Le Veilleur de Nuit
Chanson française — Le Veilleur de Nuit — Marco Valdo M.I. — 2023
LA
ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par
Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von
Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en
parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par
Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce
territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le
monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre,
dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son
abondante littérature.
LA
ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par
Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von
Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en
parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par
Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce
territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le
monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre,
dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son
abondante littérature.
LA
ZINOVIE
Épisode
1 : Actualisation
nationale ;
Épisode 2 : Cause
toujours ! ;
Épisode 3 : L’Erreur
fondamentale ;
Épisode 4 : Le
Paradis sur Terre ;
Épisode 5 : Les
Héros de l’Histoire ;
Épisode 6 : L’Endémie ;
Épisode 7 : La
Réalité ;
Épisode 8 : La
Carrière du Directeur ;
Épisode 9 : Vivre
en Zinovie ;
Épisode 10 : Le
But final ;
Épisode 11 : Les
nouveaux Hommes ;
Épisode 12 : La
Rédaction ;
Épisode 13 : Glorieuse
et grandiose Doussia ;
Épisode 14 : Le
Bataillon des Suicidés ;
Épisode 15 : Les
Gens ;
Épisode 16 : Jours
tranquilles au
Pays ;
Épisode 17 : La
Région ;
Épisode 18 : Mémoires
d’un Rat militaire ;
Épisode 19 : L’inaccessible
Rêve ;
Épisode 20 : La
Gastronomie des Étoiles ;
Épisode 21 : Le
Progrès ;
Épisode 22 : Faire
ou ne pas faire ;
Épisode 23 : Le
Bonheur des Gens ;
Épisode 24 : La
Sagesse des Dirigeants ;
Épisode 25 : Les
Valeurs d’Antan ;
Épisode 26 : L’Affaire
K. ;
Épisode 27 : L’Atmosphère ;
Épisode 28 : La
Nénie de Zinovie ;
Épisode 29 : L’Exposition
colossale ;
Épisode 30 : La
Chasse aux Pingouins ;
Épisode 31 : Le
Rêve et le Réel ;
Épisode 32 : La
Vérité de l’État ;
Épisode 33 : La
Briqueterie ;
Épisode 34 : L’Armée
des Chefs ;
Épisode 35 : C’est
pas gagné ;
Épisode 36 : Les
Trois’z’arts ;
Épisode 37 : La
Porte fermée ;
Épisode 38 : Les
Puces ;
Épisode 39 : L’Ordinaire
de la Guerre ;
Épisode 40 : La
Ville violée ;
Épisode 41 : La
Vie paysanne ;
Épisode 42 : La
Charrette ;
Épisode
43 : Le
Pantalon ;
Épisode
44 : La
Secrète et la Poésie ;
Épisode
45 : L’Édification
de l’Utopie ;
Épisode
46 : L’Ambition
cosmologique ;
Épisode 47 :
Le
Manuscrit ;
Épisode
48 :
Le
Baiser de Paix ;
Épisode
49 :
Guerre
et Paix ;
Épisode
50 :
La
Queue ;
Épisode
51 :
Les
Nullités ;
Épisode
52 :
La
Valse des Pronoms ;
Épisode
53 :
La
Philosophie spéciale ;
Épisode
54 :
Le
Pays du Bonheur ;
Épisode
55 :
Les
Pigeons ;
Épisode
56 : Les
Temps dépassés ;
Épisode
57 : La
Faute à la Contingence ;
Épisode
58 : Guerre
et Sexe ;
Épisode
59 : Une
Rencontre
en Zinovie ;
Épisode
60 : La
Grande Zinovie ;
Épisode
61 : La
Convocation ;
Épisode
62 : Tatiana ;
Épisode
63 : L’Immolation ;
Épisode
64 :
Que
faire ? ;
Épisode
65 :
Ni
chaud, ni froid ;
Épisode
66 :
Le
Congé éternel ;
Épisode
67 : À
perdre la Raison ;
Épisode
68 :
Les
Sauveurs de l’Humanité ;
Épisode
69 :
L’Eau
qui dort ;
Épisode
70 : Le
Régime en Place ;
071.
Épisode :
Un
Conflit avec l’Étranger ;
072 :
Petit
Manuel de Survie ;
073.
La
Banalité ;
074.
La
Ligne de Conduite ;
075 :
Les
Femmes de Zinovie ;
076.
La
Légende ;
077 :
Le
Devoir sacré ;
078 :
Les
nouveaux Soldats ;
079 :
Bruit
de Fond ;
080 :
Une
résistible Ascension ;
081 :
La
Zone interdite ;
082 :
Les Pommes ;
083 :
La
Normalité ;
084 :
L’Autorisation ;
085 :
L’Exclusion ;
086.
Quelle
Affaire ?;
087 :
Le
Vase vide ;
088.
Introspection ;
089.
Le
Pays gris ;
090.
Tout
un Style ;
091.
L’État
unique
Épisode 92
NIKOULINE ET CHOUYDINE
Boris Strakhov — 1995
Dialogue Maïeutique
Donc, dit Marco Valdo M.I., les voix continuent à se faire entendre. Ce sont des bouts de conversation entre Zinoviens. Depuis quelques épisodes, on est dans un caboulot où nous a entraînés le veilleur de nuit. Il est à une table, dans un coin au sein d’un groupe qui s’est constitué fortuitement et par affinités ; il discute avec un autre Zinovien excentrique comme lui. L’un dit ci, l’autre dit ça. Allez savoir qui dit ça ?
C’est bien là le problème, dit Lucien l’âne, pour ceux dont le métier est de savoir qui dit quoi à qui, surtout dans la cohue des files, des arrêts de bus, des magasins, des bistrots et des autres endroits où se rassemblent les buveurs.
Oui, Lucien l’âne mon ami, tu as raison. Cependant, si les murs ont des oreilles et même beaucoup d’oreilles fureteuses, beaucoup d’yeux curieux, les citoyens ont depuis longtemps compris cette situation évidente et savent fort bien comment se protéger de leurs autorités. Et s’il faut bien qu’ils vivent et que comme la plupart des humains, ils aiment la parlote, la discussion, la confidence et qu’ils finissent ainsi toujours par dire des choses qui leur passent par la tête ou qui leur tiennent à cœur, ils s’arrangent pour que tout se passe sous le couvert de l’anonymat chaotique des lieux composites et par essence, eux-mêmes anonymes.
Mais enfin, dit Lucien l’âne, à la longue, ce doit être pénible de vivre dans la clandestinité alors qu’en principe, on est chez soi.
C’est vrai, dit Marco Valdo M.I., et comme on va le voir, il y a des moments où soudain ça éclate, où ça déborde. C’est le cas ici pour le veilleur de nuit qui pousse une gueulante de révolte. Son malaise mène son mal-être à une intensité insupportable.
« J’en ai marre, j’en ai jusque-là !
J’aimerais ne plus rien voir de tout ça,
J’aimerais être heureux d’être en vie… »
Et voilà, il déballe. Il déballe des choses sur le Guide :
« À présent, les cauchemars du Guide
Nous menacent du vide
Et de siècles de malédiction. »
sur les pères fondateurs :
« À l’origine, dans un lointain passé,
Ces sévères barbus sentencieux
Ces glorieux maîtres audacieux,
Ont contrefait la vérité. »
et dénonce sans fard l’état de l’État :
« Cette société fondée sur le crime
Est pure déréliction,
Disparition de la promesse ultime. »
Houla, dit Lucien l’âne, il y va vraiment fort.
Oui, dit Marco Valdo M.I., mais en paroles, car il se lamente aussi d’une certaine impuissance :
« Écrire des livres sans lendemain,
À quoi bon ? L’espoir est un poison.
Changer de Guide, changer de décor ?
À quoi bon ? Nul ne peut changer de corps. »
et s’il met le doigt dans la plaie, il reste assez circonspect quant à l’avenir :
« La Zinovie s’enfoncera
Encore plus à fond dans l’ordure.
L’humanité trouvera
Une issue. La chose est sûre.
Ça prendra des années et des années… »
Pour finir, un petit coup de projecteur sur la réminiscence voulue du refrain de la chanson de Jacky, de Jacques Brel :
« Être bien une heure seulement,
Être bien au moins une fois,
Être bien un jour, une semaine, un mois.
Être bien toute ma vie durant. »
Oh, dit Lucien l’âne, je l’avais reconnue comme celle où tu parodies Aragon, repris par Léo Ferré dans Est-ce ainsi que les hommes vivent ? :
« Changer de Guide, changer de décor ?
À quoi bon ? Nul ne peut changer de corps.
De longtemps, l’utopie nous trahit
Dans des rêveries diurnes de paradis. »
et plus subtile à déceler quand même, cette mémoire de Charles Cros, intitulée En Cour d’Assises :
« Je suis l’expulsé des vieilles pagodes
Ayant un peu ri pendant le Mystère ;
Les anciens ont dit : Il fallait se taire
Quand nous récitions, solennels, nos odes. »
que la chanson rappelle disant :
« Ces génies, en immortels rhapsodes,
Psalmodiaient solennels leurs odes. »
Maintenant, je propose d’en rester là et de laisser place à la chanson qui a encore tant de choses à dire, tant de secrets à révéler. Tissons alors le linceul de ce vieux monde menteur, vantard, fantomatique, roué, retors, roublard et cacochyme.
Heureusement !
Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane
J’en ai marre, j’en ai jusque-là !
J’aimerais ne plus rien voir de tout ça,
J’aimerais être heureux d’être en vie,
D’être en liberté, ici, en Zinovie ;
Boire un coup, si j’ai envie ;
Avoir à manger, peu, mais assez ;
Être au chaud, à peu près habillé ;
Profiter de temps en temps de la vie :
Être bien une heure seulement,
Être bien au moins une fois,
Être bien un jour, une semaine, un mois.
Être bien toute ma vie durant.
Quelle vie, quelle existence !
Ici, on vit mal à l’avance
De vivre plus mal encore demain.
La joie à venir est déception,
Écrire des livres sans lendemain,
À quoi bon ? L’espoir est un poison.
Changer de Guide, changer de décor ?
À quoi bon ? Nul ne peut changer de corps.
De longtemps, l’utopie nous trahit
Dans des rêveries diurnes de paradis.
Rien, ni personne ne changera :
L’avenir radieux adviendra !
Ces génies, en immortels rhapsodes,
Psalmodiaient solennels leurs odes.
À l’origine, dans un lointain passé,
Ces sévères barbus sentencieux
Ces glorieux maîtres audacieux,
Ont contrefait la vérité.
À présent, les cauchemars du Guide
Nous menacent du vide
Et de siècles de malédiction.
Cette société fondée sur le crime
Est pure déréliction,
Disparition de la promesse ultime.
Les voies mystérieuses de l’histoire
Sont longues, lentes et noires.
La Zinovie s’enfoncera
Encore plus à fond dans l’ordure.
L’humanité trouvera
Une issue. La chose est sûre.
Ça prendra des années et des années,
Moi, j’ai construit cette société bornée.
C’était effroyable, on était implacable.
Combien ont souffert ? Combien ont péri ?
Je n’en dors plus, c’est épouvantable.
Alors, je suis veilleur de nuit.