samedi 30 août 2014

GABRIELLE


GABRIELLE



Version française – GABRIELLE – Marco Valdo M.I. – 2012
Chanson italienne – Gabriella – I Gufi – 1964
D'abord dans l'album «  Ma bene, ma bravo ! » des Peos, formation milanaise – pré-Gufi – oubliée, reprise par « Le cabaret des Hiboux » (Cabaret dei Gufi) de l'année suivante.
Écrite par Giampiero “Peo” Borella, Nuccio Ambrosino e Nanni Svampa.





Avec leur habituel style ironique et cynique qui les caractérisait, voici l’énième banderille plantée par les Gufi (Hiboux) dans le flanc des bonnes mœurs, avec l'adhésion qui en découle aux thèses favorables à la contraception et à l'avortement :

Et crac ! La question est grave
Tôt ou tard, elle doit bien finir cette histoire  :
Ou on change le système d'éducation
Ou l'horaire des consultations...
La la la la la la la la la la la la la la…

Thèses qui ne prévaudront que des années plus tard... Je crois qu'on peut tranquillement dire qu'il s'agit là de la première chanson italienne qui affronte ce thème ; une chanson encore aujourd'hui (et pensez alors!) d'une actualité brûlante !




Il était une fois une petite fille
Elle s'appelait Gabrielle
Sa maman la réprimandait chaque soir
« Monte il est tard, il est l'heure de dormir ! »


Comme toutes les enfants en ce monde
Elle rêvait de devenir grande
Et finie la ronde, elle pensait,
« Un jour, quelles choses je ferais... »


Devenue grande, quel désespoir
Tant de choses encore lui échappaient
Par exemple, elle ne comprenait pas
Pourquoi elle ne pouvait pas sortir le soir


Son papa lui n'arrêtait pas de lui dire
« Toi, le soir, non, non tu ne dois pas sortir
La nuit, tu sais, on peut pécher
Et les gens vont vite à murmurer. »


Tous les après-midis, à partir de ce jour-là
Gabrielle sortait deux ou trois heures
S'en allait avec Gaston faire l'amour
Respectant ainsi le conseil de papa.


Mais un triste jour, elle se sentit mal
Et décida d'aller chez un docteur
Spécialisé dans les affaires de cœur
Afin qu'il porte remède à son mal.


Ce docteur malheureusement,
Recevait de nuit seulement
Gabrielle brave et obéissante
Ne pouvait pas se rendre à la visite.


Et crac ! La question est grave
Tôt ou tard, elle doit bien finir cette histoire :
Ou on change le système d'éducation
Ou l'horaire des consultations...
La la la la la la la la la la la la la la…

La Mort Grise

La Mort Grise
Ou
Giacinto, Il Cameriere – Giacinto, Le Serveur

Chanson bilingue – franco-italienne - La Mort Grise ou Giacinto, Il Cameriere – Giacinto, Le Serveur– Marco Valdo M.I. - 2005



Les "camerieri - serveurs" sont les figurants du second plan. 




Giacinto est une canzone leviane, une canzone bilingue – français – italien. Elle est tout droit issue de L'Orologio, un roman hautement poétique et tout aussi hautement politique de Carlo Levi. Cette canzone peut se chanter dans l'une ou l'autre de ces langues ou dans les deux. On peut imaginer une chanteuse ou un chanteur; on peut imaginer de chanter séparément et successivement les deux versions ou les entremêler, comme c'est le cas ici. On peut aussi imaginer un duo italo-français. En somme, il y a beaucoup de possibilités et on peut même se passer de musique. La musique est déjà dans le texte, la musique est dans la poésie.
Giacinto, comme on le verra, a un gros problème dans l'existence et son métier n'arrange rien : il est serveur. Giacinto a les pieds plats; ça n'aide pas...


D'accord, la chose est certainement intéressante, mais quel rapport avec les Chansons contre la Guerre, où caser une pareille chanson ? J'aimerais assez que tu me l'expliques, mon ami Marco Valdo M.I., car moi, je ne connais pas la canzone en question... En fait, il n'y a que toi qui sais...


Peut-être, peut-être, ça dépend... Vois-tu, Lucien l'âne, mon ami, il faut parfois prendre son temps pour dire les choses... C'est comme ça quand on cause. Ce fut aussi comme ça pour cette canzone leviane. J'ai longtemps hésité à la considérer comme une chanson contre la guerre. Et finalement, j'y suis arrivé. Oh, ce n'est pas évident, mais... Giacinto, comme on le verra, a un gros problème dans l'existence et son métier n'arrange rien : il est serveur. Giacinto a les pieds plats; ça n'aide pas...


Bien sûr, mais quand même, ne fais pas trop durer le plaisir, car moi, je voudrais bien connaître cette histoire de Giacinto.


Alors, voilà. Giacinto est un serveur ; un serveur dans un restaurant et, il fait ce métier malgré ses pieds plats. N'en ris pas, l'âne Lucien mon ami, les pieds plats sont une calamité chez les personnes adultes. À tel point qu'ils étaient une cause de réforme du temps du service militaire...


Surtout chez les fantassins, dit Lucien l'âne. On marchait beaucoup dans les rangs militaires en ce temps-là.


Justement, tu mets le doigt – un doigt d'âne bien saboté – sur le point douloureux. Pour te donner une idée, le pied plat, c'est en quelque sorte la fourbure du cheval et bien entendu celle de l'âne. Comme sans doute tu le sais, à force, la fourbure peut conduite à une forme d'abattement de l’animal qui peut arriver à tel point que l’animal ne peut plus se lever.. Et faire pendant des années et sans doute, toute sa vie ou presque le serveur avec des pieds plats, c'est un véritable calvaire. Et pourquoi le fait-il ce métier d'esclave, notre Giacinto ? Tout simplement car il n'a pas le choix... Tout comme le paysan, le mineur, l'ouvrier, le manœuvre, les domestiques... Faut bien qu'il vive.


C'est tout simplement un destin de bête de somme, tout comme celui de l'âne, par exemple, dit Lucien l'âne en opinant des deux oreilles. Tu sais, cet âne qui tourne indéfiniment une meule ou celui que l'on charge comme un baudet... Certes, l'âne a bon dos, mais faut pas exagérer quand même.


De plus, Lucien l'âne mon ami, considère bien ceci : son appellation de « serveur » rappelle furieusement son état, celui de « serf ». Faut voir comment les gens, certaines gens, traitent un serveur. Avec quelle morgue, quelle indifférence, quelle condescendance... Et on le houspille, on le presse, on l'engueule, on le méprise... Mais il n'a pas le choix. Faut bien qu'il vive. Le voilà rabaissé, le voilà amoindri, écrasé... À un tel point que même sa vie intime en est détruite... Et comment se défendre, il n'a même pas cette force collective qu'on peut voir parfois à l’œuvre dans les grandes entreprises, dans les usines, dans les mines et dans les campagnes et qui déborde parfois dans les rues, sur les boulevards, sur les places. Lui, en plus de tout, il est tout seul, tout seul à affronter la vie et l'exploitation qu'on fait de lui et d'elle. Ainsi, la Guerre de Cent Mille Ans s'abat aussi sur ces personnages qui passent souvent inaperçus dans notre société.


Ah, voilà, j'ai compris. Bref, Giacinto endure une souffrance terrible, il meurt au travail, mais lentement, quotidiennement, silencieusement... Appelons-là cette vie de mort, si tu veux bien, Marco Valdo M.I., de la couleur de bien des ânes, la mort grise.


Oui, c'est une bonne façon de l'appeler... La mort grise, celle qu'on ne voit pas dans le brouillard des jours gris. Oh, tu sais, ceux qu'elle frappe, il suffit de lever le regard dans les rues, dans les trains, les bus, les métros, dans les couloirs des grandes administrations, dans les halls des entreprises, dans les magasins... Partout, partout, on la voit gravée dans les visages.


Mais il est temps de conclure et de reprendre notre travail, notre effort, notre tâche, celle que nous faisons pourtant en souriant, en riant, en chantant et tissons le linceul de ce monde triste, gris, terne, épuisant, épuisé et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane






Giacinto
Si precipita incontro
E
Offre
Una seggiola
A
Un tavolo libero
Giacinto fa il cameriere

Giacinto
Se précipite
Et
Offre
Une chaise
A une table libre
Giacinto est serveur

Basso
Piuttosto grassoccio
Viso tondo
Pelle umida
E lucida
Capelli neri
Occhi furbeschi
Piedi piatti
Giacinto
Si precipita incontro
Con piedi piatti
Con piedi piatti

Bas
Plutôt gras
Visage rond
Peau humide
Et
Luisante
Cheveux noirs
Yeux fourbes
Pieds plats
Giacinto
Se précipite
Avec ses pieds plats
Avec ses pieds plats

Giacinto
Nel suo mestiere
Indovina
Valuta
I clienti
Giacinto
Nel suo mestiere
Non c’è male
Fa il cameriere
Nel suo mestiere
Giacinto
Si precipita incontro
Con piedi piatti
Con piedi piatti

Giacinto
Dans son métier
Devine
Évalue
Les clients
Giacinto
Dans son métier
Y a pas de mal
Fait le serveur
Dans son métier
Giacinto
Se précipite
Avec ses pieds plats
Avec ses pieds plats

Giacinto
Il cameriere
Dice che
Le donne
Non gli piacciono
Le donne
Che spavento ! come fare ?
Giacinto
Il cameriere
Dice che
Le donne
Non gli piacciono
Ma quale donna per lui ?
Meglio fare da soli
Giacinto
Si precipita incontro
Alle donne
Con piedi piatti
Con piedi piatti

Giacinto
Le serveur
Dit que
Les femmes
Ne lui plaisent pas
Les femmes
Quelle épouvante ! Comment faire ?


Giacinto
Le serveur
Dit que
Les femmes
Ne lui plaisent pas
Mais quelle femme pour lui ?
Mieux vaut le faire seul


Giacinto
Se précipite
Vers les femmes
Avec ses pieds plats

Avec ses pieds plats

mercredi 27 août 2014

JE SUIS SÛR DE TE REVOIR ENCORE

JE SUIS SÛR DE TE REVOIR ENCORE

Version française – JE SUIS SÛR DE TE REVOIR ENCORE – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanson de langue allemande – Ich weiss bestimmt, ich werd dich wiedersehen !Adolf Strauss – 1943


Poème de Ludwig Hift (1899 - 1981), juif autrichien , employé de banque à Vienne, qui fut incarcéré à Thérésienstadt et qui réchappa de l'Holocauste.
Musique (tango) composée par Adolf Strauss (1902-1944) qui fut moins chanceux que Ludwig Hift: Juif tchèque, Adolf Strauss eut le même destin qu'Ilse Weber et tant d'autres de ses compatriotes et des ses coreligionnaires ; enfermé au camp-ghetto de Thérésienstadt, il faut en 1944 transféré à Auschwitz où il fut éliminé.


Arrangement pour piano e voix de Moshe Zorman.


Soirée musicale à Thérézienstadt
Jo Spier 19444








Quand je t'ai vue la première fois,
J'ai été ensorcelé par ton regard
Ton sourire m'a semblé un éclat
De soleil et un merveilleux hasard.
Et j'ai cherché ta proximité,
Tu es aussi venue vers moi,
Me rendant si fortuné
Que je conjecturais aussitôt,
Un mai d'amour nous souriant bientôt.

Je suis sûr de te revoir encore
Et de te serrer dans mes bras,
Tout en moi exulte. Ah ! Comme ce sera
Beau de t'embrasser encore et encore !
Ce qui fut est perdu et oublié ;
Du soleil, aucune ombre n'éteint l'éclat ;
Qui peut alors connaître notre félicité !
Et moi, je veux être toujours avec toi.

Pourtant le destin t'éloigne de moi
Par delà les pays et les mers ;
Et maintenant on marine toi et moi
Dans tant d'années sévères.
La nostalgie profonde que je ressens
Pour toi inlassablement,
Jour et nuit me fait penser à toi
Et sa chanson fredonne en moi :

Je suis sûr de te revoir encore
Et de te serrer dans mes bras,
Tout en moi exulte. Ah ! Comme ce sera
Bon de t'embrasser encore et encore !
Ce qui fut est perdu et oublié ;
Du soleil, aucune ombre n'éteint l'éclat ;
Qui peut alors connaître notre félicité !
Et moi, je veux être toujours avec toi.

mardi 26 août 2014

LE RETOUR

LE RETOUR

Version française – LE RETOUR – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanspon italienne – Il ritorno – Marco Revelli – 2014


Paroles et musique de Marco Rovelli




Fleurs de mai






La chanson fera partie de l'album prochain de Marco Rovelli, en préparation et sans encore un titre définitif. L'auteur en parle ainsi dans les notes de travail :

« Ainsi, on part : on part pour réaliser un monde, pour le construire, en affrontant ce qu'il faut affronter, car on ne peut pas se passer de l'affronter. Et en partant on s'en remet à la distance. Comme ces tant et tant de migrants avec lesquels j'ai parlé ces années, qui peut-être sont mariés mais ne voient pas leur femme depuis un an. Cette distance est la distance même de l'amour : qu'est-il d'autre si ce n'est un mouvement impossible, un deux qui ne pourra jamais se faire mais qui aussi est un un (un un fêlé, un absent à soi-même). On doit toujours revenir, parce que nous sommes toujours dans le départ. Et le retour, en réalité, n'est que la construction d'un lieu nouveau, encore non expérimenté, et qui en réalité ne sera jamais expérimenté. Il y a un rapport seul dans l'imaginer ensemble ce lieu à construire : on avance dans la même direction, chacune dans son éloignement, et dans ce mouvement au même rythme, au même pas, il y a le retour. Être ensemble, c'est ressentir le même rythme dans le mouvement vers un ailleurs, un rythme qui chacun exprime et danse à sa manière. »





Construire un monde avec mes bras
Le corps brûlait mais l'âme gelait
Et au cœur de mes nuits, j'avais sur moi
Tous mes rêves d'un monde parfait

Tu attendais que je revienne de là-bas,
Cependant, le noir du monde avalait mes pas
Tu attendais une autre aurore
Mais mon silence t'avalait encore

Fer à fondre dans la forge
La chaleur, le feu, l'enfer dégorgent
Charbon à faire dans le fouillis du bois
C'est le noir du monde qui tombe sur moi

Labourer la terre pour que germe le grain
Aux couronnes d'épines quand s'ouvre la main
Poussé par le vent, passer la frontière
Les matins muets, les nuits féroces

Et tu attendais quand je parlais
Cependant, le silence encore avalait mes pas
Et tu attendais que revienne mai
Cependant, le monde disparaît et le courage ne suffit pas

Je crie dans le vent, je crie ton nom
Si je pouvais avoir une seule chanson
Un morceau de rêves à agiter
Pour te dire que maintenant je vais rentrer

Maintenant attends que mai revienne
Que dans ma main fleurissent les rêves
Que fleurissent des roses, les choses espérées
Éblouies par le soleil et ainsi retrouvées

Nous entrelaçons nos doigts et moi qui t'embrasse
Maintenant ma main est fleurie, regarde !





dimanche 24 août 2014

LETTRE DE SUISSE

LETTRE DE SUISSE

Version française – LETTRE DE SUISSE – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanson italienne – Lettera dalla Svizzera – Giorgio Gaber – 1965

Je m'en vais sac à l'épaule
C'est peut-être mon destin



Mon doux cœur, je t'aime tant
Plus je suis loin et plus je rêve de toi
À tes yeux, mon amour, je pense tout le temps
Je pleure un peu, mais ça me passera.

Ici, il y a beaucoup de travail
Et on peut bien gagner
Mais ils nous ont enlevé
Notre permis de travail.

Chère femme, je vais bien
Ici, la vie est très dure
Certes, il ne convient pas que je rentre
Chez nous et cela, tu le sais bien.

Alors, je reste en exil
Dieu m'aide et ainsi soit-il.

Mon doux cœur, je t'aime tant
Plus je suis loin et plus je rêve de toi
À tes yeux, mon amour, je pense tout le temps
Je pleure un peu, mais ça me passera.

Je reprends mon chemin
Je m'en vais sac à l'épaule
C'est peut-être mon destin
Je pars dans la vallée; fini la montagne.

Je m'en vais toujours plus loin
Avec la mort dans le cœur
Je suis un pauvre italien
Personne ne me fera une fleur.

Je n'ai pas d'autre choix
Que de travailler là.

Mon doux cœur, je t'aime tant
Plus je suis loin et plus je rêve de toi
Mon amour, à tes yeux, je pense tout le temps

Je pleure un peu, mais ça me passera.

vendredi 22 août 2014

BERCEUSE

BERCEUSE

Version française – BERCEUSE – Marco Valdo M.I. – 2014
Chanson allemande – Wiegenlied - Eva Lippold – s.d.




Dors et rêve pour moi.






Eva Rutkowski Lippold (1909-1994), poétesse et écrivaine, a été militante communiste, activiste du Secours Rouge allemand et membre de la résistance antinazie à Berlin. Elle fut arrêtée par la Gestapo en 1935 et de ce moment, elle fut détenue à la prison de Plötzensee, jusqu'à la fin de la guerre. Elle survécut, contrairement à la majorité des opposants internes au régime [http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9sistance_allemande_au_nazisme], qui – au contraire de ce qu'on pense communément – ne furent pas peu nombreux.


Maintenant, mon enfant, dors et rêve doucement.
Dors, mon chéri, et va au paradis, va.
Là, tu pourras toujours jouer et être heureux, mon enfant,
Nul cœur n'y est jamais seul là-bas.
Dors, l'enfant, dors, la veille est pour moi,
Dors, l'enfant, les rêves sont à toi ! …

Tu ne connais pas encore la vie,
Tu t'imagines encore un jeu beau et joyeux.
Et le soir, tu es fatigué et affaibli,
Ô enfant, jamais rassasié de jeux.
Dors, l'enfant, dors, l'avenir est large,
Dors, dors, rêve le temps.
L'avenir est large,
Rêve le temps !

Maintenant, tu dors, mon petit amour, si profond et si bien,
On ne devrait jamais voir tes larmes et ton chagrin.
Tu n'auras bientôt plus de rêves si légers, ô enfant,
La vie est sombre et lourde, à présent.
Dors, l'enfant, dors, je me bats pour toi,
Dors et rêve pour moi.