Il y avait…