vendredi 25 février 2022

Les Valeurs d’Antan

 


Les Valeurs d’Antan



Chanson française – Les Valeurs d’Antan Marco Valdo M.I. – 2022




LA ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre, dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son abondante littérature.




LA ZINOVIE

Épisode 1 : Actualisation nationale ; Épisode 2 : Cause toujours ! ; Épisode 3 : L’Erreur fondamentale ; Épisode 4 : Le Paradis sur Terre ; Épisode 5 : Les Héros de l’Histoire ; Épisode 6 : L’Endémie ; Épisode 7 : La Réalité ; Épisode 8 : La Carrière du Directeur ; Épisode 9 : Vivre en Zinovie ; Épisode 10 : Le But final ; Épisode 11 : Les nouveaux Hommes ; Épisode 12 : La Rédaction ; Épisode 13 : Glorieuse et grandiose Doussia ; Épisode 14 : Le Bataillon des Suicidés ; Épisode 15 : Les Gens ; Épisode 16 : Jours tranquilles au Pays ; Épisode 17 : La Région ; Épisode 18 : Mémoires d’un Rat militaire ; Épisode 19 : L’inaccessible Rêve ; Épisode 20 : La Gastronomie des Étoiles ; Épisode 21 : Le Progrès ; Épisode 22 : Faire ou ne pas faire ; Épisode 23 : Le Bonheur des Gens ; Épisode 24 : La Sagesse des Dirigeants

 

 

Épisode 25






FOUTINE

d’après un portrait peint par George Bush Jr







Dialogue Maïeutique



Ah, ce voyage en Zinovie !, dit Marco Valdo M.I., il nous en apprend des choses sur cet étrange monde qu’on y côtoie. Et comme le répercute la chanson, particulièrement sur son Guide-finissant, qui n’est d’ailleurs jamais qu’un guide-successeur et, je le rappelle, un guide-usurpateur et comme en attestait le rêve du guide dans l’épisode 19 : L’inaccessible Rêve, qui est nettement atteint de la folie des grandeurs. D’où son nom de Foutine qu’on trouvait déjà dans l’Actualisation nationale.


Visiblement, dit Lucien l’âne, Foutine tente de surpasser son prédécesseur Stalone comme le disent Les Gens :

« Ici, en Zinovie, tout est sous contrôle ;
Par sûreté, on surveille les gens ;
Ici, à vie, chacun connaît son rôle.
Stalone ou Foutine, le seul Guide, c’est le président. »


Et plus encore, il ambitionne de créer un empire de mille ans et de surcroît, mondial. Comme on dit chez nous, il est complètement à la masse, il se prend pour un César. À mon avis, il devrait se méfier du mois de mars et tant qu’à faire, de la pleine lune, tous les cosmistes savent ça.


Mais il n’y a pas que le Guide, reprend Marco Valdo M.I. ; il y a sa camarilla, cette bande de prétendants qui entourent le monarque et guettent le moment de prendre sa place et par-dessous, il y a encore toute la pyramide des guides grands, moyens, petits et minuscules, accrochés à leurs oripeaux. Tous indistinctement, ce sont les pantins grotesques de la chanson Le Bonheur des Gens :

« Des pantins grotesques nous guident,
Encensent le Guide et ses mots vides
Hypnotisent – tic-tac – les foules
Et la chorale caquette telle la poule.
Le guide un génie, quelle plaisanterie ! »,


dont le mantra est : « Il faut rétablir les valeurs d’antan. » On ne peut plus passéiste et nostalgique. Ce sont les remugles de la désuétude, une forme de décrépitude mentale.


« Grand-père dit : c’étaient de durs combats,
On les menait pour nos descendants.
C’est la lutte de toute une vie
Pour l’avenir radieux de la Zinovie. »


Oui, dit Lucien l’âne, assurément, la Zinovie est un pays très puissant, si elle concentre ses forces à un endroit et à un moment en oubliant tout le reste et en ignorant la suite. Mais au fait, que raconte-t-elle cette nouvelle chanson ?


On en a déjà dit beaucoup, Lucien l’âne mon ami ; cependant, je résume. Dans les deux premières strophes, elle détaille les rêves et les discours du Guide et la méthode Coué qu’appliquent consciencieusement les courtisans. La troisième aborde de façon imagée, l’esprit qu’on impose aux gens et la manière de faire pour « rétablir les valeurs d’antan ». Par défaut d’un présent convenable, la Zinovie des Guides est un pays très attaché à son glorieux passé. La quatrième offre un écho impertinent à un esprit zinovien qui a réussi à s’échapper du conscientorium :


« La nuit, je me suis enfui,

J’ai sauté dans un train et me voici. »


Ah, dit Lucien l’âne, en Zinovie, tant qu’il y aura des guides, la fuite sera toujours la voie de l’autonomie et de la liberté quotidiennes. Alors, tissons le linceul de ce vieux monde ambitieux, arrogant, absurde, abâtardi, affreux et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Le Guide a la nostalgie du passé,

Il veut dépasser les guides d’antan.

Atteindre le plus haut des sommets,

Être plus grand que Mahomet,

Faire avancer l’humanité,

Améliorer la société,

Laisser son nom dans l’Histoire,

Être à jamais couvert de gloire.

Le Guide, sans sourciller, expose

À tous ses grandissimes conceptions.

À la Zinovie, au monde, il pose

Sérieusement ses ultimes conditions.


Le discours du Guide impressionne

Époustoufle l’auditeur étranger.

En Zinovie, ses propos empesés

N’étonnent plus personne.

Pour les responsables élevés,

Il s’agit d’approuver très fort,

Et avec ferveur, crier et se lever,

D’ovationner et d’applaudir encore.

Autour du Guide dûment célébré,

La Zinovie est grande et unie,

Toute dissidence sera anéantie,

Un avenir radieux va émerger.


En Zinovie, on porte tous le même pantalon,

Bien heureux d’avoir un pantalon.

En Zinovie, on a tous un logement,

Satisfaits déjà d’avoir un logement,

De boire, de manger ce qu’il y a.

Là-bas, ils ne se contentent pas

De porter n’importe quel pantalon,

D’avaler n’importe quelle boisson,

D’habiter n’importe quel appartement.

Là-bas, souvent, ils ont le choix.

En Zinovie, ça ne va pas comme ça.

Il faut rétablir les valeurs d’antan.


Ils ont voulu me rééduquer,

J’ai tout net refusé.

Ils m’ont exclu sans ménagement ;

On m’a envoyé au recrutement.

Le psychiatre m’a exempté,

Deux gaillards m’ont emmené

Au conscientorium pour un traitement.

L’endroit est parfait, un beau bâtiment

Sauf les miradors et les barbelés.

Ils ont voulu me piquer, j’ai refusé.

La nuit, je me suis enfui,

J’ai sauté dans un train et me voici.




mardi 22 février 2022

SOLDAT

 

SOLDAT



Version française – SOLDAT – Marco Valdo M.I. – 2022

d’après la traduction italienne de Riccardo Venturi – 2022

Chanson en langue russe – Солдат5'nizza2003


Écrite par Andrey “Sun” Zaporozhets (Андрей Запорожец) e Sergey Babkin (Сергей Бабкин)
Album : Пятница (« Pyatnitsa », c’est-à-dire « Vendredi », qui est aussi le nom du duo).

À l’ombre du cœur de ma mie (https://www.dailymotion.com/video/x1dttw)


LE SOLDAT DANS LA NEIGE

Peinture russe – 1879



Dialogue maïeutique



Encore une chanson en langue russe, dit Lucien l’âne.


C’est la saison, répond Marco Valdo M.I.. Les chansons russes migrent comme les oies sauvages, elles fuient vers le Sud.


À entendre certaines d’entre elles, dit Lucien l’âne, je crois percevoir comme l’écho lointain de rumeurs de plaines orientales. En tout cas, peu importe, la chanson parle toujours du monde, elle réinterprète les souffles du vent et en fait des prémonitions.


Oui, dit Marco Valdo M.I., tant de rumeurs, de grondements font peur aux enchantements, aurait dit Tonton Georges, quand il chantait À l’ombre du cœur de ma mie. Mais ici, c’est une histoire ancienne, une histoire d’aujourd’hui et en même temps, sans doute, une histoire future : l’histoire d’un soldat, simple soldat d’une minable guerre.


Oui, dit Lucien l’âne, il y en a tant de soldats et il y a tant de guerres.


Donc, reprend Marco Valdo M.I., ce simple soldat – qui s’exprime en russe, n’a rien du conquérant vainqueur, du guerrier audacieux, du combattant magnifique, du hâbleur héroïque ; c’est juste un soldat. Il est soldat forcé – je dis « soldat forcé » comme on dit les « travaux forcés » – comme s’il était ouvrier ou relégat dans un camp lointain. Ce sont là des situations banales comme on en troue en Zinovie ou en Russie. D’ailleurs, l’une est le reflet de l’autre.


Pas étonnant, dit Lucien l’âne, toutes les deux sont sous la houlette d’un guide imbu de sa grandeur qui guide des guides qui guident des guides chargés de tenir calme le troupeau et de le faire bêler d’admiration pour le mouton suprême.


Quoi qu’il en soit, Lucien l’âne mon ami, le soldat oublié – comme à peu près tous les soldats – d’un pays épuisé geint comme un enfant et implore sa maman de le soigner. C’est tout ce qu’il demande : un peu de compassion, car dans son horizon, on ne voit pas la paix.


Oui, Marco Valdo M.I. mon ami, la réalité du soldat est à très courte vue et demain est toujours un autre jour – quand il arrive. Enfin, tissons le linceul de ce vieux monde idiot, misérable, minable, pitoyable et cacochyme.


Heureusement !



Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane.







Je suis un soldat,

Depuis cinq ans, je ne dors pas

Et sous les yeux, j’ai des valises.

Je ne les vois pas moi-même,

Mais on m’a dit ça.

Je suis un soldat,

Je n’ai plus de tête,

On l’a fait sauter à coups de bottes.

Oo-oo-oo, hurle le commandant,

Et son menton pend,

Arraché par une grenade…

Ouate blanche, Ouate rouge

Ne guériront pas le soldat.

Je suis un soldat,

Petit enfant de la guerre.

Je suis un soldat,

Mère soigne mes blessures.

Je suis un soldat,

Soldat d’un pays oublié

Je suis un héros épuisé,

De quel roman, dites-moi.

Je suis un soldat,

J’ai une peur phénoménale,

Il me reste juste une balle.

Lui ou moi, il n’y a pas le choix.

Dernier wagon, vodka maison,

Nous sommes des millions

Dans dans ce monde-là.

Je suis un soldat,

Mon boulot, je vous le dis :

C’est de tirer sur l’ennemi.

La balle doit entrer dans

Le corps de l’adversaire.

Ce reggae est pour vous, Mère Guerre,

Êtes-vous satisfaite maintenant ?
Je suis un soldat,

Petit enfant de la guerre.

Je suis un soldat,

Mère soigne mes blessures.

Je suis un soldat,

Un soldat d’un pays oublié

Je suis un héros épuisé,

Mais de quel roman, dites-moi.


Ai'm e solgia, ai'm e solgia,

Ai'm e solgia, ai'm e solgia,

Ai'm et solgia, solgia,

Solgia.


Je suis un soldat,

Petit enfant de la guerre.

Je suis un soldat,

Maman soigne mes blessures.

Je suis un soldat,

Un soldat d’un pays épuisé,

Je suis un héros oublié,

Mais de quel roman, dites-moi ?

dimanche 20 février 2022

La Sagesse des Dirigeants

 


La Sagesse des Dirigeants



Chanson française – La Sagesse des Dirigeants Marco Valdo M.I. – 2022




LA ZINOVIE
est le voyage d’exploration en Zinovie, entrepris par Marco Valdo M. I. et Lucien l’âne, à l’imitation de Carl von Linné en Laponie et de Charles Darwin autour de notre Terre et en parallèle à l’exploration du Disque Monde longuement menée par Terry Pratchett.
La Zinovie, selon Lucien l’âne, est ce territoire mental où se réfléchit d’une certaine manière le monde. La Zinovie renvoie à l’écrivain, logicien, peintre, dessinateur, caricaturiste et philosophe Alexandre Zinoviev et à son abondante littérature.




LA ZINOVIE

Épisode 1 : Actualisation nationale ; Épisode 2 : Cause toujours ! ; Épisode 3 : L’Erreur fondamentale ; Épisode 4 : Le Paradis sur Terre ; Épisode 5 : Les Héros de l’Histoire ; Épisode 6 : L’Endémie ; Épisode 7 : La Réalité ; Épisode 8 : La Carrière du Directeur ; Épisode 9 : Vivre en Zinovie ; Épisode 10 : Le But final ; Épisode 11 : Les nouveaux Hommes ; Épisode 12 : La Rédaction ; Épisode 13 : Glorieuse et grandiose Doussia ; Épisode 14 : Le Bataillon des Suicidés ; Épisode 15 : Les Gens ; Épisode 16 : Jours tranquilles au Pays ; Épisode 17 : La Région ; Épisode 18 : Mémoires d’un Rat militaire ; Épisode 19 : L’inaccessible Rêve ; Épisode 20 : La Gastronomie des Étoiles ; Épisode 21 : Le Progrès ; Épisode 22 : Faire ou ne pas faire ; Épisode 23 : Le Bonheur des Gens ;

 

 Épisode 24





L’AVENUE KRASIKOV

Erik Boulatov – 1977







Dialogue Maïeutique




Lucien l’âne mon ami, ce voyage en Zinovie, ne nous réserve pas seulement un trajet dans le territoire contemporain (ou presque), il s’étale également, comme sans doute tu l’avais remarqué, à travers l’histoire zinovienne récente. Grosso modo, à partir de la grande révolution qui l’avait bouleversée et dont on perçoit encore les effets sur le pays, mais aussi sur les gens, tenus à être des révolutionnaires malgré eux. C’est le discours dominant et bon gré, mal gré, tout le monde doit s’y plier au moins formellement.


Oui, certes, dit Lucien l’âne, mais les choses ont évolué et il me semble logique de penser qu’elles évolueront encore.


C’est le sujet de la chanson que cette évolution, répond Marco Valdo M.I. ; elle commence par rappeler le début de la période révolutionnaire quand le nouveau régime s’était installé :


« Quand on était gamins-gamines,

Dans la cour derrière l’usine,

Tout seul entre des débris de marbres,

Du bitume fissuré et des poubelles,

Vivotait un petit arbre. »


Puis, elle en montre l’évolution : au début, vivotait l’arbre ; à présent, il y a des parcs. Remarque que c’est un point de vue urbain. On sait par ailleurs quel fut le destin des campagnes qui pour l’essentiel, ont été abandonnées à leur sort et désertées. Ensuite, il y a les grandioses projets d’avenir : créer la société nouvelle, créer la nouvelle humanité et pour cela, produire un nouveau type d’homme, transformer les gens de sorte qu’ils conviennent aux dirigeants.


Oh, dit Lucien l’âne, c’est un peu le slogan : « Si le peuple ne convient pas, qu’on fabrique un autre peuple ».


Eh bien, répond Marco Valdo M.I., il me semble que tu as parfaitement résumé la chose. Il faut adapter les gens (l’homme, la société, l’humanité) au monde tel que le conçoit le guide. Pour y arriver, il y a encore du chemin à faire et dans la chanson, on commence à voir s’installer une stratification sociale, dont je ne sais si elle sera pérenne, géologique ou si elle va à son tour se détendre en une nouvelle explosion ou plus silencieusement, s’effondrer sous le coup d’une évolution – peut-être venue d’ailleurs – qu’elle ne pourra retenir, ni suivre. Cela dit, je ne suis pas devin et la chanson n’en dit rien non plus.


Alors, dit Lucien l’âne, attendons et tissons le linceul de ce vieux monde bouleversant, étonnant, détonnant, explosif et cacochyme.


Heureusement !


Ainsi Parlaient Marco Valdo M.I. et Lucien Lane




Quand on était gamins-gamines,

Dans la cour derrière l’usine,

Tout seul entre des débris de marbres,

Du bitume fissuré et des poubelles,

Vivotait un petit arbre.

Avec des bouts de bois, des boîtes, des ferrailles,

Avec les saletés ramassées à la pelle,

On bâtissait des palais, des murailles ;

On se faisait un monde fantastique.

Maintenant, on a des avenues, des trottoirs ;

On a des parcs, les cours sont magnifiques.

Maintenant, on se nourrit d’ennui et de désespoir.


La Zinovie veut créer la nouvelle société,

Au modèle de la nouvelle humanité,

Adapter les hommes normaux,

Faire de tous des hommes nouveaux.

L’homme nouveau devra travailler

Comme on lui indiquera,

Pour ce qu’on lui donnera.

Il devra encenser les chefs, les aimer,

Les applaudir, les admirer, s’extasier.

Ne pas élever la voix, jamais discuter.

L’homme nouveau sera l’idéal vivant

De tous les dirigeants de tous les temps.


Avec tout ça, en Zinovie,

On a une solide hiérarchie.

On a des chefs, des dirigeants

Et des subordonnés obéissants.

Avant la population était le milieu

D’où s’extrayaient les responsables.

À présent, les chefs se reproduisent entre eux.

Maintenant, on a une division stable :

Un groupe sans trop de besoins, peu exigeant,

Des gens obligés, endurants, travailleurs ;

Et puis, un groupe puissant aux besoins croissants,

Heureux et avide de conquérir le meilleur.


Grâce à son Guide et à ses dirigeants,

La Zinovie est un pays puissant.

Elle peut venir à bout certainement

De tout problème, faire n’importe quoi,

Mais pas tout en même temps,

Pour sortir d’un embarras,

La vraie question est comment ?

Alors, on réunit les dirigeants,

Ils classent l’affaire prioritaire

Et chargent d’autres de faire le nécessaire.

Les dirigeants ne font rien personnellement :

Telle est la sagesse des dirigeants.