LE
RETOUR DE DON QUICHOTTE
Version
française – LE RETOUR DE DON QUICHOTTE – Marco Valdo M.I. –
2014
Voici
donc à nouveau un Don Quichotte... Un personnage que l'on rencontre
assez souvent ici... à commencer par qui insère des chansons dans
ce site sous le nom de Don Quichotte 82 et par celui qu'incarna
Jacques Brel [[39065]]. Mais la chanson qui raconte le retour de Don
Quichotte est de Marco Rovelli, lui-même assez libertaire. On va
donc avoir un retour de Don Quichotte dans la quotidienneté que nous
connaissons : « peuplée de rapaces, de marchands et de
banquiers » ; et, tout comme il s'en était pris dans le
passé aux géants, aux moulins... le Don Quichotte d'à présent va
se déchaîner contre le système et ses servants.
J'aime
beaucoup, dit Lucien l'âne en se redressant du col. J'aime beaucoup
l'idée d'un Don Quichotte libertaire. Cela dit, il me semblait qu'il
l'était déjà depuis longtemps. Et je suis bien placé pour en
parler, car comme je te l'ai sans doute déjà dit, j'étais en ces
temps-là l'âne de Sancho qui suivait à la trace Rossinante et son
cavalier fantasque. Comme bien d’autres fois, il faut le dire ici
sans honte, je fus battu et je dus prendre la fuite. Avec un tel
compagnonnage, c'était presque une habitude de vie.
Ah,
Lucien l'âne mon ami, je te vois d'ici comme si j'y étais te
carapatant dans la caillasse entraînant Sancho loin des plaies et
des bosses. Et, soit dit en passant, tu avais parfaitement raison de
prendre la fuite. Face à pareilles brutes, je ferais pareil, encore
aujourd'hui.
Tu
sais, Marco Valdo M.I., il y a une chose que j'ai apprise au travers
de toutes ces tribultaions : il y a un art de la fuite...
D'ailleurs, on ne fuit pas, on ne déserte pas pour épargner les
autres, par grandeur d'âme, par héroïsme... Mais d'abord et
principalement, pour se sauvegarder – ce qui est le début de la
sagesse et de toute façon, la seule façon de préserver une
quelconque possibilité d'avenir et tout simplement, de vie. Ce qui
est quand même l'essentiel. Le martyr n'a pas d'avenir.
Donc,
te voilà cavalant... pour assurer l'avenir et la vie à Sancho, à
toi-même et conserver ainsi à Don Quichotte ses indispensables
amis. Qu'aurait-il fait sans vous ? Et puis, la fuite... Regarde
ce qu'il en fut des « héros » cités dans la canzone...
Après avoir un temps vaincu, Spartacus a dû fuir – mais pas assez
tôt, pas assez vite, pas assez loin... Ce fut l'hécatombe et la fin
du rêve. Les anabaptistes
de Münster
n'ont pas fui, mal leur en a pris, ils furent tous massacrés. Pour
Dolcino
et Marguerite,
la chose est claire... Ils n'avaient pas grand choix...
Cela,
je le sais aussi, vu que c'était moi qui portait la Marguerite, dit
Lucien l'âne, alors que nous fuyions les armées de déments que le
pape avait mis à nos trousses, et comme durent le faire les autres
partisans de Valdo, nous prîmes la route et les chemins des Alpes
pour finir en haut de ce qui est aujourd'hui le monte Rubello (Mont
Rebelle), qui leur doit son nom. Monte Rubello où il y a le monument
qui rappelle le massacre de que les sbires catholiques firent des
dolciniens, coupables essentiellement de répandre leur message
d'égalité et de fraternité et aussi, évidemment de liberté, y
compris amoureuse. Ce sont des successeurs de la Fraternité des
Pauvres de Valdo... Je me souviens avec beaucoup de tendresse comment
les deux amoureux s'en allèrent se faire brûler par les papistes.
Petit
parenthèse à propos de ce monument à Dolcino : en 1907,
quelques bonnes gens édifièrent en haut du monte Rubello un
obélisque de 12 mètres commémoratif du combat, de la résistance
et du massacre des Dolciniens par les gens de l'Église Catholique
Apostolique et Romaine. Vingt ans plus tard (1927), les fascistes
s'empressèrent d'abattre ce monument à la liberté... On réinstalla
une stèle au même endroit en 1974 ; une lapidaire rappelle
l'attentat fasciste...
AU
SIXIÈME CENTENAIRE
1307-1907 DU MARTYR DE FRA DOLCINO LE PEUPLE ÉLEVA CET OBÉLISQUE DÉTRUIT DE NUIT PAR LES FASCISTES (EN 1927) SYMBOLIQUEMENT RÉÉDIFIÉ LE 15 -9-1974 |
On
devrait aller y faire un tour un de ces jours du côté de Bielle...
Je m'y dégourdirait un peu les jambes..., dit Lucien l'âne en
souriant aux étoiles.
Et
puis, dans la canzone, dit Marco Valdo M.I., il y a Giordano
Bruno... Giordano Bruno, lui aussi, a droit à une statue à Rome au
Campo dei Fiori. On sait que Giordano Bruno a lui aussi tenté de
fuir l'Inquisition, ce qui l'obligea à un grand périple. C'est
ainsi qu'il fut ballotté ici et là, jusqu'à ce que mis nu, la
langue entravée par un mors de bois l'empêchant de parler et de
crier, sur le Campo
de' Fiori,
il fut supplicié sur le bûcher. En souvenir de cette atrocité, on
y dressa une statue le représentant. L’histoire de cette statue
est elle aussi assez intéressante... et née d'une résistance à
l'impérialisme catholique qui tente d'écraser toute vie civile.
Ainsi, proposée en 1879, elle fut d'abord interdite sous pression de
l'Église ; suite à l'excommunication des francs-maçons
(rationalistes, athées...) par le Pape de l'époque – en 1884, on
l'autorisa. Elle fut créée et édifiée par le sculpteur
Ettore Ferrari en
1889. Aux temps de Mussolini, le sculpteur Ferrari fut l'objet de
mille persécutions en raison également de son appartenance au
Grand-Orient, dont il fut le grand-maître de 1904 à 1917. Le lieu
est toujours fleuri aux couleurs de la liberté – liberté de
parole, liberté de pensée, chaque année.
Giordano
Bruno..., dit Lucien l'âne un peu rêveur. Je l'ai accompagné lui
aussi un temps dans ses pérégrinations au travers de l'Italie
d'abord, puis à Genève chez les calvinistes, puis en France, puis à
Wittenberg chez les luthériens... Non, je ne l'avais pas accompagné
à Londres chez les anglicans ; à l'époque, figure-toi que
j'étais en Espagne et pour cause... je suivais les aventures de Don
Quichotte. Puis, pour Giordano Bruno, il y eut son malheureux retour
en Italie et son procès... qui finit si mal. Sais-tu qu'il déclara
à ses juges lors de sa condamnation : « Vous
éprouvez sans doute plus de crainte à rendre cette sentence que
moi à la recevoir. » Giordano Bruno fut souvent sollicité par
les autorités à se rétracter, comme notre ami
Adam.[[http://www.antiwarsongs.org/canzone.php?lang=it&id=47896]]
Le
personnage suivant est désigné par son prénom de Baruch... Il
s'agit à l'évidence du philosophe Baruch Spinoza, qui quant à
lui, s'il n'a pas voulu fuir sa communauté (juive), dont il était
banni, n'en a pas moins poursuivi sa route avec moult prudence et la
prudence est une des formes les plus subtiles de la fuite.
Malheureusement, il n'avait pas vu venir une ennemie des plus
terribles : la silicose ; ce fut elle qui l'emporta.
La
silicose ? Un philosophe ?, dit Lucien l'âne. Cela peut
paraître surprenant, mais en fait, moi qui l'ai vu faire, c'était
car pour vivre il devait exercer le métier de tailleur de verres de
lunettes – en tous genres. C'était un travail très méticuleux,
de haute précision et comme tu l'as dit, très dangereux, la
poussière des verres taillés finissait dans les poumons et les
détruisait.
Passons
les deux peintres, repris ici pour leurs créations et il me reste à
te dire le militant de la décolonisation et de la révolution en
Afrique et en Amérique latine que fut George
Matéi,
mort en l'an 2000, successivement marin en Afrique équatoriale,
soldat en Algérie, passeur de frontières, fabricant de faux
papiers, journaliste et écrivain.
Comme
quoi, Marco Valdo M.I. mon ami, la canzone est souvent plus
signifiante qu'il n'y paraît et sur ses airs, elle emporte pas mal
d'Histoire ; elle raconte le monde et découvre bien des
facettes de cette Guerre de Cent Mille Ans que les riches et les
puissants font aux pauvres afin de maintenir leur domination,
d'imposer leur système, d'empêcher toute mise en cause de leurs
privilèges et de conséquence, toute pensée nouvelle et par nature
contestatrice de l'ordre existant, laquelle est irrémédiablement
qualifiée d'hérétique (autrefois), de terroriste (aujourd'hui) et
d'anarchiste (toujours). Dès lors, il nous faut reprendre notre
tâche et tisser le linceul de ce vieux monde persécuteur,
excommunicateur, inquisiteur, répressif et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Mais mon cher Cervantès, la liberté
Quel mot étrange, liberté
Liberté pourquoi, pour qui liberté
Liberté putain, putain de liberté
La seule liberté, c'est rêver sans maître
Celle que j'aime, la seule dont je veux dépendre
Dans
un temps de rapaces rusés
Où les dieux sont marchands ou banquiers,
Je reviens avec Rossinante combattre
La lance au poing, la voilà ma liberté.
Liberté, c'est pouvoir dire : je te donne,
Je te donne la main
Même si l'homme est un loup pour l'homme,
S'il n'y a pas de pardon pour qui aime plus, qui aime mal,
Je n'ai jamais cessé de lutter
Contre les moulins du mal
Libre d'enchaîner, de moudre du vent,
D'épandre tempête, ce dont le trône ne se soucie pas mal.
Où les dieux sont marchands ou banquiers,
Je reviens avec Rossinante combattre
La lance au poing, la voilà ma liberté.
Liberté, c'est pouvoir dire : je te donne,
Je te donne la main
Même si l'homme est un loup pour l'homme,
S'il n'y a pas de pardon pour qui aime plus, qui aime mal,
Je n'ai jamais cessé de lutter
Contre les moulins du mal
Libre d'enchaîner, de moudre du vent,
D'épandre tempête, ce dont le trône ne se soucie pas mal.
Mais
mon cher Cervantès, la liberté
Quel mot étrange, liberté
Liberté pourquoi, pour qui liberté
Liberté putain, putain de liberté
La seule liberté, c'est rêver sans maître
Celle que j'aime, la seule dont je veux dépendre
Quel mot étrange, liberté
Liberté pourquoi, pour qui liberté
Liberté putain, putain de liberté
La seule liberté, c'est rêver sans maître
Celle que j'aime, la seule dont je veux dépendre
Semer des visions comme le sable sur l'arène
Ne pas presser le temps
Car chaque chose vient en son temps
Comme Spartacus qui par l'épée brisa les chaînes
Comme
ensuite firent à Münster ces frères anabaptistes
Et sur les montagnes Dolcino avec la belle Marguerite
Qui montèrent sur le bûcher entouré de soldats
Et le soleil se dénoua entre leurs doigts
Et sur les montagnes Dolcino avec la belle Marguerite
Qui montèrent sur le bûcher entouré de soldats
Et le soleil se dénoua entre leurs doigts
Comme Giordano Bruno sur cette place
Maintenant défleurie, savait que la vie est une et sans fin…
Et Baruch le renégat dans son habit d'étoiles
William Blake chante, jouit, rit
Et mon bien aimé Van Gogh, saint parmi les saints
Avec Georges Mattéi, une communauté d'amis
Et le poète illuminé de la commune, sont de grandes gens
Et l'infini défilé d'anonymes gens
Et moi parmi eux à faire chorus et à dégainer la lance
Accompagné Sancho Pança, plein de vaillance
Mais
mon cher Cervantès, la liberté
Quel mot étrange, liberté
Liberté pourquoi, pour qui liberté
Liberté putain, putain de liberté
La seule liberté, c'est rêver sans maître
Celle que j'aime, la seule dont je veux dépendre
Quel mot étrange, liberté
Liberté pourquoi, pour qui liberté
Liberté putain, putain de liberté
La seule liberté, c'est rêver sans maître
Celle que j'aime, la seule dont je veux dépendre
C'est
pour la liberté, pour elle seule que nous vivons
La liberté, c'est être à la hauteur de l'humaine nation
Car je le sais, je le crois, le temps ensuite viendra
Où à la peur, la liberté jamais plus ne cédera.
La liberté, c'est être à la hauteur de l'humaine nation
Car je le sais, je le crois, le temps ensuite viendra
Où à la peur, la liberté jamais plus ne cédera.