Texte :
Gert Möbius
Musique :
Rio Reiser
HÉRACLITE |
Voici,
Lucien l’âne mon ami, une chanson assez courte et en apparence
assez simple. Mais la réalité apparente est souvent trompeuse.
C’est le cas cette fois avec cette chanson qui relève de
l’épigraphe ; d’ailleurs, elle fut gravée elle aussi, non
dans la pierre, mais dans le vinyle. Elle s’intitule Tout change.
Marco
Valdo M.I. mon ami, tu sais comme moi d’où je viens et combien
longtemps j’ai aprcouru les rives de la mer Égée, celles de
l’Hélespont et d’autres encore aux bords de la Méditerranée,
que les Romains ont appelée Mare nostrum, un propos d’impérialistes
et de colonisateurs. Enfin, soit, passons. D’ailleurs depuis la
plus haute Antiquité, cette « mare nostrum » a toujours
vu sur ses bords fleurir les dictateurs sous les formes et les
apparences les plus diverses. C’est encore le cas aujourd’hui.
Aujourd’hui, les dictateurs ne se veulent plus (provisoirement ?)
empereurs ; ils se proclament présidents. C’est le cas du
côté de la Corne d’Or.
Cela
dit, le titre me paraît être en syntonie avec le Πάντα ῥεῖ
(Tout coule) d’Héraclite et de ce fait, être une proclamation
relative au destin de notre monde, qui a ainsi une histoire et s’en
vient de la plus haute Antiquité, bien avant Lucie et Cro-Magnon,
jusqu’à aujourd’hui sans qu’il y ait autre chose qu’un sens
de consécution, car tel est le sens du monde et il ne pourrait y en
avoir d’autre. Seul ce qui sera peut être changé et ne peut être
univoquement déterminé. Panta rhei, ainsi va le monde, ainsi va la
rivière. Est-ce bien là la philosophie de la canzone?
En
effet, Lucien l’âne mon ami, c’est une chanson philosophique au
plein sens du terme et au-delà, une chanson qui invite à l’action.
Elle est tout à fait dans le sens de son époque et dans celui du
mouvement qui la sous-tend, un mouvement issu de 1968 et qui se
traduisait hors des institutions et des organisations établies;
c’est e qu’on a connu sous le nom de mouvement autonome ou
extra-parlementaire. Un mouvement qui n’est d’ailleurs pas
disparu et qui comme à l’époque déjà se propage par la chanson,
à l’écart et en dehors des structures qui pèsent sur la société,
la contrôlent, la manipulent et au besoin, la censurent.
Pourtant,
dit Lucien l’âne en faisant l’âne pour avoir du foin, la presse
est libre, les médias sont libres – du moins, dans notre partie du
monde.
Libres,
libres, c’est vite dit, répond Marco Valdo M.I. C’est ignorer
qu’ils sont aux mains soit de pouvoirs sous contrôle de l’État
ou de pouvoirs publics – en gros, sous contrôle des milieux
politiques ; soit des groupes financiers qui s’emparent des
moyens de diffusion ou les tiennent par la manne publicitaire. Dans
un cas comme dans l’autre, on comprend immédiatement les limites
de la « liberté » de paroles et d’action des médias,
de la presse, de la radio, de la télévision et même, de ce qui
circule sur le Net et on n’a aucune peine à imaginer le rôle que
ces pouvoirs entendent leur faire jouer vis-à-vis des gens, un
peuple devenu public. Et cette censure, cette main mise impose ses
diktats la plupart du temps de façon implicite. Les médias
comprennent très bien et très vite qu’il serait en effet assez
contre-indiqué de révéler aux gens qu’on les contrôle, les
manipule et les censure. Ce serait découvrir le pot aux roses de la
démocratie. En somme, la démocratie est un peu comme le clavecin,
une démocratie très tempérée.
Parfois
cependant, il y a un responsable qui lâche le morceau, qui dévoile
la supercherie. Ainsi, un ancien dirigeant d’une télévision
française n’a pas pu s’empêcher de dire, en un terrible
lapsus :
« Or
pour qu’un message publicitaire soit perçu, il faut que le cerveau
du téléspectateur soit disponible. Nos émissions ont pour vocation
de le rendre disponible : c’est-à-dire de le divertir, de le
détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons
à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible ».
Dans
le cynisme, on a rarement été aussi loin.
De
même, question de faire avaler tout ça aux gens, jeunes et vieux,
on leur parle du changement, on leur fourgue du changement par
charretées entières.
Comme
l’écrivait Lampedusa : « Tout doit changer pour que
rien ne change ». Comme quoi, tout change sans que rien ne
change tout en faisant croire qu’il y a du nouveau. On maquille –
c’est mieux pour le spectateur – le passé, le présent et même
le futur.
La
chanson aussi parle du changement, appelle à changer le monde et ce
qui la distingue, c’est qu’elle appelle à changer en dehors du
système, en dehors des mantras que marmonnent ses hérauts, de ces
messages liminaires ou subliminaires diffusés par les médias.
Mais
la réalité revient au galop et elle s’impose dès qu’on
commence à la penser simplement, sans fioritures, telle qu’elle
est en dehors des marchands de sable, des dealers d’informations,
des fabricants de menteries. Elle rappelle aussi que le changement ne
peut se faire que dans le réel, qu’il n’est pas une image, qu’il
ne se réduit pas à une apparence (vestimentaire, esthétique,
maquillage) ; on n’est pas ce qu’on paraît, on est ce qu’on
fait (en ce compris, « ne rien faire et refuser de participer à
la mascarade »).
Eh
bien , Marco Valdo M.I. mon ami, même si nous avons l’idée que le
monde dans lequel nous vivons est doté d’une formidable pesanteur
sociale, qu’il est doué d’une faculté extrême d’inertie,
qu’il aime par-dessus tout le changement qui ne change que les
apparences, qu’il apprécie une sorte d’irisation, de voile irisé
qui couvre d’un chatoiement trompeur son immobilité obstinée, et
parce que nous savons tout cela, nous tissons obstinément son
linceul à ce vieillard injuste, inique, avide et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Il
n’y a pas de soleil, quand on ne le voit pas.
Il n’y a pas de vérité, quand on ne la cherche pas.
Il n’y a pas de paix, quand on ne la veut pas.
Il n’y a pas de vérité, quand on ne la cherche pas.
Il n’y a pas de paix, quand on ne la veut pas.
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Un arbre ne peut fleurir, si aucun soleil ne brille.
Il n’y a pas de fleuve, si aucune pluie ne tombe.
Il n’y a pas de vérité, quand on ne la cherche pas.
Il n’y a pas de liberté, quand on ne la prend pas.
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Tout
change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu'on reste seul !
Tout change, quand on change.
Mais on ne peut gagner, tant qu'on reste seul !
Mais on ne peut gagner, tant qu'on reste seul !
Tout change, quand on change.
Mais on ne peut gagner, tant qu'on reste seul !
Tout
change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !
Tout change, quand on le change.
Mais on ne peut gagner, tant qu’on reste seul !