mardi 21 avril 2015

BEAU PAYS L'ITALIE

BEAU PAYS L'ITALIE


Version française – BEAU PAYS L'ITALIE – Marco Valdo M.I. – 2015
Chanson italienne – Bel paese l'ItaliaOlindo Guerrini – 1901
Publiée le 21 février 1904 dans le n°. 5, anno I d'« Action Socialiste », hebdomadaire de la section socialiste de Brindisi (« Soyez des hommes, et pas des moutons fous !  », un des exergues en première page).




Le coup tordu de Napoléon le Petit sauva la Papauté et le Vatican, ouvrant ainsi la voie à la reconquête de l'Italie par les tenants du catholicisme



Chanson superanticléricale publiée dans le journal des socialistes des Pouilles, aux idées proches de celles du philosophe marxiste Antonio Labriola, pour déplorer comment après 1901 en Italie – alors gouvernée par Giolitti (libéral), mais traversée par de forts courants nationaux-catholiques – on avait déversé des bandes de religieux de tous ordres, surtout des Jésuites, chassés de France où le gouvernement de défense républicaine de Pierre Waldeck-Rousseau (celui qui auparavant avait légalisé les syndicats des travailleurs) avait promu une loi sur l'associationnisme qui soumettat à juste titre les congrégations religieuses, surtout celles qui s'occupaient de l'éducation des enfants, à la reconnaissance et à l'étroite vigilance de la part de l'État. Cela avait amené la fermeture de centaines d'instituts religieux et la migration en masse de milliers de « corbeaux » vers le « sein de la Sainte Mère l'Église ».
Et la « pédéraste armée de moines » encore aujourd'hui, à 110 ans du moment fut composée cette chanson caustique, continue dans ses infamies : à Malte, deux prêtres viennent d'être condamnés par tribunal ordinaire à de discrètes peines de détention pour avoir abusé de nombreux mineurs dans un orphelinat religieux ; et en Irlande, on a vu ces derniers jours la publication du « rapport Cloyne » dans lequel le gouvernement dénonce le fait que les crimes sexuels au détriment de mineurs accomplis par des prêtres jusqu'il y a peu furent cachés par les évêques et le Saint-Siège qui chercha « à bloquer une enquête dans un État souverain, démocratique et républicain, il y a pas plus de trois ans, pas il y a trente ans », a déclaré le premier ministre irlandais Enda Kenny.
« Quel beau pays ! La descente des corbeaux des Alpes françaises dans la plaine italienne a suscité les colères de toute la démocratie, même de la tricolore qui a jusqu'ici flirté avec le Vatican. Et les journaux sont encombrés de protestations sensationnelles ; on voudrait rien de moins que l'application rigide de la vieille loi sur les congrégations… Mais plutôt que de s'abandonner à de mélancoliques considérations sur les lois , il vaudrait mieux relire les vers caustiques du poète Olindo Guerrini :  »



Sans relever toutes les allusions que contient ce texte, juste deux mots concernant Garibaldi… qui apparaît tout à la fin à Mentana. Il s'agit de la dernière bataille que livra Garibaldi à Mentana face aux troupes françaises de Napoléon III , en novembre 1867. Bataille perdue face aux nouveaux fusils Chassepot. Le coup tordu de Napoléon le Petit sauva la Papauté et le Vatican, ouvrant ainsi la voie à la reconquête de l'Italie par les tenants du catholicisme. À cet égard, plus d'un siècle après la chanson, la situation n'a fait qu'empirer. On peut à présent constater que l'Italie de la fin du XIXième siècle, qui était un pays moderne et laïc, a basculé (aidée en cela par le fascisme, qui signa les infâmes accords du Latran) dans la bigoterie institutionnalisée au point d'être devenue une sorte de Catholand ou de Katholikistan. Pauvre Garibaldi, en effet !

Ainsi Parlait Marco Valdo M.I.



La pédéraste armée de moines
Que nous a envoyée la France
À présent, dans ses béates fainéantises
S'épand parmi nous et déroule sa panse

S'abattent les louches compagnies
Leurs instruments et leurs professeurs sacrilèges
Qui distillent poisons et eaux-de-vie
Et fondent des collèges.

Beau pays, l'Italie belle
Pour les tripes sacrées des charognards
Qui parmi les poux de leurs immondes cellules
Sèment les bâtards.

Beau pays ! Si l'Autriche impose
Son veto, si se bouge l'Espagne
Voici qu' accourent les frères
En ce merveilleux pays de Cocagne

Comme les brames de leurs bandes immondes
Sont pour nous des ordres,
S'ils veulent téter, notre mère l'Italie
A de grandes mamelles

Ici, leurs clergés puants
Ici, trouvent la terre qu'ils préfèrent
Ici, parmi nous où croissent les couvents
Et croulent les écoles.

Et les juges du roi servent la messe
Avec le cierge par devant
Et la bannière de l'Italie est remise
À la garde du Vatican.

La prison est prête pour qui ne croit pas
À la vertu des saints et des vierges !
Quel beau pays pour le Saint-Siège
Et les moines aux semelles de bois.

Hélas, c'est ce déferlement
De prêtres et de bandits
Qu'à Mentana, tu combattis vainement
Pauvre Garibaldi !