jeudi 6 mars 2014

Oh ! Papa … C'est très beau la liberté

Oh ! Papa … C'est très beau la liberté

Chanson française – Oh ! Papa... C'est très beau la liberté – Marco Valdo M.I. – 2014



Oh ! Papa !
Dis-moi, dis-moi, qui sont tous ces gens-là ?
Oh ! mon gars !
N'aie pas peur, ils viennent de là-bas !





Oh, Marco Valdo M.I. mon ami, dit Lucien l'âne tout guilleret, regarde ces papillons qui se poursuivent là devant ta fenêtre, ces ailes rousses qui se balancent à l'air libre dans le soleil . On dirait qu'ils font la danse du bonheur...


C'est le printemps, Lucien l'âne mon ami. Enfin, celui de la nature... Mais il y a aussi eu des printemps artificiels, faits de la main de l'homme... Mais généralement, ils tournent mal... Pour ceux-là, l'hiver revient vite sur les ailes du vent du Nord... T'en souvient-en du printemps de Prague ? Eh bien, la canzone raconte précisément l'histoire d'un printemps de ce genre et même, en quelque sorte, de tout printemps généralement quelconque de ce genre, de tout printemps artificiel... Bref, de gens, quelque part, n'importe où, qui voudraient bien sur leur terre d'un petit coin de paradis. Oh, ils n'ont pas de grandes ambitions... Ce sont des gens, comme toi et moi, dont l'ambition peut se résumer à quatre vers de Ferré :
« On vit, on mange et puis, on meurt
Vous ne trouvez pas que c'est charmant
Et que ça suffit à notre bonheur
Et à tous nos emmerdements... » [[7794]]


Quoi, quoi ? Ce serait donc une nouvelle chanson que tu viens de faire...


Exactement. Elle parle ou plutôt, ils parlent : la chanson et un garçon, qui est lui à l'intérieur du monde que décrit la chanson. Ou plutôt encore, à la relire, c'est une sorte de double monologue... Le garçon angoissé et son père... Mais ceci dit, ce pourrait tout autant être une fille... Disons, un enfant... Mais il a déjà l'âge de raison, qui est l'âge de raisonner. Bref, je te laisse te démêler ces formes de discours au monde. Quant au fond, c'est un peu la chanson des envahis ou des secourus, un peu, beaucoup contre leur gré. On pourrait être en Pologne ou n'importe où ailleurs... On s'éveille un matin et ils sont là. La liberté qu'on croyait apprivoiser s'est envolée ; c'est l'effet de l'effroi. La vida es sueño...


Mais, dis-moi, dis-moi, comment t'est venue la chanson elle-même ?


Là, c'est une autre histoire. Mais puisque tu le demandes, voici. Tu suis sans doute comme je le fais, les événements de Sébastopol et autres lieux d'Ukraine et donc, mêlant un peu tout ce qui flotte dans l'esprit de la Crimée, de l'Arménie, de la Géorgie, de la Hongrie, du pays des Sudètes et d'autres lieux d’Europe centrale et la méditation allant bien au-delà du moment et du continent, je cherchais un angle d'attaque pour une chanson appropriée. Et comme souvent, c'est une espèce de scie qui a fait surface et qui est sortie du coin où elle traînait dans les limbes de ma mémoire. J'ai dit une scie, mais une scie sympathique que je me verrais bien un jour introduire dans les CCG, car l'air de rien, elle est assez décapante pour certaine institution, fondement de l'ordre sociétal. De cela, nous reparlerons plus tard. Donc, dans ma tête, une scie entêtante a surgi... Je m'aperçois que je n'ai pas encore dit de quelle scie il s'agissait... Elle s'intitule « Scandale dans la famille » et le premier interprète en français était Sacha Distel... [http://www.youtube.com/watch?v=hIEAfy9YGrU]. C'est d'elle que vient le « Oh, papa ... » et un peu (mais pas tout-à-fait, je l'avoue), la structure de la chanson. Le contenu, c'est tout autre chose. Le contenu, c'est plutôt un épisode de la Guerre de Cent Mille Ans, cette guerre que les riches et les puissants font aux pauvres afin de maintenir, d'étendre, de renforcer leur domination, leur pouvoir, leurs privilèges, leurs richesses...


Je l'imagine volontiers ; c'est comme si je la voyais cette histoire, comme si j'étais là près des deux interlocuteurs dans cette ville d'Europe ou d'Asie ou d’Afrique ou d'Amérique ou d'Océanie... attendant avec eux l'arrivée des soldats venus de « là-bas ». Une raison supplémentaire pour tisser et tisser encore le linceul de ce vieux monde illibertaire, soldatesque, impérialiste, hyperréaliste et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Oh ! Papa !
Dis-moi, dis-moi, qui sont tous ces gens-là ?
Oh ! mon gars !
N'aie pas peur, ils viennent de là-bas !


Dans une jolie ville d'Europe ou d'Asie
On vivait tranquillement notre vie
On tirait le bon diable par la queue
Depuis longtemps déjà, on rêvait de vivre mieux
Un jour, on trouva le régime qu'on voulait
On dit au pays frère, on veut s'émanciper
Il a répondu : Mes amis, il n'en est pas question
Sans protection, la liberté, ce n'est pas bon.


Oh ! Papa !
Dis-moi, dis-moi, qui sont ces gens-là ?
Oh ! Papa !
J'ai très peur, ce sont des soldats


En Ukraine, en Crimée, ou bien n'importe où
Là-bas aujourd'hui ou demain chez nous
À voir tous ces soldats, on ne respire plus
On dit au pays-frère, nous on n'en peut plus
Pour vivre, il nous faut du grand air
Hélas mes pauvres amis, le monde est fait comme ça
Tous les hommes sont frères,
Mais la liberté en liberté, ça ne va pas.
Pour la défendre, il faut des militaires.


Oh ! Papa !
Dis-moi, dis-moi, qui sont ces gens-là ?
Oh ! Papa !
J'ai très peur, ce sont des soldats


À bout de patience, on s'en fut écœurés
Raconter au monde entier toute la vérité
Le monde a souri, puis il a dit : il faut tout oublier
La vie est un rêve ; c'est très beau la liberté.


Oh ! Papa !
Dis-moi, dis-moi, qui sont ces gens-là ?
Hier soir, ils n'y étaient pas
Ce matin, ils sont là.
Oh ! Papa !
J'ai très peur, ce sont des soldats

LA CHANSON DE BARLACH

LA CHANSON DE BARLACH

Version française – LA CHANSON DE BARLACH – Marco Valdo M.I. – 2014
d'après la version italienne de Riccardo Venturi
d'une
Chanson allemande – Das Barlach-Lied – Wolf Biermann – 1968





Que va-t-il advenir de nous encore 
Un si grand danger nous menace






Ernst Barlach, né à Wedel, en Allemagne septentrionale, le 2 janvier 1870, a été un des sculpteurs expressionnistes allemands majeurs; en outre, ce fut un écrivain et dramaturge apprécié . Le lien entre Biermann et Barlach apparaît multiple : ainsi Barlach eut une composante hambourgeoise (en y ayant étudié, à partir de 1888, à l'École de Arts et Métiers). Artistiquement, il subit la grande influence de Vincent Van Gogh, de l'Art Nouveau et du Jugendstil. Les thèmes préférés de Barlach (influencés aussi par son séjour en Russie, en 1906), furent les paysans et les pauvres, le mysticisme populaire, la solidarité et la religiosité archaïque ; ce n'est pas un hasard si une de ses sculptures plus célèbres représente une simple cueilleuse d'herbes sauvages – Die Krautpflückerin).

En 1909, il séjourne un temps à Florence, attiré par Giotto et Arnolfo di Cambio. De tendance pacifiste,il fit au début de la Grande Guerre une brève volte-face en montrant de l'enthousiasme pour le début du conflit. Un enthousiasme qui disparut bien vite : Barlach revînt donc à sa ligne rigoureusement pacifiste. Sur le bref soutien donné au début par Barlach à la guerre, ont été avancées les hypothèses les plus disparates, mais l'artiste ne fournit jamais que des explications confuses. Ce qui probablement relie davantage Barlach à Biermann, et qui poussa ce dernier à écrire cette chanson qu'il lui a inspirée, est l'isolement au cœur d'un régime dictatorial. Pour son pacifisme, en effet, Ernst Barlach devînt automatiquement, pour le régime nazi, un artiste « dégénéré » ; ses oeuvres furent mises au ban, et ses travaux, autant figuratifs que littéraires, furent confisqués ou furent détruits. Il mourut le 24 octobre 1938 à Rostock, où il vivait confiné chez lui.

De ceci, ressort clairement le thème fondateur de cette chanson : le confinement domestique et l'oppression extrême que n'importe quel régime totalitaire réserve à celui qui crée librement. C'est un Barlach dans ses dernières années de vie que peint la chanson de Biermann ; un artiste qui, presque dans un délire, se tourne vers sa mère en voyant devant lui une muraille de nuages sombres, des groupes de rats affamés et d'anges qui tombent morts. Puisque Ernst Barlach était un artiste vénéré en RDA (jusqu'à lui consacrer des timbres, comme on le voit sur l'image au début de cette introduction), le choix de Biermann fut sûrement de la provocation : d'un côté, il exaltait l'artiste opprimé et réduit au silence par le régime nazi ; de l'autre, il réservait le même traitement aux artistes actuels qui n'adhéraient pas aux impératifs du régime « socialiste » . Dans les deux les cas ce qui comptait, c'était l'art d'État, lié aux directives et bien codifié. Rien de nouveau sous soleil. [RV]



Deux mots sur les anges qui tombent du ciel... Il me revient en mémoire une histoire tchèque de cette année-là – c'était en mil neuf cent soixante-huit, année où il t'en souvient le mois d'août vit l'arrivée en Tchécoslovaquie de centaines de milliers de soldats des pays amis qui venaient au secours du socialisme réel en danger. Peut-être les Tchèques eux-mêmes devaient-ils en appeler à leur mère « Ah, Maman... » .


Mais les « anges » dans tout ça ?, demande Lucien l'âne que viennent-ils faire ?


C'est là qu'intervient mon histoire tchèque. Je ferai court, car je peux aussi la faire longue... Dans la nuit du 20 août, quand les visiteurs entrèrent dans le pays, dans une des nombreuses villes du pays, le comité du parti un peu dérouté par les événements et dans sa perplexité, ayant perdu tous ses repères et ne sachant ce qu'il allait advenir, fit appeler le rabbin. « Tu comprends, rabbin, nous n'y comprenons plus rien, nous avons peur et nous pensons que peut-être, vu ta qualité de rabbin, tu aurais d'autres moyens que nous de savoir l’avenir... » Après avoir ainsi rassuré le brave homme sur ses intentions, le comité lui demanda – confidentiellement – relativement aux visiteurs, s'ils allaient rentrer chez eux et comment.


Bonnes questions, dit Lucien l'âne, je me les serais posées aussi. Qu'a donc bien pu répondre le rabbin ?


Comme tu l'imagines, ce rabbin était un homme prudent et d'autant plus qu'il était de confession israélite, ce qui l'avait déjà exposé à bien des déboires, mais jusque là, il en avait réchappé. Donc, le rabbin après avoir longuement tourné sa langue dans sa bouche, répondit : « Eh bien, camarades, il y a deux solutions... Une solution normale et une solution miraculeuse. » « Ah, dit le comité, dis-nous d'abord la solution normale... » et c'est ici qu'interviennent les anges...« Hé, dit le rabbin, cinq cent mille anges vont descendre du ciel et emporter chacun un de nos touristes-visiteurs et le ramener chez lui... » « Oups, fit le comité... Et la solution miraculeuse, alors ? Quelle est-elle ? »... « Oh, dit le rabbin, c'est qu'ils s'en aillent d'eux-mêmes... »


À propos des anges, ne sont-ce pas les mêmes que Biermann voyait dans son délire ? Et puis, rassure-moi, c'est bien de la Tchécoslovaquie que tu parles ? Pas de l'Ukraine ? , dit en redressant subitement son vaste crâne.


Je te parle de la Tchécoslovaquie en 1968, date de la chanson. Ceci dit, c'est une parabole qui peut s'appliquer à bien des cas où il est question de visites amicales, de relations historiques, de pays frères... On peut y ajouter les hérauts de la démocratie, les soldats de la liberté, les missionnaires de la paix... et les casques de toutes les couleurs.


Attendons la suite et tissons le linceul de ce vieux monde aux penchants envahisseurs, aux « murs de nuages », aux solutions normales et miraculeuses et cacochyme.



Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane



Ah, Maman, ferme la fenêtre
La pluie arrive vers nous
Il y a là-bas un mur de nuages
Qui veut s'abattre sur nous

Que va-t-il advenir de nous encore
Un si grand danger nous menace
Du ciel sur la terre
Tombent les anges morts

Ah, Maman, ferme la porte
Des rats par milliers arrivent
Les affamés vont devant
Les rassasiés suivent le mouvement

Que va-t-il advenir de nous encore
Un si grand danger nous menace
Du ciel sur la terre
Tombent les anges morts

Ah, Maman, ferme les yeux
La pluie et les rats sont arrivés
Ils entrent maintenant par les fentes
Que nous avions oubliées
Que va-t-il advenir de nous encore
Un si grand danger nous menace
Du ciel sur la terre
Tombent les anges morts