La Stevenine pendue
Chanson
française –
La
Stevenine pendue
–
Marco Valdo M.I. – 2018
Ulenspiegel le Gueux – 80
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXXV)
Ulenspiegel le Gueux – 80
Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – III, XXXV)
Dialogue
Maïeutique
Lucien
l’âne, mon ami, connais-tu Chantecler le coq ancien qui sut venir
à bout de la ruse de Renart le goupil ? Ici, il chante lui
aussi « Trinquons aux Gueux ! » et nous renvoie
ainsi tous à l’ancien Roman du Renart, qui n’est rien d’autre
qu’une grande chanson, écrite vers le XIIᵉ siècle. Je vois à
ton air éwaré que tu te demandes ce que vient faire ici ce propos à
propos du Roman de Renart, alors qu’on est censé raconter une
histoire qui se passe environ 400 ans plus tard. Je le vois et je
m’empresse de te répondre en te rappelant que le signal de
reconnaissance des Gueux est à l’appel, le chant de l’alouette
des champs et à la réponse, le chant du coq, celui de Chante Clair,
orthographié Chantecler et non Chanteclair, comme on aurait pu le
penser. Et dès le début de la canzone, on le voit qui reprend
l’inquiétant « Trinquons avec les Gueux ! »
Voilà
bien, Marco Valdo M.I. mon ami, où mène l’abus de littérature !
Mais soit, qu’y a-t-il dans cette canzone à part ce coq qui chante
clair ?
Comment
dire, Lucien l’âne mon ami, il y a dans cette canzone la fin de
l’histoire de Stevenine, la fin de Stevenine, la fin de Gilline et
la fin de toute l’aventure de l’Arc-en-Ciel et de l’Abeille. Il
m’aura fallu pas moins de 5 chansons, dont celle-ci, pour arriver à
tourner cette page.
De
fait, Marco Valdo M.I. mon ami, je me souviens très bien de toutes
ces chansons :
La
Vendeuse d’Amour ;
L’Abeille
et l’Arc-en-Ciel ;
La
Fête chez Stevenine ; Trinquons
aux Gueux !.
Et
j’y ajouterais volontiers celle qui les précède : Les
Gueux des Bois,
car
tout cet épisode a commencé au camp des Gueux et tout se termine
dans le même camp. Toutefois, il serait bel et bon de donner
quelques détails de la conclusion de l’aventure. Que deviennent
tous ces gens ?
Comme
tu pourras les constater, Lucien l’âne mon ami, la canzone
détaille fort bien les choses, mais globalement, les Sept et leurs
prisonniers ont comme objectif de rejoindre la côte et les Gueux de
mer pour servir dans la flotte de liberté ; les folles-filles
s’en iront à leur suite divertir et servir les équipages –
moyennant, comme il se doit, honnête rétribution et primes sur le
butin de guerre. D’où il appert que même en amour, on ne perd pas
le Nord.
Voilà
qui est réjouissant, dit Lucien l’âne. Je me demande quand même
ce qui a bien pu arriver pour qu’on pende la Stevenine, comme
l’annonce le titre de la chanson.
En
fait, Lucien l’âne mon ami, pour la Stevenine, tout se termine
fort mal. Elle qui régnait en maîtresse absolue sur son Arc-en-Ciel
et ses folles-filles, se trouve subitement ruine, prisonnière et
ramenée par décision de Till au rang de servante, car en raison de
son âge et de sa conformation, elle ne peut plus exercer valablement
le métier. Et qui plus est, ramenée au rang de servante de ses
anciennes esclaves, alors que la Gilline, sa complice et son âme
damnée, toujours par la volonté de Till, est préservée de ce
sort. Dès lors, de jalousie et de rage, la Stevenine va assassiner
la Gilline d’un coup d’aiguille (à tricoter ?) en plein
cœur. Après un passage
par-devant le tribunal des Gueux, elle sera conduite à la potence.
Fort
bien, dit Lucien l’âne, mais que deviennent Till et Lamme, car tu
n’en pipes pas mot.
Oh,
Lucien l’âne mon ami, ne m’en demande pas trop. La canzone te
dira tout.
Alors,
Marco Valdo M.I., il ne nous reste plus qu’à reprendre notre tâche
et à tisser le linceul de ce vieux monde aveugle, sourd, méchant et
cacochyme.
Heureusement !
Ainsi
Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
Trinquons
aux Gueux !, chante Chantecler.
Lamme,
Till et les sept bouchers.
Avec
leurs cordes, ils lient les happe-chair
Et
emmènent tout ce monde prisonnier.
Jusqu’au
camp des Gueux,
Tout
le monde, sauf deux
Des
mercenaires par Till payés
Pour
espionner les royales autorités.
Du
camp, les Sept et leurs captifs iront
Se
joindre aux Gueux de mer
Pour
faire vaillante guerre
Sous
peine d’être pendus pour désertion.
Et
les filles, folles-filles deviendront
Folles-filles
de la mer
Et
à donner douceur à la guerre
Leur
part de butin recevront.
Till
dit : « De ces belles galantes
Qu’elle
a tant exploitées et soumises,
Stevenine
sera la servante
Et
lavera cottes, draps et chemises.
Gilline,
la séductrice en diable,
Par
la volonté d’un Till intraitable,
Tenant
sa viole entre ses bras,
En
sa robe de brocart restera. »
Les
autres filles de jalousie folles
Déversent
d’étranges paroles :
« Till
d’elle s’affole ».
Et
la Gilline chante sur sa viole.
On
ferme l’Arc-en-ciel au jour levant
Et
par les champs, on arrive au camp ;
Chante
l’alouette dans le vent
Et
le coq répond hardiment.
Le
troisième jour, d’une pointe en plein cœur,
Gilline
se meurt, Gilline est morte,
Tuée
par la baesine que la rage emporte.
Alors,
pendue, Stevenine connaît sa male heure.
Till
et Lamme se remettent en chemin :
L’un
va à Bruges chercher sa femme ;
L’autre
rêve à s’éveiller à Damme.
Dans
les bras de Nelle, au clair matin.