dimanche 31 janvier 2016

COUP DE JOUR

COUP DE JOUR


Version française – COUP DE JOUR – Marco Valdo M.I. 2016
Chanson italienne – SlintIl Teatro degli Orrori – 2014




Poursuivre les cormorans noirs
Qui plongent pour pêcher










Le titre rappelle le nom du band américain et le texte parle d'un sujet brûlant, d'un homme dans un asile, une question qui vous est chère vu que vous soutenez la campagne pour l'abolition de la contrainte mécanique. P : Slint est un morceau très complexe, surtout du point de vue narratif. Le titre oui, suggère le groupe, qui fait partie de notre tradition culturelle et artistique de manière cruciale, nous aimons tous Spiderland et, dans Spiderland, nous aimons particulièrement ce chef-d’œuvre qu'est Washer, une de ces morceaux inoubliables qui vous restent dans le cœur, dont il est impossible d'échapper à la beauté. Slint dans le vocabulaire urbain anglais indique même rayon de lumière très subtil . Ceci dit, j'ai cherché à m'imaginer un possible, un vraisemblable moi-même, emprisonné dans un SPDC, dans un Service Psychiatrique de Diagnostic et de Soin, chose qui pourrait arriver à n'importe qui par le Traitement Sanitaire Obligatoire, TSO, cette espèce de séquestration de personne légalisée. Grâce à Dieu en fait je n'ai jamais dû en subir un, mais tant de mes amis, de personnes que je connais et que nous avons connu, l'ont subi et comment.
Hier, nous étions chez Feltrinelli à Milan et s'est présenté un ami de Facebook qui en a subi trois ! Et il a 28 ans. Une chose dévastatrice, une humiliation sans fin. La signification profonde de Slint est que la musique est thérapeutique, pas la psychiatrie. Cet homme seul, désarmé face à l'idéologie psychiatrique et à la contrainte mécanique, retourne en esprit à son disque préféré qui est justement Spiderland, à cette chanson préférée qui est Washer, et retrouve la force de l'espoir.



Parfois, je ne sais pas pourquoi,Il me prend le vouloir
De réécouter mes vieux disquesEt de retrouver Mon album préféréEt le fil conducteurDe mes expériences,De mes enthousiasmes,De mes désespoirs,J'ai été jeune aussi, moi .

Parfois, je ne sais pas pourquoi
Il me prend l'envie de
Retourner à Sant'erasmo
Poursuivre les cormorans noirs
Qui plongent pour pêcher
Sans se soucier de moi.
Un très subtil rayon de lumière solaire
Pénètre par un interstice.

Un très subtil rayon de soleil pénètre par une fissure
Éclaire le noir automne de mon cœur.
Si je pouvais l'avoir un peu plus grand,
Ce cœur béni .
Mais il est comme ce couloir d'hôpital
À sens unique
Sans issue.

Ils le tiennent en ordre
Lumineux et propre
Comme ma panique
D'un tel bon goût que parfois je n'arrive pas à respirer
Il n'y a pas les barres
J'aurais déjà volé en bas
Maintenant je suis silencieux,
Car s'ils m'entendent parler tout seul et à haute voix
Arrive l'infirmier, celui sympathique qui se moque de moi
Puis, me lie, me lie. Comme ce matin.
Maintenant je me rappelle
10 minutes de paix sur terre et les hommes et les femmes de bonne volonté
10 minutes de frissons, de nostalgies,
De morsures,
Et la sensation de ne pas être seuls.

Il y a des individus, qui comprennent
Ô combien, ce maudit monde
Et même, si on n'a plus confiance en personne,
On doit être sincère et raconter franchement
Ce qu'on pense des cormorans
Qui plongent pêcher sans se soucier de toi.
En bas, en bas, en bas, en bas, aaaa… en bas.


vendredi 29 janvier 2016

ION, L'IMMOLÉ


ION, L'IMMOLÉ



Version française – ION, L'IMMOLÉ – Marco Valdo M.I. – 2012
Chanson italienne – Ion – Il Teatro degli Orrori – 2012
Chanson dédiée à ION CAZACU







ION, L'IMMOLÉ



Pour dire très brièvement les choses : ION CAZACU était un ouvrier roumain qui fut immolé par le feu par son patron. Comment dire autrement la mort d'un homme sur lequel un patron a délibérément versé un bidon d'essence et l'a enflammé ?

En effet, dit Lucien l'âne, « IMMOLER » est le mot juste.

C'est bien pour cela que j'ai pris – pour la traduction en langue française – un titre très explicite. « ION » est un titre très sobre, mais pour ceux qui ne connaissent pas sa terrible fin, c'est un titre fort énigmatique. Je voulais qu'il soit dit clairement qu'il s'agissait d'une mise à mort...

Je pense que tu as bien fait. Au moins, on sait de qui et de quoi il s'agit, dit Lucien l'âne sentencieusement.

Et la pire absurdité de cette mort inutile est qu'elle est née de la revendication d'un simple droit, d'une demande de justice sociale : ION était venu trouver ce patron pour qui il travaillait depuis un certain temps afin de régulariser sa situation, pour demander de travailler de façon déclarée, de bénéficier d'un contrat en règle. La réponse de ce « patron » fut cette immolation. Ce fut une méchanceté assassine, une immense bêtise meurtrière. Comme dit Georges Brassens : « Quand on est con, on est con... » et ce patron est un monument de connerie. Peu nous importe son nom, le lieu où il peut bien être à l'heure actuelle... Nous lui souhaitons juste de vivre en revoyant chaque jour et chaque nuit l'épouvantable stupidité qu'il a commise. Pour le reste qu'il ajoute à ses cauchemars la tristesse et la détresse de Nicoletta, l'épouse d'ION, ainsi que celles de Fiorina et d'Alina, les filles d'ION.

Une certaine pudeur, un sentiment de réserve essaie de retenir mes propos, de la cantonner dans un sarcophage de deuil, mais, dit Lucien l'âne, je ne peux me retenir de penser que cette terrible scène est un épisode – un parmi d'autres – de cette Guerre de Cent Mil:le Ans que les riches font aux pauvres pour les exploiter, pour les contraindre à accepter les pires conditions de travail, pour tirer profit par tous les moyens de leur détresse... afin – pour les riches – d'accroître encore leur richesse, d'étendre leur domination... Et, pour ION et tous les autres, au nom de tous ceux qui sont détruits par le travail et par la rapacité des riches, tissons, Marco Valdo M.I., mon ami, tissons le linceul de ce vieux monde dément, méprisant, arrogant, absurde, méchant, bête et cacochyme.

Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.




Ion
Ion
Ta peau n'est plus
Ion
Tu n'es plus
Ion n'est plus

Mais
Pourquoi
Pourquoi
Un grand amour
Finit ainsi

Ion
Ta peau n'est plus
Ion n'est plus

Mourir n'est pas nouveau
Mais vivre maintenant est si difficile

Mais
pourquoi
une vie honnête
finit ainsi

Ion
Ta peau n'est plus
Ion n'est plus

Chacun
Est seul
Chacun avec un poids dans l'estomac
Chacun avec un nœud dans la gorge

Ion
Ion
Ion
(ad infinitum)


Trois cents ans de torture

Trois cents ans de torture


Chanson française – Trois cents ans de torture – Marco Valdo M.I. – 2016

Ulenspiegel le Gueux – 24

Opéra-récit en multiples épisodes, tiré du roman de Charles De Coster : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs (1867).
(Ulenspiegel – I, LXXIX)

Cette numérotation particulière : (Ulenspiegel – I, I), signifie très exactement ceci :
Ulenspiegel : La Légende et les aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d’Ulenspiegel et de Lamme Goedzak au Pays de Flandres et ailleurs, dans le texte de l’édition de 1867.
Le premier chiffre romain correspond au numéro du Livre – le roman comporte 5 livres et le deuxième chiffre romain renvoie au chapitre d’où a été tirée la chanson. Ainsi, on peut – si le cœur vous en dit – retrouver le texte originel et plein de détails qui ne figurent pas ici.



Charles Quint
Quelques années après sa mort.




Nous voici, Lucien l’âne mon ami, à la vingt et quatrième canzone de l’histoire de Till le Gueux. Les vingt-trois premières étaient, je te le rappelle :

01 Katheline la bonne sorcière (Ulenspiegel – I, I)
02 Till et Philippe (Ulenspiegel – (Ulenspiegel – I, V)
03. La Guenon Hérétique (Ulenspiegel – I, XXII)
04. Gand, la Dame (Ulenspiegel – I, XXVIII)
05. Coupez les pieds ! (Ulenspiegel – I, XXX)
06. Exil de Till (Ulenspiegel – I, XXXII)
07. En ce temps-là, Till (Ulenspiegel – I, XXXIV)
08. Katheline suppliciée (Ulenspiegel – I, XXXVIII)
09. Till, le roi Philippe et l’âne (Ulenspiegel – I, XXXIX)
10. La Cigogne et la Prostituée (Ulenspiegel – I, LI)
13. Indulgence (Ulenspiegel – I, LIV)
14. Jef, l’âne du diable  (Ulenspiegel – I, LVII)
15. Vois-tu jusque Bruxelles ? (Ulenspiegel – I, LVIII)
16. Lamentation de Nelle, la mule et la résurrection (Ulenspiegel – I, LXVIII)
17. Hérétique le Bonhomme (Ulenspiegel – I, LXIX)
18. Procès et condamnation (Ulenspiegel – I, LXIX)
19. La Mort de Claes, le charbonnier (Ulenspiegel – I, LXXIV)
20. Le Talisman rouge et noir (Ulenspiegel – I, LXXV)
21. La Vente à l’encan (Ulenspiegel – I, LXXVI)
22. Telle est la Question (Ulenspiegel – I, LXXVIII)
23. Charles et Claes (Ulenspiegel – I, LXXIX)

La précédente chanson relatait le rêve de Katheline dans lequel Claes, père de Till et Charles Quint, père de Philippe étaient morts et s’étaient, en conséquence, présentés devant le juge suprême. La canzone s’était achevée par l’entrée de Claes chez les bienheureux et la remise de Charles au maître des enfers pour suite utile. 

De cela je me souviens fort bien, dit Lucien Lane en opinant du chef. Mais ce qu’il en adviendrait ensuite pour Charles, on attend toujours de le savoir.

C’est précisément le thème de la chanson au titre si évocateur : « Trois cents ans de torture », voilà ce qu’il advînt de Charles Quint.

Il l'avait bien mérité, je pense. Toutefois, trois cents ans de torture, c’est bien beau, mais lesquelles ?, dit Lucien l’âne en tremblant de tous ses membres.


Je ne les détaillerai pas, car c’est précisément l’objet de la chanson. Je t’en donnerai simplement le principe général  énoncé par le juge : « Qu’il y subisse tout ce qu’il fit subir sur Terre. »

Voilà ce que j’appelle un jugement juste, dit Lucien l’âne.

Et miséricordieux, ajoute Marco Valdo M.I.

Miséricordieux ?, dit Lucien l’âne un peu interloqué de tant de mansuétude.

Oui, miséricordieux, car après ces trois cents ans, il pourra enfin connaître le repos des morts. C’est comme tu l’as si bien compris, un juste retour des choses. Il faut cependant bien dire que ce n’est qu’un rêve de bonne femme, car les tyrans paient rarement et même, à la réflexion, ne paient jamais leurs dettes de sang et de douleur. Et ils le savent pertinemment, même s’ils vivent en permanence dans la méfiance, la suspicion et la peur, entourés de gardes du corps, dont ils ne savent pas s’ils ne vont pas se retourner contre eux, ni à quel moment.

Moi, dit Lucien l’âne en haussant les épaules, le sort des tyrans m’est indifférent. L’essentiel, la seule chose qui compte, à mes yeux d’âne, c’est qu’ils disparaissent une mauvaise fois pour toutes. Mais qu’on me comprenne bien : ce n’est pas que j’aie la moindre compassion à leur égard, c’est que je pense qu’il n’y a aucune manière de leur faire rendre mesure pour mesure comme il semble que cela se fasse dans le rêve de Katheline. Cependant, il n’empêche qu’il nous faut reprendre notre tâche et tisser le linceul de ce vieux monde tyrannique, despotique, complaisant et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane


À son ami le Christ, Lucifer demande alors :
Que faire de ce vieux tyran mort ?
En la salle aux tortures, mets donc ce vers ;
Qu’il y subisse tout ce qu’il fit subir sur Terre :

Le supplice de l’eau qui gonfle les estomacs,
Celui des chandelles qui brûle les pieds et les aisselles,
L’estrapade qui disloque les épaules,
La roue qui brise les jambes et les bras.

L’arsure du bûcher, tous les supplices en somme
Afin que chaque fois où une femme ou un homme
Les souffrira en son corps, en perdra la tête,
Chaque fois, en lui, la douleur se répète.

Il apprendra par l’eau, par le feu, par le fer
Le mal qu’un homme injuste peut faire
Quand il gouverne et commande.
Il ne serait pas mal aussi qu’on le pende,

Qu’il subisse mille caprices de bourreau,
Qu’il pourrisse en prison,
Qu’il gémisse hors de raison,
Qu’il meure un peu sur l’échafaud,

Qu’il soit honni, vilipendé, fouetté,
Que la délation l’accuse, qu’il soit dénoncé,
Que la confiscation le ruine,
Que le remords enfin le mine.

Fais-en un âne à maltraiter, mal nourrir,
Un miséreux qu’on affame, qu’on désespère,
Un ouvrier condamné au travail forcé,
Un être qu’on moque et qui doit fuir,

Un chien qu’on abreuve de coups et de pierres,
Un esclave aux Indes qu’on vend aux enchères,
Un paysan qu’on fait mercenaire,
Qui meurt sans savoir pourquoi à la guerre ;

Et ce pendant trois cents ans.
Il paiera ainsi les souffrances qu’il fit, les misères
Et puis, s’il est bon homme alors,
Donne-lui un coin ombreux pour le repos de son corps.

Ah ! Si j’avais un verre de vin d’Andalousie !
Viens Charles, dit le diable, le temps est fini
Du vin, des viandes et des volailles,
Grignote ton anchois avant que je te tenaille.