mercredi 21 janvier 2015

DÉFENSE DE LA JOIE

DÉFENSE DE LA JOIE


DÉFENSE DE LA JOIE


Version française – DÉFENSE DE LA JOIE – Marco Valdo M.I. – 2015

Chanson italienne – Difendi l'allegriaAlessio Lega2011

Paroles et musique : Alessio Lega
Ba
sée sur un poème de Mario Benedetti (1979)
Album: Mala testa [2013]


Défendez la joie comme une certitude.


C'est arrivé ainsi : il y a quelques années, en écrivant des chansons pour son nouvel album (« Mala testa », qui est sorti cette année), Alessio Lega a imaginé de reprendre un poème de l'Uruguayen Mario Benedetti et d'en faire une chanson. À dire vrai, même l'original espagnol devrait être mis en musique quelque part ; Alessio nous y a mis une musique, il faut le dire, décidément gaie. Une de celles qui entrent dans la tête et font chantonner à l'arrêt de l'autobus ou sous la douche, et peut-être même changer de canal quand elle vient en tête pendant que passent à la télévision je ne sais quel très triste politicien ou quelque président octogénaire qui parle de cohésion et de chagrins. Maintenant, il faut dire que Mario Benedetti était un génie ; penser à la joie comme une tranché pour défendre de tous les(et, souvent, sournois) attaques quotidiennes qui lui sont lancées, souvent même déguisées en joie (il suffit de penser aux joies berlusconiennes…), c'est, en effet, simplement génial ; et génial, a été la transposition italienne d'Alessio Lega, une chansonnette qui – dans un pays faussement joyeux comme l'Italie est absolument nécessaire.

Une série pyrotechnique d'images qui,
subitement, cessent de l'être seulement et vont au nœud de la question dans un pays et dans un monde qui rit, rit, rit et tout ce grand rire pue la tristesse, la tragédie, la mort. Ainsi, Mario Benedetti et Alessio Lega ont vraiment creusé une belle tranché pour défendre la joie, la vraie ; il s'agirait maintenant d'aller à l'attaque, cependant ; la guerre de tranchée, comme l'enseigne l'histoire, à la fin use. Défendez la joie, par exemple, en attaquant les « caméras amies » placées partout dans les villes et dans les villages sous prétexte de la « sécurité », la chose qui plus a tué la joie dans ces temps. Juste pour donner un exemple pratique ; un autre est donné également par Alessio Lega, en introduisant, au terme de la chanson, une catégorie de personnes qui, professionnellement, devraient faire « rire ». Et ainsi, pour réaffirmer le concept, j'ai ajouté, sous le texte de la chanson, l'effigie d'un de ces très tristes artisans du rire. Un au hasard. [RV]

Voici, mon ami Lucien l'âne, une chanson d'Alessio Lega. Et, comme tu le sais, j'ai beaucoup d'attention pour tout ce que publie Alessio Lega. Je sais la chose curieuse de consacrer tant d'attention à un artiste assez peu connu dans nos régions, mais que veux-tu, moi, j'aime bien Alessio Lega. D'abord, car je l'aime bien ce chanteur, auteur, compositeur, grand connaisseur de la chanson française qui vaille. Ainsi, je l'aime – pour ainsi dire – en général...


Mais enfin, Marco Valdo M.I. mon ami, tu ne peux quand même pas aimer en général Alessio Lega, cette mauvaise tête d'anarchiste-chanteur.


Certes, Lucien l'âne mon ami. Je te dirai ceci, concernant Alessio Lega et même, en général : il vaut mieux une tête d'anarchiste-chanteur qu'une gueule de maître-chanteur. Dès lors, je te le concède : pas en général, en civil. Mais à présent, si tu le veux, venons-en à la canzone… Elle se veut une « ode à la joie » [[1996]], en moins grandiose.


Il faut l'espérer, dit Lucien l'âne en éclatant d'un rire éclatant.


Cesse de te moquer, Lucien l'âne mon ami, la musique de Beethoven n'est pas si mal que ça… Même si je t'accorde que le texte de Schiller commence vraiment à dater… Donc, je te disais qu'Alessio Lega a fait une chanson pour défendre la joie et plus exactement, dans laquelle il incite à défendre la joie. La joie concrète, cette joie qui donne des couleurs à la vie quotidienne, à cette vie unique qui est la tienne, la mienne, celle de tout le monde. C'est une chanson en quelque sorte philosophique, une chanson épicurienne avec la joie d'être comme principe de vie. Une vie tranquillement défendue contre les pesanteurs et les grandiloquences , une incitation à la sérénité volontaire.


Pour être épicurien, ce doit l'être, si j'en crois ton commentaire. Voyons voir tout ça, reprenons notre tâche et tissons le linceul de ce vieux monde tristounet, triste, racorni entre l'ennui et le rire forcé et cacochyme.



Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.



Défendez la joie comme une tranchée ;
Défendez-la du scandale et de l'habitude ;
Défendez-la des misérables et des misères,
Des absences transitoires et des définitives.
Défendez la joie comme un principe ;
Défendez-la de la stupeur et de la douleur ;
Défendez-la des neutrons et des neutres ;
Des diagnostics graves et des grand râleurs.

Défendez la joie comme une bannière ;
De la mélancolie et des coups de tonnerre,
Des faux ingénus, des vraies charognes,
Des discours rhétoriques, des crises cardiaques,
Des maux endémiques et des barons académiques.
Défendez la joie comme destin ;
Défendez-la du feu et des pompiers ;
Des tentatives de suicide, des parfaits assassins,
Des travaux éreintants, du stress des congés,
De l'obligation d'être heureux,
En série, tous joyeux.

Défendez la joie comme une certitude.
Défendez-la de la suie et de la rouille,
De la célèbre patine que le temps impose,
De celui qui la prostitue.
Défendez la joie comme un droit ;
De Dieu et de l'hiver qui vient, défendez-la !
De toutes les majuscules que la mort impose,
De la vie tordue,
Des peines, du hasard et des pensées cyniques,
Défendez la joie... surtout des comiques.