SMYRNE
Version
française – SMYRNE – Marco Valdo M.I. - 2020
Paroles
– Pythagoras
/
Πυθαγόρας
Musique – Apostolos Kaldaras / Απόστολος Καλδάρας
Interprète – Giorgos Dalaras / Γιώργος Νταλάρας
Musique – Apostolos Kaldaras / Απόστολος Καλδάρας
Interprète – Giorgos Dalaras / Γιώργος Νταλάρας
SMYRNE
II
Jean
Lurçat – 1924
|
Dès
l’indépendance grecque, fleurit le projet d’étendre la
souveraineté grecque sur une partie de l’ancien empire byzantin,
l’Anatolie occidentale et Chypre, et d’élire Constantinople
comme capitale de l’État élargi, la Megali Hellas / Μεγάλη
Ἑλλάς, une Grande-Grèce du 20e siècle qui s’étend vers
l’est.
De
1830 à 1914, la Grèce progresse vers le nord avec la conquête de
la Thessalie, de la Macédoine, de la Thrace, de la Crète, des îles
égéennes, grâce entre autres aux guerres balkaniques de 1912-13.
La Grèce entra tardivement dans la Guerre Mondiale ; ensuite,
les conflits se poursuivent jusqu’à la « Grande
Catastrophe » (1923) : la disparition de l’hellénisme
en Asie Mineure après plusieurs millénaires.
1922
marque la défaite de la Grèce après trois ans de guerre contre la
République turque nouvellement formée. Cet épisode est entré dans
l’histoire sous le nom de Mikrasiatikí katastrofí / Μικρασιατική
καταστροφή : « la catastrophe d’Asie
mineure ». C’est la conséquence d’un nationalisme fou qui
a produit les fumées de la Grande Idée/ Μεγάλη Ιδέα .
Des
atrocités ont été perpétrées des deux côtés. Les Grecs en
retraite ont massacré des civils turcs, ont commis des dévastations
et des incendies dans la région de Smyrne. Plus terribles encore
furent les massacres perpétrés par les Turcs contre les populations
grecques du Pont et les Arméniens (en plus des massacres des années
précédentes). Pour les Grecs des districts de la mer Noire, il
existe des documents faisant état d’environ 16 000 meurtres.
Le
déplacement des réfugiés a été une catastrophe dans la
catastrophe : 800 000 musulmans ont quitté la Grèce,
principalement le nord de la Grèce, pour la Turquie, tandis que
1 500 000 Grecs ont été évacués d’Anatolie vers la
Grèce. La Grèce comptait 4,5 millions d’habitants en 1922 :
on peut imaginer ce que la poussée démographique de 33 % et
l’intégration dans un pays pauvre ont signifié pendant de
nombreuses années, d’autant que la plupart des réfugiés ne
parlaient même pas le grec.
Les
événements de la Grèce, les événements politiques, sociaux et
culturels des vingt années suivantes, ne peuvent être compris sans
faire strictement référence à ces faits.
En
1972, à l’occasion du cinquantième anniversaire de ces événements
de la « Grande Catastrophe », le compositeur Apostolos
Kaldaras et le parolier Pythagore Papastamatiou ont gravé l’album
Μικρά Ασία – Asie Mineure .
[Riccardo
Gullotta]
Dialogue
Maïeutique
Smyrne,
dit Lucien l’âne, voilà le nom d’une ville qui fleure bon la
Grèce orientale, cette Μικρασια, cette petite Asie, cette
Asie mineure et qui me rappelle ma participation – légèrement
forcée et pas trop enthousiaste à la grande retraite, cette Anabase
que conta, il fut un temps, l’excellent Xénophon. Elle me met en
mémoire aussi les délices des poésies de Sappho, poétesse d’une
île voisine. Capitale de cette Ionie qui vit naître et prospérer
la philosophie. Je garde ainsi Smyrne au fond de ma mémoire.
Oui,
dit Marco Valdo M.I, c’est ainsi que Smyrne se tient à l’aube de
la civilisation gréco-romaine, dont nous sommes les descendants. Ce
serait à soi toute seule une raison de chanter sa gloire. Mais tel
n’est pas l’argument de la chanson, même si on doit absolument
garder en tête cette dimension historique, car tout se construit sur
cet arrière-plan.
Certes,
reprend Lucien l’âne, on a trop souvent tendance à ne pas
percevoir les profondes traces qui marbrent l’histoire humaine.
C’est sans doute un effet de la brièveté de la vie individuelle
de l’humain quand elle est confrontée au temps historique ;
plus encore évidemment, quand il s’agit d’affronter l’écart
avec un temps préhistorique, transhistorique et on peut même y
ajouter le temps géologique, astronomique, galactique, qui sont des
temps de durées considérables, quasiment hors d’atteinte de la
compréhension commune. Tous ces temps ont des tempos différents,
des rythmes décalés et cependant, interagissent les uns dans les
autres. En fait, toutes ces mécaniques s’entrecroisent et
superposent leurs actions. Ce sont des moments, des moteurs, des
mouvements, des formes de vie qui font ce qu’on résume sous le nom
d’évolution. Ainsi en va-t-il aussi de la manière dont on ressent
Smyrne.
Donc,
Smyrne, en effet, l’Ionie, la philosophie, répond Marco Valdo
M.I., mais le vrai sujet de la chanson, c’est la « Grande
Catastrophe » (Μεγάλη καταστροφή), telle
qu’elle est rappelée dans les livres d’histoire. Cependant, si
j’ai pris la peine de donner une version française de ce texte,
c’est aussi en mémoire de Gian Piero Testa, tant apprécié, qui
nous a souvent conduit sur les traces de la « Grécité »,
de la « Romiosine » – « Ρωμιοσύνη »
que chantait Yannis Ritzos. C’est d’ailleurs en référence à ce
poème de Ritzos que j’ai introduit ce mot dans ma version en
langue française. Au fait, pour éviter toute équivoque, je précise
que « Romiosine » – « Ρωμιοσύνη »
désigne l’ensemble grec, celui qui s’étend au-delà des limites
nationales.
Au
passage, conclut Lucien l’âne, il serait sans doute utile
designaler aux touristes distraits et oublieux que Smyrne est une
ville située dans un temps que les enfants d’à présent ne
peuvent pas connaître et qu’ils en trouveront mention sur les
tableaux d’aérogares sous le nom turc d’Izmir, une ville, un
port de plusieurs millions d’habitants. Enfin, car il faut bien en
finir – sans trop de mélancolie, tissons le linceul de ce vieux
monde nationaliste, communautariste, bardé de frontières et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Smyrne
brûle, mère, brûle et nos biens aussi.
Notre
chagrin ne se dit, notre peine ne s’écrit.
Romiosine,
Romiosine, jamais rassérénée,
Tu
vécus un an dans la paix et trente dans les flammes…
Romiosine,
Romiosine, jamais rassérénée,
Tu
vécus un an dans la paix et trente dans les flammes…
Smyrne
est perdue, Mère, nos rêves ont disparu…
Qui
s’accrochait aux navires, même ses amis l’ont battu.
Romiosine,
Romiosine, jamais rassérénée,
Tu
vécus un an dans la paix et trente dans les flammes…
Romiosine,
Romiosine, jamais rassérénée,
Tu
vécus un an dans la paix et trente
dans les flammes…