Version
française – MER DES ÉMIGRÉS – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson
italienne
– Mar
dei migranti
– Sine
Frontera – 2015
Version
française – MER DES ÉMIGRÉS – Marco Valdo M.I. – 2016
Chanson
italienne
– Mar
dei migranti
– Sine
Frontera – 2015
Mère d'émigrés |
Un
morceau, explication du titre, qui affronte une thématique
aujourd’hui plus que jamais tristement actuelle et voisine :
le drame vécu par des milliers de personnes forcées de guerres et
la misère à abandonner leur pays natal, en défiant la mer, pour
rejoindre les côtes européennes. Le texte raconte à la première
personne, le malheureux voyage d’un réfugié, à bord d’un canot
pneumatique bourré de personnes, à la recherche d’une vie qu’on
espère meilleure. Comme toujours sensibles aux thèmes sociaux, les
Sine Frontera décident de leur dédier ce premier morceau,
anticipation du nouveau disque « Restiamo umani – Restons
humains », à cette tragédie collective, évoquée dans ce
voyage, qui malgré son apparente brièveté kilométrique, semble ne
jamais finir, tout autant que dangereux, et qui comporte le
douloureux éloignement des affections et des lieux aimés, à la
recherche d’un monde nouveau.
Dialogue
Maïeutique
Entre
le réfugié, l’émigré, le migrant, le fuyard, le rescapé de la
guerre et la terre d’exil, il y a souvent une mer ou mieux encore,
un océan. Même si c’est difficile à traverser et risqué et
dangereux, même quand la mer est faite de rocailles, l’océan de
sable, car pour bien des exilés, c’est le cas. Certains, presque
tous, cumulent : plaines interminables, villes dangereuses,
montagnes désertes, fleuves infranchissables, déserts mortifères,
mers, frontières… Et à tout cela, il faut ajouter le soleil, la
pluie, le gel, la neige, la chaleur, le froid, le vent, la faim, la
soif, la maladie, la brutalité, la violence et mille autres
inconvénients. Et du côté du paradis d’accueil, il y a la bêtise
des hommes ou leur méchanceté, que sais-je, qui en ajoutent
encore : ils entendent juger de la cause du départ, de
l’origine de l’exil. Soyons net : la cause principale, celle
qui vient en premier lieu, c’est la misère. Mais la misère n’est
pas une bonne raison pour s’exiler, ni la faim, ni la maladie…
Ces émigrés-là, ces migrants, certaines bonnes gens (les assis sur
leurs sièges, les culs dans le beurre, comme on dit chez nous)
veulent les rejeter. Pourtant la faim, la bête, la terrible faim est
bien plus assassine que les bombardements et elle pousse à l’exil
bien plus de gens. Mais voyez-vous, ma chère, ce sont des réfugiés
« économiques ».
Seraient-ils
moins chers ?, qu’on les qualifie ainsi d’économiques,
demande Lucien l’âne.
Ce
n’est certainement pas pour cette raison. Tout simplement, ils
fuient la misère économique ; cette banale misère qui tue.
Mais la mort et la terreur économiques ne peuvent être dévoilées
sans mette en cause la richesse des maîtres du monde. Les réfugiés
qui fuient un régime adverse et reconnu comme tel par les « nations
civilisées » ont droit à plus d’égards. Ils ont droit au
titre de réfugié disons « officiel », « estampillé »
et tout se passe relativement bien pour eux tant qu’ils sont peu
nombreux. Ensuite, plus leur nombre s’accroît, plus leur accueil
devient problématique. C’est mathématique. Ce sont les émigrés
de la chanson : ils peuvent payer leur fuite.
Mais
pourquoi donc cette différence, pourquoi cette ségrégation…,
demande Lucien l’âne en assombrissant le regard. Et que fait-on
des autres de ceux qui fuient sans ce « label », les
opposants politiques, les libres penseurs, les porteurs de liberté ?
On sait et si on ne sait pas, c’est qu’on ne veut pas savoir, on
sait que le sort des incroyants est des plus terribles dans les pays
où fleurit la religion – peut importe laquelle, peu importe son
idole.
Ah,
Lucien l’âne mon ami, tu le sais bien toi, que les idoles sont des
enfants débiles qui veulent qu’on les considère, qu’on les
respecte et qu’on en passe par tous leurs caprices. Et des
caprices, elles ont en ont de tous les genres : alimentaires
(mangez ceci, ne mangez pas cela – du porc, par exemple) ;
vestimentaires : habillez-vous comme-ci, ne montrez pas cela (le
cheveu, le bras, la jambe, le nombril et finalement, tout le corps) ;
totalitaires : ne vous coupez-pas ceci (barbe, cheveu),
coupez-vous cela (prépuce, lèvres vaginales). Le Bochiman avait
raison : Les dieux sont tombés sur la tête. Mais comme ils
n’existent pas, on délèguera la responsabilité de ces
imbécillités aux prophètes ces inventeurs vindicatifs et farfelus.
À
propos d’injonctions divines vestimentaires, dit Lucien l’âne en
jetant un regard malicieusement noir, il me revient en mémoire, à
l’instant, un excellent livre de Pierre Louÿs – Les Aventures du
Roi Pausole, où les jeunes filles et les femmes doivent
impérativement porter un fichu sur la tête. On y voit donc les
demoiselles et les dames se promener (le Royaume de Pausole est un
pays où heureusement il fait chaud), à commencer par la fille du
Roi, nues avec un fichu sur la tête. Malheur à celle qui le perd !
Ce foutu fichu.
Lucien
l’âne mon ami, tu dérives. Revenons à cette histoire
d’émigration marine. Établissons une solide vérité : le
sort de ces réfugiés est détestable et c’est
une
honte qui retombe en poussières vénéneuses sur ceux qui les
rejettent. Mais le pire, c’est le destin des pauvres de là-bas qui
n’ont même pas la ressource de fuir et qui doivent subir et la
misère et la guerre et les envahisseurs assassins et les bombes des
libérateurs du ciel. Il faut
à tout moment réfléchir
le propos dans le cadre de la Guerre
de Cent Mille Ans que les riches, les puissants et les
candidats à la richesse et à la puissance font aux pauvres pour
assurer leur domination et démultiplier leurs richesses. L’humaine
nation ne connaîtra la paix véritable et définitive qu’avec la
disparition du goût de la richesse, de l’arrogance du pouvoir, de
l’ambition de dominer et de l’habitude d’imposer ses lubies.
Alors,
reprenons vite notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde
capricieux, religieux, absurde, assassin et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
J’ai
abandonné ma maison un jour de fin septembre
Tous disaient « Partons, qu’avons-nous à perdre ? »
J’ai laissé mon peu de choses
Et un bouquet de roses
À ma mère.
Tous disaient « Partons, qu’avons-nous à perdre ? »
J’ai laissé mon peu de choses
Et un bouquet de roses
À ma mère.
Sur la plage, tous veulent partir. Le ciel est beau.
L’Europe est proche ; un filet de mer nous sépare.
J’ai donné toute ma fortune
Pour une place assise sur le radeau.
De la main, je peux effleurer l’eau.
40 milles au Nord, le ciel commença à crier
Aux… lucides et aux fatigués,
Bienvenus sur la Mer des Émigrés.
40 milles au Nord, le ciel commença à crier
Aux… lucides et aux fatigués,
Bienvenus sur la Mer des Émigrés.
Hommes,
femmes, enfants, serrés l’un contre l’autre,
Tremblent, pleurent ; la mer monte.
Nous nous abandonnons à notre destin,
Nous nous abandonnons à notre sort :
À la vie ou à la mort.
Tremblent, pleurent ; la mer monte.
Nous nous abandonnons à notre destin,
Nous nous abandonnons à notre sort :
À la vie ou à la mort.
40
milles au Nord, le ciel commença à crier
Aux… lucides et aux fatigués,
Bienvenus sur la Mer des Émigrés.
Aux… lucides et aux fatigués,
Bienvenus sur la Mer des Émigrés.
Sur
la Mer des Émigrés.
Sur
la Mer des
Émigrés.