lundi 19 avril 2021

UNE CHANSON NOCTURNE

 

UNE CHANSON NOCTURNE





Version française – UNE CHANSON NOCTURNE – Marco Valdo M.I. – 2021

Chanson italienne – Una canzone di nottePippo Pollina – 1986



Nuit noire, quand les chats veillent sur la ville



Une chanson de nuit, gucciniane dès le titre, qui – même si elle n’est pas explicitement contre la guerre – capte très bien un état d’esprit, quand il semble que nous n’en faisons pas assez ou que nous sommes entourés de trop de gens indifférents. Ou que nous sommes aussi indifférents.

Les pensées qui viennent avec la nuit.

(Lorenzo Masetti)




Dialogue maïeutique


Voici, Lucien l’âne mon ami, une chanson nocturne. « UNE CHANSON NOCTURNE », c’est même son titre.


Une chanson nocturne, dit Lucien l’âne, ça n’a rien d’exceptionnel, on en a déjà rencontré plusieurs qui portaient ce titre.


Oui, dit Marco Valdo M.I. , tout au contraire, c’est bien pour ça que c’est exceptionnel. Jusqu’ici, toutes les chansons nocturnes (en italien : canzone di notte) étaient l’œuvre du même auteur. Francesco Guccini avait écrit quatre de ces chansons que chemin faisant il dut numéroter, c’étaient : Canzone di notteCanzone di notte n°2Canzone di notte n. 3Canzone di notte n.4. Celle-ci n’est pas de lui, mais de Pippo Pollina, lequel par ce titre vise sans doute à marquer une certaine parenté avec les chansons de Guccini, une sorte continuité en écrivant à la manière de Guccini.


Voilà pour le titre, dit Lucien l’âne, et qu’en est-il du reste ?


La chanson nocturne de Pollina, répond Marco Valdo M.I., se veut une réminiscence des chansons nocturnes de Guccini, ces chansons qu’on imagine imaginée dans la nuit noire, quand les chats veillent sur la ville du haut des toits et elle le dit clairement (du moins dans sa version française, où l’explicitation est nécessaire) :


« Et alors, chers amis,

Permettez-moi une fois

De faire comme Guccini.

Écoutez-moi, cette fois

Chanter cette chanson de nuit. »


C’est donc une parenté revendiquée. Du reste, elle s’inscrit dans le droit fil de son titre, c’est-à-dire qu’elle a toutes les allures d’une méditation. Elle retrace comme un bilan de vie, elle fait le point, elle expose une catharsis, qui s’étend à la société (italienne). Et la chanson conclut :


« Sans imposer de vérité,

En gardant ce désir sensé

De cracher ce que j’ai à l’intérieur

Sans crainte et sans peur. »


Eh bien, dit Lucien l’âne, voyons ça et tissons le linceul de ce vieux monde conservateur, stationnaire, perclus et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane








Il est v
ingt-trois heures, il fait noir

Et je n’ai pas sommeil ce soir ;

Je ne veux pas rejoindre Morphée

Qui les bras ouverts, comme toute l’année,

M’attend entre le drap et l’oreiller pour

Rêver que demain sera un autre jour


Et alors, chers amis,

Permettez-moi une fois

De faire comme Guccini.

Écoutez-moi, cette fois

Chanter cette chanson de nuit

Permettez-le-moi cette fois-ci.


Si
je n’avais le cœur blessé,

Si je n’étais pas si affecté

Par cette étrange maladie

Appelée nostalgie,

Je ne me devrais pas me tourner

Vers le temps passé,

Les souvenirs et la mémoire

Aux images maintenant noires.


Je me vois souventes fois

Discutant pendant des heures

De la paix, de l’anti-mafia,

Des gens qui meurent.

Puis, je rentre chez moi

Cahin-caha et je pleure

Comme un chien qui ne sait

Comment retrouver son toit.


Je vois Pierre

Et je réalise qu’un révolutionnaire

Sait cacher ses rides,

Et dissimuler ses vides.

Et si Antoine à la quarantaine

Cesse de courir la prétentaine,

Je donnerai ma fierté au premier

Qui vient à passer.


Il y en a beaucoup dans la ronde

De ces artistes bon marché

Qui snobent tout le monde

Et se croient arrivés,

Qui se moquent des autres

Et disent « Qui peut bien être

L’idiot, le crétin obscène

Qui les a mis sur la scène ? »


Heureusement, certaines fois

Dans les rangs des églises et des partis,

On organise des marches, des défilés

Aux fins de se rappeler

Que chacun a une seule mère,

Que nous sommes tous frères,

Tous unis par un idéal de fraternité.

Si pour une procession nocturne

Sont venues 30 000 personnes,

Qui donc a inventé la mafia ?

Sûr, à Palerme, elle n’existe pas ;

Mais peut-être chez les Danois,

Ce doit être le fantasme ésotérique

D’un journaliste nordique.


Il vaut mieux, je le garantis,

Sourire et sourire encore,

Car il n’a pas tort

Ce chanteur qui dit

Qu’ici, on vit de l’air du temps

Et de football aussi évidemment,

Car pendant la journée, bouche close,

On ne peut parler d’autre chose.


« 
Avez-vous gagné au pari ? »

« Forza Juve », « Forza Rossi »,

Dans les usines, dans les ministères,

Dans les maisons, jusqu’en enfer.

Le froid de la nuit

S’assoupit sur ma peau

Et me rappelle que bientôt

L’hiver sera à nouveau ici.


Et mon père répète

Qu’on meurt

Sur les routes d’un rêve

Sans couleurs.

Je regarde dehors tous ces gens

De leur charrette préoccupés

Et qui la font rouler sans

Se soucier des bœufs attelés.

La ville me crache au visage

L’écho de mes vers hors d’usage,

Comme aujourd’hui, on ne vole pas,

Comme on l’a dit déjà,

Je vais essayer de marcher

Pour faire rire ma guitare

Qui réclame d’autres soirs

Pour jouer.


Voilà, maintenant
ça va.

Ma vue commence à s’embrumer,

Je délire depuis une heure, déjà,

Il faut m’excuser,

Il faut me pardonner,

Je perds ma raison, parfois.


Et
quand me vient l’envie

De m’enfouir sous terre,

Je pense aux yeux de ma mère,

Aux mains de mes amies,

Aux étoiles, au ciel

Et les flots éternels

Me poussent tout de suite

À rentrer au plus vite.


Chers amis, j’en suis sûr déjà

Parmi vous certains pensent parfois

Avoir entendu ces choses-là.

Les notes et les textes sont certains.

Ainsi, il est vrai que demain

Nos jours ne changeront

Pas leurs connotations.

Et pour conclure, je chante

Aux oreilles qui portent

De prudents bouchons

Sans fioritures, ni prétentions,

Sans imposer de vérité,

En gardant ce désir sensé

De cracher ce que j’ai à l’intérieur

Sans crainte et sans peur.