NORDEST
Version
française – NORDEST – Marco Valdo M.I. – 2017
Chanson
italienne (Veneto Goriziano) – Nordest
– Francesco
Pelosi – 2016
GORICA - GORIZIA- GÖRZ 1900 |
Francesco
Pelosi : originaire de Parme, né le jour de la Toussaint de
l’orwellienne 1984, haut d’environ deux mètres, nanti d’une
paire de rouflaquettes dignes du Risorgimento, une voix qui décape,
excellent guitariste et capable de chanter et d’écrire dans tout
dialecte italien d’Aoste au Cap Passero. En synthèse. De quelque
temps déjà, il fait partie de ce qu’informellement j’appelle la
« Banda degli Incliti & Sommersi Cantautori Italiani del
XXI Secolo – Bande des Auteurs-compositeurs italiens du XXI
Siècle glorieux & méconnus », une bande décidément
mobile et variable ; ainsi, on croise Pelosi de Parme en trio
avec Lega et Giromini, avec Giromini et Rocco Rosignoli, tout seul,
parfois, il y a l’autre Rocco (Marchi) qui joue de tout comme Otto
et Barnelli (à propos, un « salut » éternel à ce
dernier) y compris de cet instrument dont j’ai découvert qu’on
l’appelle « diamonica », mais que je persiste à nommer
« pippòfono - pipophone», et ainsi de suite.
Pelosi
Francesco de Parme est l’auteur de cette chanson qui, du premier
coup, a enlevé le premier prix au 23e Concours National « Giovanna
Daffini », avec cette motivation précise : « 1er
Prix (« Trophée Giovanna Daffini », semble un peu une
course cycliste d’amateurs mais bon) pour le texte « Nordest »,
magistrale interprétation accompagnée d’une palette sonore de
forte suggestion ». Je reprends ceci de l’opuscule + CD
délivré à Motteggiana (MN) le 4 juin passé 2017 à l’occasion
de la remise des prix, un dimanche déjà torride de ce très torride
été et un peu plus qu’une heure avant me parvenait la nouvelle de
la mort de Lorenzo Bargellini. Mise à part la « palette
sonore », le Concours dédié à Giovanna Daffini dans son pays
natal est très important, et cela fait comprendre à la perfection
face à quoi nous sommes. Sans compter le fait pas du tout secondaire
que lors de certains des dimanches estivaux asphyxiants, il est bon
d’avoir Pelosi devant parce qu’il réussit à donner de l’ombre
à tous, même à moi qui ne suis certes pas un petit nain.
Le
texte de la chanson est en dialecte vénéto-goricien
(je
le spécifie,
vu que je présume qu’il existe aussi
un dialecte slovène parlé de ce côté),
pour
lequel
Francesco
Pelosi s’est
fait aider par
le
goricien
Michel Torrisi. Malheureusement,
aucun vidéo
de
la chanson n’est pour l’instant disponible et de
ce fait, nous
demandons une
aide,
s’il
nous lit,
à
Pelosi lui-même.
Et ici il me plaît dévoiler
la surprise :
en réalité, Pelosi,
eh bien oui, nous l’avions déjà présent dans ce site et depuis
le 2010, caché dans
les
replis
de
La
vie s’écoule, la vie s’enfuit, la célèbre chanson
situationniste
de
Raoul Vaneigem dont Francesco Pelosi est l’auteur
d’une version italienne qu’il
chante
toujours et pour laquelle
avons eu une intéressante et amusante dissertation à propos de la
célèbre « datation situationniste »
et des encore plus célèbres « ouvriers belges en grève »
[parmi
lesquels « ouvriers belges en grève figuraient également
des employés, des étudiants, des enseignants, dont Raoul Vaneigem,
par exemple ; ladite grève étant insurrectionnelle, générale
et dura un mois, ce qui laisse plus que le temps nécessaire pour
écrire une chanson et la possibilité de la ressortir en publication
des années plus tard».
Je
dis ça afin de nourrir un peu plus la « fameuse
dissertation ».MVMI]
La
chanson est accompagnée une traduction en italien courant qui est
reprise de l’opuscule/CD. Cependant, naturellement, il y a
davantage encore. Étant donné le désir, exprimé dans le texte
même, de vouloir la chanter « en dialecte, en ladin, en
furlan, en allemand, en slovène », nous nous déclarons prêts
à donner un coup de main à Francesco pour faire advenir son
souhait. En dialecte, ce l’est déjà en allemand nous y avons
pourvu nous-mêmes, pendant que pour le ladin, le furlan et le
slovène, on verra e qu’on pourra faire… [RV]
Dialogue
maïeutique
Voici,
Lucien l’âne mon ami, une chanson sur le Nordest…
Lequel ?,
dis-moi Marco Valdo M.I. mon ami, car des Nord Est, il y en a
beaucoup. Serait-ce le Nordeste brésilien qui a la taille d’une
demi-Europe ? Celui de Chine, celui d’Inde, ou que sais-je
encore ? Ou plus modeste, le Nord-Est de la France à deux pas
de chez nous ?
Arrête-toi,
Lucien l’âne mon ami, ne t’emballe pas ainsi. Si tu m’avais
laissé finir ma phrase, tu le saurais déjà. Comme c’est une
chanson italienne, comme c’est un chanteur italien, il s’agit
tout simplement du Nordest italien, un territoire d’une superficie
qui n’est pas aussi gigantesque que le Nordeste brésilien, mais un
lieu qui recèle une histoire lourde et douloureuse, celle que
raconte la chanson ou plus exactement,celle qu’elle évoque n’étant
qu’une chanson et pas un savant traité d’histoire politique. En
deux mots, c’est cette région au nord-est de Venise, qui partage
sa frontière avec la Slovénie actuelle, elle-même partie de
l’ancienne Yougoslavie. La région où se trouve Gorice, qui en
italien se dit Gorizia, cette ville maudite qu’est la Gorizia de la
chanson, intitulée « Ô Gorizia, sois maudite ! ».
Souviens-toi de ce qu’elle disait et de ce que disaient les
commentaires à son sujet. Je n’en dirai pas plus cette fois. Il me
faut juste ajouter une petite parenthèse supplémentaire en ce qui
concerne le Vajont et Longarone, où outre tous les massacres
militaires, outre l’« urbicide » qui frappa Gorizia
après la guerre (la population d’origine chuta de 35000 à environ
3000 habitants) et la politique d’italianisation forcée menée par
les fascistes et poursuivie depuis, il faut aussi noter le malheur
supplémentaire qui frappa le Nordest le jour où la montagne
s’effondra et où le contenu du barrage du Vajont descendit dans la
vallée et balaya, notamment, Longarone.
Comme
si la bêtise humaine ne suffisait pas, dit Lucien l’âne.
En
effet, répond Marco Valdo M.I. ; cependant, cette chanson est
aussi une « chanson douce » qui parle, murmure, susurre
par-delà les frontières et les déchirures et pour mieux dire, en
appelle au poète frioulan qu’était Pier Paolo Pasolini :
Je
voudrais te laver dans l’eau la plus
fraîche de mon
pays :
« Fontaine d’amour rustique,
Il n’y a pas d’eau plus fraîche
Que celle de mon pays ».
« Fontaine d’amour rustique,
Il n’y a pas d’eau plus fraîche
Que celle de mon pays ».
Il
est temps de conclure ; alors, Marco Valdo M.I. mon ami, une
fois encore faisons notre tâche infiniment longue, aussi longue que
le malheur, car elle durera tant qu’il y aura la guerre, et tissons
le linceul de ce vieux monde malade des frontières, nationaliste,
myope, détestable et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Je
chante une douce chanson pour toi
Qui dans le Nordest, es née,
Je voudrais la chanter, en ladin, en dialecte
Du Frioul-Vénétie-Julienne, en allemand, en slovène.
Mais mon cœur me dit : « Montagne, bois,
Plateau, lagune et plaine »,
Mon cœur me raconte la terre volée,
Me raconte ton visage
Qui l’a consolée.
Qui dans le Nordest, es née,
Je voudrais la chanter, en ladin, en dialecte
Du Frioul-Vénétie-Julienne, en allemand, en slovène.
Mais mon cœur me dit : « Montagne, bois,
Plateau, lagune et plaine »,
Mon cœur me raconte la terre volée,
Me raconte ton visage
Qui l’a consolée.
La
Grande Guerre m’a pris
mes fils,
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Et
toi qui te vêts du nom du vent
Du nom du vent
Qui de la Carnie court à Venise,
Monte au Tyrol et descend vers Gorice,
Qui t’appelles comme le crépuscule,
Qui voit Trieste de la mer,
De l’ombre de vin qui baise la rage
Et l’allume,
Et l’allume.
Du nom du vent
Qui de la Carnie court à Venise,
Monte au Tyrol et descend vers Gorice,
Qui t’appelles comme le crépuscule,
Qui voit Trieste de la mer,
De l’ombre de vin qui baise la rage
Et l’allume,
Et l’allume.
La
Grande Guerre m’a pris
mes fils,
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Et
de quelle autre façon,
pourrais-je te
chanter,
Toi qui au Nordest es née ?
Avec tout ce sang qui tonne
De la Yougoslavie, du Vajont à Longarone,
De cent ans et plus de séparation et de tranchées,
D’une vie pour toujours à la frontière,
Toujours étrangère, toujours étrangère,
Je voudrais te laver dans l’eau la plus fraîche de mon pays :
« Fontaine d’amour rustique,
Il n’y a pas d’eau plus fraîche
Que celle de mon pays ».
Toi qui au Nordest es née ?
Avec tout ce sang qui tonne
De la Yougoslavie, du Vajont à Longarone,
De cent ans et plus de séparation et de tranchées,
D’une vie pour toujours à la frontière,
Toujours étrangère, toujours étrangère,
Je voudrais te laver dans l’eau la plus fraîche de mon pays :
« Fontaine d’amour rustique,
Il n’y a pas d’eau plus fraîche
Que celle de mon pays ».
La
Grande Guerre m’a pris
mes fils,
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Et tes yeux,
Elle m’a pris mes montagnes et tes yeux.
La Grande Guerre m’a pris mon nom,
Ma terre, ma langue et tes yeux.
Et tes yeux,
Et
tes yeux.